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Commander, renseigner, se préparer, combattre à l'heure des technologies de rupture

Réflexions et propositions
Sciences & technologies
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Les apports de ce que l'on appelle à tord nouvelles technologies sont visibles au quotidien dans nos vies. Le programme SCORPION pour le cas français mais de nombreux autres projets au sein des armées étrangères montrent que le terreau est devenu favorable à la réception de ces technologies au sein des armées apportant de nouvelles perspectives capacitaires. Par de nouveaux apports à intégrer dans chaque étape de la vie militaire, de la formation au combat en passant par le renseignement, les technologies augmentent le champ des possibles. Si certaines nécessitent davantage de maturité, d'investissement, de recherche et développement ou d'intérêt, d'autres sont mûres et n'attendent que d'être exploitées pour le plus grand bénéfice de l'Homme. Comment en tirer parti ? C'est l'objet des propositions et réflexions faites dans cet article. 


 

Commander, renseigner, se préparer, combattre à l’heure des technologies de rupture : réflexions et propositions

 

L’apport de nouvelles capacités par les technologies dans notre quotidien ou dans l’exercice du métier de militaire est majeur et omniprésent. Prenons par exemple pour le métier des armes la simulation utilisée afin de sensibiliser et former les pilotes, les chefs tactiques, et d’appliquer par l’apprentissage des procédés et procédures militaires. Citons  encore l’impression 3D en pleine ébullition qui permet un maintien en condition opérationnelle (MCO) accru en fournissant par exemple des petites pièces de rechange directement sur le lieu du théâtre d’opération. Cette ressource supplémentaire permet une manœuvre plus souple et plus endurante grâce à une nouvelle approche du soutien.

 

Cet apport est aussi visible pour d’autres « fonctions opérationnelles » qui nous paraissent cardinales. Dans le commandement tout d’abord (I). Le renseignement ensuite (II). Le soutien (III) et le combat enfin (IV). Une dernière partie sera consacrée à l’hologramme (V). Les technologies que nous allons mentionner sont issues de croisements et d’évolutions de technologies déjà bien établies comme l’informatique, les algorithmes, la robotique. C’est pourquoi nous récusons le terme de nouvelle technologie. Ce qui est nouveau, ce sont bien les usages qu’ils permettent et les TTP, tactics, techniques, procedures, réévaluées à l’aune de ces nouveaux éventails de compétences.

 

Ainsi, nous nous appuierons sur la robotique et l’automatisation, la réalité augmenté et virtuelle, et plus surprenant, les jeux vidéo, pour montrer les nouvelles combinaisons et synergies possibles entre la technologie et la chose militaire en partant du postulat que les connecteurs entre toutes ces technologies sont l’intelligence artificielle et l’algorithme.

 

 

I) La fonction commandement

 

Concernant le commandement, l’objectif recherché et la principale plus-value des technologies dans cette fonction est l’aide à la décision, toute échelle confondue, qu’elle soit au niveau tactique, opératif ou stratégique. L’accélération du tempo de la manœuvre, la déconcentration des forces ou leur fulgurante convergence, les transferts de la data toujours plus volubiles à la vitesse de la lumière, amènent le décideur à s’interroger sur la manière de traiter l’information recueillie pour rester efficient. L’automatisation doit permettre aux sphères les plus hautes, un déroulé fluide et assisté voire autonome de la lourde procédure chronophage à la charge des décideurs. Par le remplissage automatisé des formulaires, de notes ou de processus administratifs,  les humains pourraient davantage se concentrer sur la gestion de leurs pairs ou à défaut, reprendre et valider le premier jet effectué par l’automatisation.

