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Défense collective civile NRBC 1/2

Revue militaire générale n°54
Histoire & stratégie
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Dans sa dernière publication prospective en date, le SGDSN prédit l’évolution possible des modes d’action terroristes incluant des capacités d’agression NRBC avant 2030. Dans un contexte de montée en puissance des capacités de défense NRBC de l’État, le capitaine Benjamin Neuville considère que le citoyen n’a pas, pour l’heure, été préparé à vivre l’expérience d’une telle attaque.

 

 


Naguère favorisée par la compétition militaire  entre États, la prolifération des menaces à caractère nucléaire, radiologique, biologique et chimique connaîtra une profonde mutation dans les quinze années à venir. L’accès aux connaissances techniques nécessaires à l’usage de substances radiologiques, chimiques ou biologiques est largement facilité par la porosité des espaces géographiques et le développement du partage de connaissances en ligne. Ce constat était établi par le SGDSN dans son étude prospective de 2017. Ainsi, à l’horizon 2030, la nébuleuse terroriste pourrait avoir acquis un socle de connaissances suffisant pour mettre en œuvre un attentat NRBC spectaculaire sur un territoire considéré comme ennemi, a fortiori occidental. En dépit de la victoire annoncée contre le « Califat » dans la zone irako-syrienne, il ne doit pas être oublié que le terrorisme d’inspiration islamiste est d’ores et déjà disséminé mondialement et présent à l’intérieur de nos frontières.

Cible naturelle de cette menace, le citoyen y est-il préparé ? Notre niveau de protection collective est-il suffisant ? La politique publique est-elle mobilisée pour répondre à cette double problématique  ?

 

Terrorisme NRBC

Les menaces  NRBC d’origine terroriste peuvent se caractériser par leurs modes d’action et l’origine des poisons mis en œuvre. L’histoire récente a révélé une partie de cette typologie. Certaines œuvres de fiction en ont fantasmé d’autres avec, dans certains cas, une inquiétante  crédibilité. La littérature spécialisée donne des orientations sur d’autres possibilités. Pour présenter l’ensemble du spectre, on abordera successivement les scénarios NR, C puis B en évoquant, pour chaque cas, les filières probables d’approvisionnement en ingrédients.

 

Le cas du terrorisme nucléaire et radiologique a précisément été décrit par Pierre Laroche et Hubert de Carbonnières dans leur ouvrage Terrorisme radiologique40. Ils y décrivent cinq scénarios ici présentés par probabilité croissante d’occurrence. La bombe sale radiologique, visant à disperser les radionucléides d’une source par explosifs est un scénario si souvent évoqué qu’il semble être le plus évident. Moins documentée, l’hypothèse de l’abandon d’une source radiologique fortement énergétique dans l’espace public afin de provoquer des brûlures radiologiques présente davantage de dangers en termes d’impact sanitaire et psychologique41. L’attaque délibérée d’un site nucléaire, largement médiatisée ces derniers temps à la suite des incidents des centrales de Cattenom et Cruas42, ne devrait vraisemblablement  pas, si le niveau de sécurité interne des installations nucléaires reste à son niveau actuel, retenir l’attention d’une entreprise terroriste sérieuse.  L’empoisonnement radiologique d’une source d’approvisionnement en eau ou en nourriture présente peu de perspectives de rayonnement médiatique par comparaison avec les scénarios précédents. Pour finir, le détournement d’une pièce d’arsenal nucléaire semble irréaliste, mais est pris très au sérieux par la revue stratégique de défense et de sécurité nationale 2017, qui relève le rôle inquiétant de la Corée du Nord dans le transfert de technologies proliférantes et l’incertitude sur la sécurité de l’arsenal pakistanais. Les deux premiers scénarios, caractérisés par une facilité de mise en œuvre importante relativement à toute autre hypothèse  NRBC, ne peuvent être prévenus que par un contrôle efficace des inventaires de matériel radiologique et nucléaire.  Ce contrôle efficace, raisonnablement atteignable en France dans le milieu industriel, est déjà plus difficile dans le secteur médical qui est un espace ouvert. D’autre part, la sûreté des matières nucléaires est corrélée au niveau de stabilité des états. Les anciens satellites de l’URSS constituent à cet égard une filière d’approvisionnement déjà surveillée43.

