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Les attendus de l’info-valorisation : le retour de la tactique

Revue de doctrine des forces terrestres
Tactique générale
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La technologie seule ne permet pas de gagner la guerre mais peut cependant nous aider à remporter la victoire. La technique, élément primordial dans les combats menés par les armées occidentales, ne cesse d’évoluer et nous avons toujours essayé de surpasser nos adversaires dans ce domaine. Sans être techno-dépendants, nous nous reposons historiquement sur des moyens matériels pour faciliter nos engagements. Cependant, l’appréciation permanente du chef constitue toujours l’essence de notre réussite tactique. Il s’agit donc de pouvoir faire le meilleur usage possible de la technique en sachant toutefois s’en passer.


La maîtrise de l’information sera essentielle lors de nos affrontements futurs. Celui « qui connaît » aura l’avantage sur « l’ignorant ». Acquérir l’information sur l’environnement, notre ennemi et sur nos propres moyens devient de plus en plus aisé. Des systèmes automatisés relayent ces informations vers les acteurs concernés. La difficulté n’est plus tant d’obtenir ces données mais davantage de pouvoir les analyser, les classer pour finalement pouvoir les exploiter à temps. La finalité reste le « savoir utile ».
Sans dévoiler de données sensibles, nous pouvons affirmer que les avancées technologiques nous permettront dans cinq à dix ans de valoriser l’information disponible. La masse de données accessibles sera traitée, diffusée au bon moment et aux bonnes personnes pour, in fine, soutenir nos combattants. Cette info-valorisation nous permettra, entre autres, d’augmenter la dispersion de nos pions sur le terrain et de nous imbriquer au sein du dispositif ennemi. De plus, le chef pourra se concentrer sur sa tâche de commandement puisqu’il sera soulagé de toute une série de compte rendus fastidieux et «chronophages ».

Finalement, la manoeuvre des appuis sera beaucoup plus fluide et plus réactive. Grâce à la parfaite connaissance des besoins des unités au contact, l’appui et le soutien pourront être anticipés, juste suffisants, au moment le plus opportun, en ralentissant au minimum la manoeuvre. Néanmoins, Il ne s’agit que d’outils qui visent à faciliter nos engagements sans changer fondamentalement nos combats. Ces moyens seront à notre service pour prendre l’ascendant sur notre adversaire mais ne seront jamais indispensables pour emporter la victoire.


Dispersion


La sûreté d’un dispositif dépend, entre autres, de la dispersion géographique des éléments qui le composent. Cette dissémination de pions sur le terrain permet également de maintenir la surprise sur d’éventuelles intentions. En effet, une formation de masse dévoile une action future à un endroit précis alors que face à un dispositif éclaté, l’incertitude quant à l’effort principal reste totale.
Aujourd’hui, connaître son emplacement avec précision n’est plus un fantasme. Les systèmes géo référencés permettent de nous déplacer sans devoir nous arrêter à chaque carrefour pour vérifier notre position sur carte. Cela a considérablement accéléré nos mouvements et donc la manoeuvre. Il n’y a plus, a priori, d’erreur de navigation. L’évolution offerte par l’info-valorisation réside surtout dans le partage automatique de ces positions amies. Dans le passé, il était courant pour un subordonné peu confiant de rester « collé » à son chef de peur de le perdre. Un regroupement permanent d’éléments qui voulaient éviter de se retrouver isolés était habituel. Quel chef tactique, quel que soit son
niveau, n’a pas dû ordonner à un subordonné de « garder ses distances » ? Comme personne ne connaissait avec certitude la position de son voisin, chacun ressentait le besoin de rester groupé. À partir du moment où chacun dispose, en temps réel, de la position de chaque pion ami, ce besoin de regroupement disparaît. La possibilité d’appuyer ou de soutenir un voisin est rendue beaucoup plus simple et n’est contraignante que dans les durées de déplacement qui sont parfaitement connues. Ceci nous permet d’envisager une dispersion beaucoup plus grande, ce qui augmente la sûreté du dispositif et permet de maintenir la surprise sur nos intentions. En outre, la concentration des efforts pour porter un coup fatal à notre adversaire, pourra se faire au dernier moment et très rapidement, sans problème de navigation pour se regrouper. Cette notion de distance entre éléments restera, malgré tout, toujours liée aux possibilités d’appui mutuel.