 

 

A) Sous le prisme de la réalité augmentée

 

1) Au niveau tactique

 

La réalité augmentée peut au plus près du terrain, épurer ou optimiser l’affichage d’informations pour l’utilisateur. En effet, il convient de trouver le subtil équilibre entre le capteur et l’utilisateur. Si chaque utilisateur reste un capteur de base, conscient et apte à écouter et observer son environnement, il faudrait peut-être envisager une délégation non pas exclusive mais plus grande de la captation de données par la technologie. Ceci permettrait à l’utilisateur une concentration accrue et un focus sur les réalités immédiates de son action en déléguant l’interprétation des détails et de l’information issue du réel perçu, à des analystes en arrière de l’action.

 

Concernant l’expérience de l’utilisateur, cette technologie peut également renforcer l’ergonomie du soldat et la gestion des hommes par les cadres de contact. En affichant simplement sur la visière de sa protection intégrale au niveau de la tête ses relevés biologiques comme sa fréquence cardiaque, son hydratation, le nombre de ses munitions, une boussole, et la faculté de voir des points déterminés par lui-même ou d’autres opérateurs qui les auraient mis en place pour désigner des objectifs via une tablette  ou un autre outil, une forme de blue force tracking amélioré, l’utilisateur bénéficierait d’un confort dans l’exercice de sa mission qui lui enlèverait de nombreux désagréments en plus d’une surcharge cognitive et matérielle. Pour le cadre de contact, une meilleure gestion de l’équipe avec une optimisation des missions réparties serait rendue possible.

 

 

2) Aux niveaux supérieurs

 

La réalité augmentée par l’utilisation d’outils comme de la caisse à sable dans sa version numérique, permettrait aux échelles supérieures de conception et de planification d’avoir une meilleure vision, plus précise, évolutive, et plus visuelle de la situation de référence. Du point de vue du commandement et des  liaisons, elle pourrait afficher sur une carte l’état des liaisons et le transit effectif des données pour avoir un regard vif sur l’évolution du spectre électromagnétique. Cette ubiquité rendrait possible une capacité d’action directe et chirurgicale sur le problème de la transmission si elle venait  à échouer, représentée sur la caisse à sable numérique.

 

 

B) Lien entre jeux vidéo et commandement

 

1) Expériences de sensibilisation menées par le haut pour séduire le bas

 

Nous rapprochons maintenons le jeu vidéo et la réalité virtuelle. Le jeu vidéo a toujours été étroitement lié à la sphère militaire que ce soit sur les thématiques utilisées, l’influence générée, ou les publics visés. Comme outil de recrutement également, souvenons-nous du jeu de l’US Army, America’s Army[1], censé être un vecteur de propagande pour l’enrôlement de jeunes recrues, ou plus largement tous les First Person Shooter dans l’environnement militaire[2]. Mais le monde du jeu vidéo est aujourd’hui également un vivier de compétence. La DARPA mène par exemple des expériences indirectes[1] sur les cerveaux des « gamers » en action afin de voir les effets bénéfiques possibles pour des soldats qui seraient amenés à contrôler des flottes de centaines de drones par exemple[2]. L’Allemagne a également recruté des profils chez les joueurs pour leurs connaissances plus larges dans le domaine informatique[3].

 

 

2) Nouvelle forme de commandement

 

Dans l’article « Demain, les geeks chef de guerre ?[4] », une attitude mimétique à adopter de la part des  opérateurs de la guerre de demain  envers les joueurs de jeux de stratégie en temps réel était encouragée. Nous pensons en effet qu’un retour à la masse rendue possible par la robotique, amènera un opérateur à contrôler des dizaines voire des centaines d’unités robotiques. Impossible à gérer, à contrôler et à commander sur une tablette, les opérateurs devraient le faire à partir d’ordinateurs. L’interface homme machine est toute trouvée, à condition de réussir à simuler le terrain en temps réel sur l’outil à travers l’ordinateur. Celui-ci pourrait être cartographié par fragment ou non par les « spores », terme que nous allons expliciter. Ce que l’on appelle le C2 pour Command and Control pourrait donc se trouver transformé par le nombre et la nature même du commandement qui va changer avec l’implantation progressive d’unités robotisées dans les rangs des armées.

