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L’alliance du sens et de la force

L’exercice du métier des armes dans l’armée de Terre
Valeurs de l’Armée de Terre
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Ce document de l’armée de Terre est singulier. Ce n’est pas un ouvrage de droit international, même s’il emploie parfois un langage qui s’y rapporte. Ce n’est pas non plus un ouvrage de morale, même s’il s’appuie sur une tradition religieuse et philosophique au sein de laquelle notre conception de la guerre a pris naissance et forme. Ce n’est pas enfin un document de doctrine, ni un code de conduite valable quelles que soient les circonstances, même s’il pose un certain nombre de valeurs et de vertus militaires intemporelles. Il s’agit plutôt d’un document de réflexion écrit par des soldats pour des soldats d’une armée de Terre arrivée à la maturité de sa professionnalisation. Il se penche avec humilité sur les fondements et les principes d’un métier spécifique : celui du service des armes, sur les questions qu’il pose et les dilemmes qu’il soulève.


La guerre est en effet un lieu et un moment de tensions extrêmes. Les choix que les soldats doivent y opérer, souvent dans l’urgence, sont difficiles et douloureux. La plupart de ces tensions peuvent être résumées dans une version militaire du dilemme de la fin et des moyens. Tout est-il permis en temps de guerre ? La justesse d’une cause doit-elle être le critère permettant de décider de la manière de se battre ? Est-il possible de vaincre sans jamais perdre son honneur ? Quel niveau de force appliquer, et quel degré de risque prendre ? Voici quelques questions qui touchent à la morale. Elles peuvent paraître au premier abord très conceptuelles. Tout soldat sait au contraire qu’elles se posent de façon terriblement concrète dans l’action. Ces questions sont de tous les temps. Leur acuité et leur portée n’ont pas diminué avec l’évolution de notre environnement stratégique, l’émergence de nouvelles armes, ou les changements de notre société.

Pourtant, il peut exister ici ou là une conception générale de la guerre comme un espace où règnent uniquement la nécessité et la contrainte. La guerre serait l’enfer, dans un triple sens. D’abord parce qu’elle serait un mal absolu, en raison de l’horreur que provoque la mort d’êtres humains. Ensuite parce qu’il pourrait apparaître sans objet de juger moralement les soldats pour ce qu’ils font dans le seul but de hâter la victoire. Enfin parce qu’en temps de guerre, il serait vain et illusoire de prétendre former un jugement moral, comme le résume l’adage latin Inter arma enim silent leges : en temps de guerre, les lois sont muettes.


Mais les soldats, qui font la guerre sans l’aimer, ne partagent pas cette opinion. Au contraire, leur expérience réelle et personnelle renforce leur conviction qu’il existe bien une réalité morale du combat. Peut-être tout simplement parce qu’ils ne considèrent pas le service des armes comme un métier comme les autres, et qu’ils ne se voient pas eux-mêmes comme des victimes ou des spectateurs, mais plutôt comme des participants actifs, avec une responsabilité propre, individuelle et collective. Peut-être parce que le tourment qu’éprouvent les soldats devant une décision problématique est en lui-même la preuve qu’ils agissent dans un monde où la morale n’a pas disparu. Assurément parce qu’ils constatent euxmêmes qu’au plus profond de la dure réalité de la guerre, il y a toujours des moments lumineux d’humanité. Très certainement enfin parce que les traditions militaires sont toujours vivaces au 21e siècle, et rappellent aux soldats les nobles idéaux du service des armes : l’honneur guerrier a ainsi survécu au caractère changeant de la guerre.


La guerre est donc pour les soldats une expérience morale d’une puissance inédite. Elle offre un spectacle à la fois terrifiant et sublime. Chaque soldat peut éprouver dans le même instant un sentiment de puissance en observant l’immense force collective d’une armée moderne, et un sentiment de faiblesse devant son extrême vulnérabilité individuelle en tant qu’être humain. A la guerre, le soldat ne peut ignorer la mort, qu’elle soit donnée ou reçue, comme s’il s’agissait d’une chose qui n’arrive qu’aux autres. Toutes ces raisons sont à l’œuvre pour provoquer un ébranlement moral du combattant, qui peut aller parfois jusqu’à émousser sa conscience ou lui faire perdre le sens de sa responsabilité.


Ainsi, l’histoire nous enseigne qu’en temps de guerre, des actions terribles peuvent être commises par des individus dont le seul caractère distinctif est sans doute un manque de profondeur, une difficulté à penser par eux-mêmes, c’està-dire à examiner et à réfléchir, à porter un jugement sur les événements et à être conscients de leur propre responsabilité. Mais a contrario , les récits de guerres et l’expérience vécue des combattants nous donnent également d’innombrables exemples de situations dans lesquelles des soldats ont su résister sans hésiter au dévoiement de l’usage de la force et à sa transformation en une violence inacceptable. Ainsi donc, il est possible de réussir l’alliance du sens et de la force.
 

 

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Titre : L’alliance du sens et de la force
Auteur(s) : Le général chef d’état-major de l’armée de Terre
Éditeur : État-major de l’armée de Terre
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Armée