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Les enjeux des relations militaro-médiatiques durant l’opération Daguet 

Soldats de France numéro spécial Guerre du Golfe
Histoire & stratégie
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L’information en temps de guerre de haute intensité est un sujet délicat. Communiquer est indispensable, mais encore faut-il ne pas divulguer de secrets opérationnels. Durant l’opération Daguet, les médias ont donc dû faire l’objet de divers contrôles.


Trouver un équilibre en temps de guerre

 

L’information en temps de guerre de haute intensité est un sujet délicat. Comme le rappelait Guy Mollet, « une armée qui ne vivrait pas en étroite symbiose avec la Nation, serait tout de suite perdue, isolée, repliée sur elle-même1 ». Il est donc indispensable de communiquer sur ce qui se déroule sur le terrain afin de rassurer la population pour en obtenir le soutien. Ce rôle d’informateur est en général joué par des journalistes civils. Cependant, cet impératif se révèle souvent source de difficulté, puisque la recherche d’information peut parfois se confondre avec du renseignement et compromettre le secret opérationnel. En effet, l’efficacité des actions militaires repose par principe sur l’effet de surprise, et donc sur un minimum de discrétion. Cette problématique s’est trouvée d’autant plus renforcée durant la guerre du Golfe, du fait de la transmission en direct et de l’exigence des populations en matière d’information. Il a donc fallu trouver un équilibre entre ces deux extrêmes.

 

Cacher pour protéger le secret militaire

 

Pour éviter de compromettre le secret opérationnel, l’une des solutions les plus instinctives est d’abord de cacher l’information aux yeux des journalistes. C’est par exemple ce qui arriva peu avant l’offensive terrestre. Comme l’Irak était en possession d’aéronefs français achetés auparavant, il a été demandé à l’armée de peindre les bandes d’invasion (trois bandes blanches) sur les hélicoptères français Puma et Gazelle afin de les différencier instantanément et d’éviter ainsi les tirs fratricides. Seulement, pour que cette stratégie fonctionne, il fallait maintenir ce moyen d’identification secret. Or, à peine les anneaux ont-ils été peints que des journalistes civils sont venus faire le tour des unités. Les soldats n’ont alors eu d’autre choix que de recouvrir les bandes d’invasion à l’aide de leurs duvets afin de les leur masquer. 

 

Si cette solution fut adoptée dans la hâte, les venues des journalistes étaient en temps normal mieux préparées. En effet, en amont de leur arrivée, les soldats qui allaient se retrouver face aux journalistes recevaient des consignes de leurs supérieurs quant à ce qu’ils pouvaient et ne devaient surtout pas dire. Mais cette organisation s’avérait souvent maladroite du fait de l’enchevêtrement des consignes, ce dont se souvient Patrice, à l’époque chef de peloton au sein du 1er Régiment de Spahis : « J’étais complétement traumatisé, parce que, chaque fois qu’un journaliste débarquait, on était briefé par quinze personnes. [Le capitaine, le chef de corps, l’officier de presse du régiment, l’officier de presse de la division, etc.] Et nous, on se retrouvait comme des benêts devant le journaliste, manquant cruellement de naturel, de spontanéité2 ».

 

Contrôler les journalistes

 

Cependant, garder secrètes les informations d’ordre opérationnel n’était pas un gage certain de confidentialité. Les journalistes pouvaient en effet obtenir ces informations par d’autres moyens, ou les deviner par leurs propres observations. Il importait donc de contrôler également leurs publications afin qu’aucun renseignement confidentiel n’y figure. Un certain nombre de journalistes étaient embarqués en immersion dans les unités françaises de la division Daguet, y compris durant l’offensive terrestre, afin de répondre à l’exigence de communication de l’armée. Mais ces journalistes étaient en permanence accompagnés par des officiers presse et leurs déplacements étaient limités, tant dans un but opérationnel que pour garantir leur sécurité sur un terrain de guerre au risque chimique constant. Enfin, tout un processus avait également été mis en place pour étudier et valider leurs productions avant diffusion. Le journaliste Pierre Bayle, qui a couvert l’offensive terrestre de Daguet auprès du 1er Régiment de Spahis, le résume ainsi : « nous avions signé un document qui était un engagement de respecter totalement la confidentialité et de donner nos papiers aux autorités militaires qui les passaient ensuite à Riyad au SIRPA [Service d’informations et de relations publiques des armées] qui les filtrait, puis les renvoyait à Paris3 ».
 

Un équilibre en péril pour les guerres à venir ?

 

En essayant d’instaurer cet équilibre en temps de guerre et grâce aux leçons qui en ont été tirées, la guerre du Golfe a contribué à améliorer de façon structurelle les relations entre les médias et le milieu militaire. Désormais, les écoles de formation enseignent aux militaires comment communiquer. Les ordres d’opération comprennent même une annexe communication, des éléments de langage et de comportement vis-à-vis des journalistes. De plus, deux entités ont été créées en 1998 afin d’optimiser la communication militaire : la DICoD (Délégation à l’information et la communication de la Défense) et la cellule de communication du chef d’état-major des armées.

 

Néanmoins, ces avancées sont aujourd’hui concurrencées par l’essor des nouvelles technologies, notamment les réseaux sociaux, qui menacent plus que jamais l’efficacité opérationnelle. La possibilité donnée à chacun d’être désormais l’émetteur d’une information, circulant instantanément à travers le monde sans modération préalable, peut devenir une source précieuse de renseignements pour l’ennemi dans un contexte de haute intensité. Un nouvel équilibre doit être trouver.

 

 

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1 - Guy Mollet, 13 mai 1958, 13 mai 1962, Paris, Plon, 1962.

2 - Hubert Leroux, Antoine Sabbagh, Paroles de soldats. Les Français en guerre 1983-2015, Paris, Tallandier, 2015, p. 88

3 - Frédéric Bouquet, La conquête d’As Salman. La grande aventure de la division Daguet, webdocumentaire de l’Ecpad, 2012

 

 

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Titre : Les enjeux des relations militaro-médiatiques durant l’opération Daguet 
Auteur(s) : Ornella Junet et Sonali Ghoorahoo
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Le général Roquejeoffre accueille le colonel Le Guen, commandant le groupement de soutien logistique de la division Daguet. © Riehl Michel/ECPAD/Défense.
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Un journaliste de France Inter utilise une station INMARSAT devant un hélicoptère Puma. © Charre Didier/ECPAD/Défense.
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