 

 

II) Renseignement

 

Le renseignement par la connaissance et l’anticipation réside dans le cœur de la décision par nature. En orientant la recherche de l’information pour l’exploiter et la diffuser au décideur, le domaine du renseignement va être soumis à des difficultés structurelles qui vont se heurter aux technologies utilisées aujourd’hui et demain. Comme pour les autres fonctions opérationnelles, nous proposons ici des réflexions en lien avec le virtuel et certaines possibilités offertes par les technologies.

 

 

A) Espace virtuel et renseignement

 

1)Le milieu du jeu vidéo

 

Le jeu vidéo et la réalité virtuelle contiennent en leur sein des possibilités inouïes pour les intérêts du renseignement. Récemment, une agence de presse utilisa la puissance d’un jeu vidéo pour cacher à l’intérieur du jeu, des ouvrages et des articles censurés par des régimes autoritaires voire des dictatures[1] , modelisés et accessibles en lecture dans une bibliothèque du jeu. Ce qui signifie que l’information se trouve aujourd’hui également ailleurs que dans notre réel. Les machines ne pourront pas la trouver. Ce paradoxe de voire la machine gagner en présence dans le réel et l’Homme gagner en présence dans l’immatériel est tout à fait singulier. Les jeux vidéo qui contiennent leurs propres canaux de communication ou qui génèrent des logiciels auxiliaires pour permettre la communication[2] sont d’énormes canaux d’information à prendre en compte. Quand bien même des algorithmes ou des scripts permettraient de traquer l’information par système de mot clé ou autre, il sera difficile de réussir à décoder la partie de code du jeu dans laquelle sont contenus les écrits censurés pour reprendre notre exemple. Des joueurs utilisateurs devront donc « jouer » pour trouver l’information, ce qui ne ressemble à rien à un jeu mais bien à une enquête, sur un territoire nouveau et à maîtriser.

 

 

2) Analogie entre le jeu vidéo et les modes de guerre

 

Le parallèle entre le jeu vidéo et le monde réel se poursuit pour nous en disant que la guerre non conventionnelle est le miroir réel  des tricheurs dans le monde du jeu vidéo. Le jeu de base est codé, possède un moteur graphique propre et des règles, c’est le monde conventionnel, normé, c’est-à-dire déclinant une guerre respectant le droit international, avec des règles d’engagement et des utilisations d’armes légales. Mais des personnes aux intérêts divergents tentent toujours de trouver la faille, la ligne de code, pour le recoder, le dépasser et tirer avantage de sa faiblesse pour le réécrire comme elles l’auront décidé[3], ce sont les modes d’actions non conventionnels. Si l’information se trouve dans le virtuel, la bataille de l’information ira la chercher, au-delà de ce que l’on voit déjà à l’œuvre entre fake, intox, deepfake etc. Nous pensons qu’il serait opportun d’investir dans des logiciels pour la vérification des flux de data déjà captés par les outils technologiques.

 

 

B) Robotique et renseignement :

 

1) Omniscience permanente

 

Les « sphères » posent la question de leur efficacité pour mener à bien des missions de renseignement[4]. Les robots ou les systèmes automatisés qui s’affranchissent du sommeil, des conditions météorologiques, déployables en tous temps en tous lieux mais qui contiennent d’autres points faibles comme une capacité de stockage limitée, des liens de transmission variables voire fragiles, requièrent des impératifs en termes de cyber sécurité, permettraient tout de même de mailler des territoires gigantesques en fournissant en temps réel et continue des informations. Ces robots seraient les « spores » qui permettraient la pollinisation de toute une aire d’opération. Des technologies comme le Lidar[5] , l’Artificial neural network[6] ou le GEOINT[7] permettraient de rendre redoutables ces spores.