 

Imbrication


Pour prendre l’ascendant sur notre adversaire, nous devons rendre sa compréhension du champ de bataille plus compliquée et donc sa manoeuvre plus difficile que la nôtre.

Grâce à l’info-valorisation, l’imbrication en profondeur au sein d’un dispositif ennemi sera possible. Chaque fois qu’un de nos soldats observera un point suspect ou un ennemi, il transmettra cette information en temps réel à ses voisins, subordonnés et chefs. Nous disposerons tous alors d’une carte commune avec nos positions mais également avec celles supposées et observées à un moment donné de l’ennemi. Nous pourrons donc cartographier l’ennemi. Ces informations, mises à jour en continu, nous permettront de discriminer en permanence l’ami de l’ennemi. Les tirs fratricides pourront ainsi être limités. L’élément d’appui occupera la bonne position et, en plus, il pourra ajuster ou stopper les effets qu’il produit s’il se rend compte qu’il y a un risque pour l’élément appuyé. Ceci permettra l’imbrication en profondeur au sein du dispositif ennemi. En d’autres termes, nos éléments seront dispersés au plus proche de notre adversaire, ce qui rendra sa lecture du champ de bataille plus embrouillée et donc sa manoeuvre plus laborieuse. Une fois encore, cela garantira notre sûreté tout en préservant la surprise de notre action jusqu’au dernier moment.


Le chef augmenté


La manoeuvre reste primordiale pour remporter la victoire. Celle-ci repose sur l’appréciation d’un chef, menée en continu et basée sur l’étude de différents facteurs : sa mission, le terrain, l’ennemi et ses moyens.

Grâce à l’info-valorisation, les chefs disposent d’une synthèse tactique avec des informations actualisées en permanence sur ces facteurs d’appréciation. Ces données sont synthétisées et transmises automatiquement, via un langage commun à tous les niveaux tactiques, sans perte de temps pour la préparation et la diffusion de points de situation ou de compte rendus. Chaque échelon peut donc se concentrer sur l’analyse de ces informations sans consacrer trop d’énergie ou d’attention à des tâches connexes de rédaction.

Le chef peut commander de l’avant, à vue du terrain, en disposant d’informations complètes, fiables et actualisées. En plus de connaître la position de ses éléments et de ses voisins, il est renseigné surles possibilités de l’ennemi, sur la valorisation du terrain, sur l’attitude de la population et sur l’état de ses moyens. Il est donc mieux informé (augmenté) pour pouvoir prendre ses décisions et pour anticiper les changements ou adapter l’articulation de ses troupes.
Ces apports ne seront exploitables que si une grande liberté d’action est laissée aux subordonnés dans l’exécution de la manoeuvre. Pénétrés en permanence des intentions de leurs chefs, les subordonnés devront pouvoir faire preuve d’initiative et exploiter chaque opportunité tactique.


La manoeuvre des appuis et du soutien


L’information est partagée par tous et permet donc d’anticiper les besoins. La manoeuvre sera plus fluide et l’action des armes d’appui et de soutien facilitée. Concrètement, dès qu’un canon aura tiré, un décompte des munitions disponibles sera automatiquement connu des logisticiens. L’état de santé du véhicule sera connu de la maintenance. La logistique sera donc aussi impactée par ces échanges permanents d’information. Grâce à une meilleure connaissance de la capacité opérationnelle des unités, le soutien sera capable, par exemple, de basculer plus rapidement ses efforts en ressources. La logistique pourra plus facilement anticiper les besoins des unités et basculera de « contrainte » à « facteur de puissance ». De plus, en ayant une vision claire sur les capacités réelles des unités, les désignations pour les missions ultérieures seront effectuées sur la base d’éléments concrets et objectifs.


