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La surprise stratégique et l’avenir géopolitique du monde

cahier de la pensée mili-Terre
Histoire & stratégie
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Pour obtenir la surprise stratégique, Clausewitz insiste sur l’importance de la vitesse et de la discrétion. Face à l’opacité des événements à venir,  il nous faut admettre que non seulement nous ne savons que peu ce qui va se produire, mais aussi, que personne ne sait réellement ce qui se passe à l’instant vécu. La crise financière en est, malheureusement, la plus parfaite et implacable illustration.


La surprise stratégique, l’un des leitmotiv les plus usuels de l’art de la guerre, peut être entendue comme la production d’un événement intentionnel, visant comme son nom l’indique à surprendre, frapper un espace peu ou mal anticipé et désarmer l’adversaire. Cette notion aussi ancienne que l’art de la guerre connaît ces dernières années un net regain d’intérêt, mais recoupe des réalités aussi diverses et variées que l’économie, le corps social, voire pour certains l’écologie; mêlant les notions de vulnérabilité, de risque, et de menace.

Pour produire une surprise stratégique, Clausewitz insiste sur la vitesse et la discrétion. Mais qu’en est-il de la capacité à encaisser une surprise stratégique adverse ou de celle de l’anticiper? C’est de cette capacité d’anticipation face à la surprise, c’est-à-dire celle de détecter les signaux faibles et celle de les analyser, dont est l’objet ce (très) court essai.

Par définition, plus le signal est précoce, plus il est faible. Plus le temps avance, plus la vraisemblance de ce qu’il tend à indiquer se précise, et plus la concordance se fera jour avec la multiplication des signaux, devenus alors explicites. Mais, en réalité, le signal n’est faible qu’au regard d’une attention distraite ou inexistante, d’une interprétation légère ou dilatoire.

Parler de l’avenir du monde suppose aussi de garder à l’esprit que nous vivons une fin de période de transition historique couplée à la fin d’un âge historique, ce qui implique une accélération, un «saut» de l’histoire. De fait, l’Histoire, c’est une dynamique, pas une logique. Dans ces périodes de «saut», l’histoire est imprévisible, elle bascule de fracture en fracture.

Or, nous apprenons et analysons exclusivement par répétition, sans vouloir aborder ce qui n’est jamais arrivé. D’où aussi, les effets de surestimation de certains événements, à l’instar du 11 septembre. En réalité, en géopolitique, ce que l’on ne sait pas compte plus que ce que l’on sait. Les guerres sont imprévisibles, nous le savons tous. Et nous agissons comme si nous ne le savions pas…

Face au déroulement des faits, nous devons donc mesurer la complexité des faits. D’une part, il nous faut garder l’esprit critique envers à la fois la surinformation factuelle de notre époque et l’expertise d’autorité. D’autre part, il faut nous prémunir face à la prétention de tout savoir, de tout comprendre; face à l’illusion de savoir qui évalue l’avenir en fonction de l’illusion précédente. Trop souvent, le problème ne réside pas dans la nature des événements, mais dans la façon dont on les perçoit. Ce que nous savons, non seulement ne reflète pas l’entière réalité, mais nous pousse à nous focaliser sur de simples segments que nous généralisons à ce que nous ignorons, facilité par l’urgence entretenue des médias obstruant toute vision…

De plus, nous observons toute suite d’événements de manière explicative et logique, attribuant à chaque événement un lien de cause, de fait, de conséquences, permettant de donner un sens et donc d’augmenter notre sentiment (bien réconfortant) de compréhension de l’ordonnancement du monde. Nous pensons le monde logique alors qu’il semble de plus en plus aléatoire… Nous préférons avoir tort avec précision qu’avoir raison de manière approximative. Bref, il nous faut admettre, face à l’opacité des événements à venir, que non seulement nous ne savons que peu ce qui va se produire, mais aussi, que personne ne sait réellement ce qui se passe aujourd’hui. La crise financière en étant, malheureusement, la plus parfaite et implacable illustration.

De fait, je ne peux parvenir à connaître avec précision l’inconnu par définition. Néanmoins, je peux, et je dois, m’efforcer de tenter de prévoir comment cet inconnu pourrait m’affecter afin d’être en mesure d’anticiper mes décisions. Je sais donc, avec une absolue certitude, que l’histoire prochaine va être marquée par un événement hautement improbable; mais il faut alors aussi avouer que j’ignore précisément lequel !!!

Dès lors, anticiper la surprise stratégique et prévenir les risques de nature stratégique consiste d’abord et avant tout à surveiller de manière précise et fine les évolutions géopolitiques, de recourir à l’analyse prospective afin d’appréhender les menaces potentielles. Pour ce faire, il convient de mettre en place des cellules de veille géostratégique capables d’évaluer en permanence, 24heures sur 24, par pays et zones géographiques, par menaces et thématiques stratégiques, les tendances à venir. Éclairer le présent, pour éclairer l’avenir et donc éclairer la décision ce qui implique un processus long et expert.

On le voit aisément, dans l’environnement actuel la gestion de l’imprévu doit devenir une politique active des dirigeants comme des entreprises. Et face à l’illusion de la connaissance précise et fine du futur, pour pallier la surprise stratégique, il convient d’abord de ne jamais écarter une hypothèse, aussi dérangeante soit-elle. En 2001, qui envisageait un déploiement de forces occidentales en Afghanistan? Aucun rapport parlementaire français ou américain entre 1991 et 2001 n’envisageait un tel théâtre de déploiement. Plus encore, Colin Powell, alors futur Secrétaire d’État aux Affaires Étrangères de la Présidence Bush, lors de son audition devant le Congrès, ne cite pas une seule fois ce pays comme source de problèmes éventuels. Naïveté américaine? La Direction du Renseignement Militaire française ferme son bureau affaires afghanes la veille du 11 septembre 2001…

De fait, comme le disait Pierre DAC: «il ne faut pas se fier aux choses qui ne peuvent pas arriver, car c’est justement celles-là qui arrivent…».

 

 

Monsieur Ludovic WOETS est directeur général de GEO-K, Cabinet Conseil en Risques Géopolitiques[1]. Historien et géographe de formation, il est consultant en Défense, Géostratégie, Intelligence stratégique et Prospective stratégique. Depuis 1995, il exerce des fonctions de consultant auprès du Ministère français de la Défense (EMA, DAS, DGA,) ainsi qu’auprès de plusieurs groupes industriels et sociétés du secteur de l'armement. Il intervient également en tant qu'expert et conférencier auprès de la BFCE, l'ACECO, et l'APM[2]. Il est l'auteur d'articles et de notes géopolitiques, ainsi que d'un livre, "L'Europe de la défense - Aujourd'hui et l'an 2000", chez l'Harmattan. Il prépare actuellement un ouvrage sur le devenir des guerres, et un autre sur la Géopolitique du XXIème siècle.

 

[1] www.geo-k.fr  ou geo-k@geo-k.com

[2] Respectivement  Association ayant pour but de développer une coopérative de consultants dans le domaine de la construction économique et écologique (ACECO) et Association  Progrès du Management (APM).

 

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Titre : La surprise stratégique et l’avenir géopolitique du monde
Auteur(s) : Monsieur Ludovic WOETS
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