 

 

2) Gardes fou contre les failles

 

Dans l’éventualité où le robot se fait capturer, il n’y a pas de risque de fuite d’information par des pressions physiques ou psychologiques dues à la torture comme cela  peut être pratiqué sur un soldat. En revanche, pour juguler la dissection de son logiciel et lire ce qu’il contient comme un livre ouvert, par des spécialistes qui seront de plus en plus nombreux, un système d’autodestruction ou de boite noire permettrait de les tracer, de les bloquer ou de les détruire à distance s’ils venaient à tomber entre de mauvaises mains. Les camouflages intelligents[8] commencent à arriver dans le paysage de la recherche et développement militaire. Avec une signature thermique et acoustique les rendant quasiment invisibles, ces spores pourraient être les capteurs les plus furtifs et les plus zélés dans le recueil de l’information de l’Histoire. Nous pourrions également imaginer d’autres fonctions comme la fonction de s’enterrer et de déployer des relais pour augmenter une couverture réseau ou permettre une bulle électromagnétique dans un espace-temps ponctuel.

 

 

C) Algorithmes :

 

1) De la pertinence de l’intégration des algorithmes dans les métiers du renseignement

 

Les algorithmes montrent déjà l’étendue de leur puissance de calcul dans les fonctions de traduction[9]. Pour la composante du renseignement c’est une plus-value énorme. En permettant de traduire n’importe quelle langue ou dialecte même approximativement en temps réel, les possibilités de recueil sont décuplées, l’important ne sera alors plus de parler la langue même si elle est dite rare, mais de connaitre la culture et l’histoire affiliées à cette langue. C’est une prérogative humaine. La technologie recentre alors l’Homme au cœur du processus.

 

 

2) Le rôle humain au final toujours primordial

 

Les analystes renforcés dans  leurs effectifs décortiqueraient tout cela, depuis l’information brute, ou déjà épurée par l’aide à la décision jusqu’au renseignement produit. Mais ceci reste dangereux dans la mesure où la machine qui viendrait à manquer une variable ou un indice jugé inutile et au final capital, ferait dévier le résultat final rendant le renseignement inexploitable voire pire, contreproductif. L’Homme doit donc rester dans la chaine à toutes les étapes, la question réside dans le ratio hommes-machines. Pour l’aspect culturel, l’association des idées, la connaissance des sous-entendus et des non-dits, les codes culturels résultant d’une part irrationnelle de nos affects ne seront jamais compris par la machine, capable au mieux de les simuler. Même si le renseignement d’origine humaine va connaître des difficultés qui lui seront propres et dont nous ne parlerons pas ici, il restera premier.

 

 

III) Soutien

 

L’entraînement devient de plus en plus difficile en raison d’un contexte bouillonnant, de moyens limités et de matériels trop peu disponibles. Pourtant, nous pensons que le soutien doit lui aussi bénéficier des apports de la technologie car des solutions réalisables pourraient bouleverser dans le bons sens le quotidien des soldats et leur préparation.

 

 

A) Réalités alternatives

 

1) Entrainement digital

 

Au niveau utilisateur, la réalité virtuelle peut servir également dans l’entrainement. Passant à un niveau supérieur où la simulation permettait de répéter et d’appliquer les procédures, il serait là possible d’améliorer ses réflexes et de « vivre » l’entrainement en profitant de gains importants dans l’économie globale des moyens comme avec l’Hololens de Microsoft. De plus, l’analyse de l’action passée sous tous les angles possibles avec des fonctions d’édition comme une pause, un retour arrière, permettraient à tous de gagner en expérience grâce à des retours d’expérience sur mesure, infinis et ne coûtant rien.