Autre exemple, dès qu’un élément de mêlée détectera et renseignera une position ennemie, cette donnée sera directement et automatiquement accessible par les armes d’appui. L’artillerie disposera quasi instantanément des informations nécessaires pour localiser une cible et pour délivrer les effets demandés. Les délais de mises en oeuvre seront, par conséquent, extrêmement réduits même si la chaîne de validation des feux sera toujours nécessaire. Dans ce modèle où les troupes seront dispersées au maximum, imbriquées au sein du dispositif ennemi et dans lequel une discrimination ami-ennemi sera possible, l’utilisation des feux indirects pourrait constituer l’essentiel de la destruction de l’adversaire. La concentration rapide des effets sera plus efficace que celle des moyens.

 

Enjeux


Les quelques avantages de l’info-valorisation décrits ci-dessus ne doivent pas nous laisser croire que nous ne serons plus capables de remporter la victoire sans cette technologie. Disposer d’une information valorisée facilitera notre travail sans que nous en soyons dépendants. Le chef devra toujours commander à vue et non derrière un écran. Sa voix à la radio et sa présence sur le front permettront toujours de rassurer ou de motiver le subordonné hésitant. Ce lien tactique est primordial. Les différentes lignes de coordination permettront toujours d’éviter les tirs fratricides et garantiront toujours la cohérence générale de la manoeuvre même en cas de défaillance des systèmes. La rusticité et l’esprit guerrier constitueront toujours les fondements du combattant qui devra encore être capable de vaincre son adversaire dans un combat rapproché, les yeux dans les yeux.
Pour éviter toute techno-dépendance, il sera indispensable de maintenir des standards de formation et d’entraînement très élevés. Il faudra maîtriser les bases de la tactique sans apport technologique avant d’instruire notre personnel sur ces nouveaux équipements. Nous ne parlerons alors pas de solution « dégradée » lorsque la technique ne suivra pas mais bien de solution « optimisée » quand celle-ci nous apporta une aide appréciable. Il s’agira de faire le meilleur usage de ce que nous offre la technologie, sans en laisser l’avantage unique à l’adversaire, tout en se préparant à en être privé.


Conclusion


À l’horizon 2025-2030, la technologie conduira inévitablement à une évolution dans la manière de combattre sur un champ de bataille. Sans révolutionner l’art de la guerre, l’info-valorisation nous permettra de gagner et de conserver l’ascendant sur nos adversaires.
Une plus grande dispersion de nos troupes sur le terrain, garant de notre sûreté, nous permettra de maintenir la surprise sur nos intentions. En outre, l’imbrication au sein du dispositif ennemi rendra possible une manoeuvre décentralisée dans la profondeur, marqué par une alternance de dispersion et de concentration d’une masse plus agile.

Le chef, mieux informé grâce à un « savoir utile » et non à un « savoir plus », pourra baser ses décisions sur une appréciation plus complète et, aidé par une automatisation des tâches connexes, il pourra se concentrer sur son rôle premier : commander de l’avant!
Finalement, les coordinations interarmes et interarmées, ainsi que la manoeuvre des appuis seront renforcées, ce qui offrira l’opportunité à ces acteurs de remplir leurs rôles essentiels dans la manoeuvre.
Néanmoins, il ne faudra pas oublier nos fondamentaux. La technique ne primera jamais sur la tactique. Il ne s’agit bien que d’outils. Nous serons toujours capables de remporter la victoire sans ces équipements, certes précieux, mais pas indispensables. Ne craignons pas ces évolutions mais apprenons à les maîtriser pour s’assurer, in fine, de remporter la victoire.

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Titre : Les attendus de l’info-valorisation : le retour de la tactique
Auteur(s) : Major breveté d’état-major (BEL) Frédéric THIRY, Officier inséré au sein de la section exploration doctrinale, CDEC
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