 

La filière  C  a déjà largement démontré l’intérêt que lui portent les groupes terroristes. L’opinion publique se rappelle largement de l’attentat par évaporation simple de gaz Sarin dans le métro de Tokyo à une heure de pointe en 1995, tuant douze personnes et en blessant cinquante. En février 2017, la dispersion de gaz lacrymogène au travers du circuit de climatisation de l’aéroport de Hambourg ouvre une piste inquiétante d’optimisation en provoquant l’intoxication d’une cinquantaine de personnes. D’autre part, sur le théâtre irako-syrien, l’État islamique a confirmé son intérêt pour la fabrication d’engins explosifs improvisés chargés en ypérite sans que l’on puisse déterminer si Daesh en maîtrise la synthèse.  Ce dernier point est vraisemblablement le facteur limitant la menace, l’usage de chimie nécessitant une compétence technique complexe. La captation de connaissances et de ressources humaines par  la  nébuleuse djihadiste laisse néanmoins présager d’une intensification de la menace chimique dans les quinze années à venir44.

 

Plus largement incluse dans la problématique des risques sanitaires, la menace biologique pourrait connaître une aggravation fulgurante en raison de la résurgence de pandémies et de l’accroissement de la mobilité des populations. La vectorisation d’un agent biologique pourrait être envisagée par les mêmes moyens qu’un agent chimique ou par le recours à l’empoisonnement de denrées45. L’obtention d’agents biologiques semble ici également limitée par la compétence technique de l’assaillant ou par sa capacité à infiltrer un laboratoire de confinement biologique. Cependant, la porosité des frontières et la volonté manifeste de certains candidats au djihad de mourir pour le bien de leur cause pourrait faire émerger un nouveau scénario de contamination volontaire par contact dans une zone de pandémie et vectorisation de la menace par déplacement simple dans l’espace géographique ciblé.

 

État des lieux

Dans son étude prospective à l’horizon 2030, le SGDSN relève que le terrorisme est perçu par les Français comme étant la menace numéro un. Dans le même document est évoquée la volonté manifeste de certains groupes d’acquérir et de faire usage de capacités  NRBC pour réaliser une transition et améliorer des modes d’action jusqu’alors peu élaborés. Perdant du terrain dans sa zone refuge du Levant, Daech pourrait faire muter un arsenal et des connaissances à vocation tactique pour en tirer un outil de pression terroriste. La finalité de cette démarche résiderait alors dans l’exportation de cette capacité sur le terrain occidental pour produire une désorganisation sociétale massive par action sur le comportement des populations ciblées qui, ne connaissant plus la guerre, sont susceptibles de tomber dans l’affliction.

 

La situation française récente est symptomatique de la prise de conscience politique de cette possible évolution. Ainsi, une grande inégalité a déjà été comblée depuis le milieu des années 2000 entre les armées, alors seules dotées de moyens de lutte contre le danger NRBC, et les autres services de l’État.  Cependant, dans le monde civil,  la protection NRBC  reste limitée aux intervenants qualifiés tels que les équipes de secours, les forces du ministère de l’Intérieur, certains services hospitaliers ou encore les employés de secteurs à risque46. La réponse à la menace terroriste est aujourd’hui largement considérée comme une responsabilité interministérielle. Issu en 2010 des plans Piratox, Biotox et Piratome, le plan gouvernemental NRBC continue de vivre et a été révisé en 2015. L’activité du centre national civil et militaire NRBC-E, dont la mission est d’améliorer la capacité de réponse des services de l’Etat aux menaces NRBC par la réalisation d’exercices et de sessions de formation à l’attention d’audiences interministérielles, en est une manifestation. Dotés de moyens technologiques en progrès et améliorant leur capacité d’action coordonnée, les services de l’État peuvent-ils, en revanche, prétendre à représenter à eux seuls l’ensemble du spectre de l’effort national pour réduire la vulnérabilité de la France au terrorisme alors que la cible du terroriste est, après tout, la cohésion nationale au travers de la force morale du citoyen  ?

 

 

40 Pierre Laroche et Hubert de Carbonnières : Terrorisme radiologique, éditions Elsevier, 2004.

41 SGDSN, Étude prospective à l’horizon 2030, impact des transformations et ruptures technologiques sur notre environnement stratégique et de sécurité.

42 Source  www.asn.fr, Intrusion de Greenpeace à Cattenom, Intrusion de Greenpeace à Cruas.

43 D’après  CBRN E WORLD, numéro de février 2017, la Géorgie aurait déclaré l’interception de 300 sources radiologiques au sein de filières de contrebande de 1990 à 2017.

44 SGDSN, Etude prospective à l’horizon 2030, impact des transformations et ruptures technologiques sur notre environnement stratégique et de sécurité.

45 Source Wikipédia. En 1984, Ma Anand Sheela est condamnée à 24 ans d’emprisonnement par la justice américaine pour avoir organisé un attentat bioterroriste mettant en œuvre des salmonelles, empoisonnant 750 personnes.

 



 

 

 

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Titre : Défense collective civile NRBC 1/2
Auteur(s) : le capitaine Benjamin NEUVILLE
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