 

 

2) Des formes d’assistance nouvelles qui pérennisent la compétence

 

Autre aspect du soutien, la réalité augmentée pourrait être formidable pour la maintenance, la perte de compétence serait gelée. Afin de limiter la perte de compétence rare ou tout simplement en raison d’une pénurie ou d’une hémorragie de ressource humaine, la réalité augmentée permettrait de conserver les acquis et de former automatiquement quiconque aurait besoin de cette compétence, et ce ponctuellement ou de façon pérenne. Concernant les soins et le sanitaire, ce que nous appelons la « réalité distante », c’est-à-dire une télé déportation d’un certain savoir-faire au travers d’un avatar situé à un autre endroit que l’opérateur, permettrait à des docteurs ou chirurgiens d’intervenir sur des patients étant victimes de virus et bactéries contagieux en contrôlant les mains des automates présents à des lieues de la situation de crise. En somme, l’opérateur pourrait être sur le territoire national ou en arrière du théâtre pendant que l’automate serait présent au plus près et télé géré par un professionnel. En cas d’accident sur le médecin du groupe, l’avatar permettrait également d’apporter des soins à la victime par ce biais.

 

 

B) Robotique et soutien

 

1) Optimisation, entrainons nous comme nous combattons

 

Concernant l’entrainement, nous avons déjà évoqué l’opportunité de s’entrainer en condition réelle grâce à la réalité virtuelle. A l’aide des autres technologies, nous pourrions optimiser l’entrainement en gagnant du temps et en gagnant en réalisme. Tout d’abord, les armureries devraient pouvoir être dotées d’un robot qui donnerait l’arme au tireur. En automatisant les perceptions et réintégrations, un temps considérable serait gagné. Même chose pour le ramassage d’étuis lors d’une séance de tir. Un petit robot nettoyant tout seul le pas de tir ferait gagner un temps énorme. En utilisant également des robots en tant que cibles lors des tirs, nous pourrions gagner en réalisme sur des cibles en mouvements, sur des situations tactiques réalistes et mouvantes, nous pourrions doter ces robots par l’intermédiaire de la réalité virtuelle ou non, d’uniformes différents pour permettre au soldat de consolider ses connaissances en identification. En injectant peu à peu des algorithmes et à terme une intelligence artificielle, des scenarii pourraient être montés.

 

 

    2) Une nouvelle logistique « arrière avant »

 

Pour la logistique, la robotique peut être également salutaire. Dans les tâches de manutention que ce soit dans le transport de colis, les chargements, déchargements de munitions de vivre ou de toute autre ressources, des automates comme des robots industriels pourraient le faire. Concernant la logistique de l’avant, les convois autonomes sont une des solutions futures envisagées[10]. Nous pensons qu’ils pourraient être complétés par des robots capables de produire à partir de l’impression 3D ou autre, des ressources directement utilisables par les soldats sur place, allant de l’énergie à la nourriture en passant par des pièces matérielles voire des munitions. La faculté pour une petite usine portable automatisée, créant d’autres robots spores ou des robots pour le combat serait une révolution. Une unité déployée serait donc autosuffisante et autonome grâce à cette proto industrie portable. Nous pourrions aussi mentionner l’idée des robots polymorphes appelés aussi origamis. Ces prototypes ont la capacité de s’agréger pour former des structures uniques, ponctuelles et réversibles par le nombre. Comme la fourmi, ces petits robots sont capables de supporter des poids bien supérieurs au leur. En investissant dans cette technologie, nous pourrions très bien arriver à la construction de ponts, d’infrastructure, grâce à l’agrégat de centaines ou milliers de petits robots.

 

 

C) Intelligence artificielle

 

Comme dans le monde du jeu vidéo, l’intelligence artificielle, appelée comme cela à tort car il s’agit purement d’algorithmes, a fait des progrès vertigineux. Du Pong[11] qui se contentait de renvoyer la balle, à des ennemis qui s’adaptent au comportement du joueur[12], les algorithmes du monde civil et du jeu vidéo feraient gagner énormément au secteur militaire dans la formation et l’entrainement.

 

 

IV) Combat

 

Après avoir brossé certaines pistes de réflexion concernant la phase préparatoire, il nous faut désormais nous concentrer sur la partie du combat. Les technologies ont toujours bénéficié directement au combattant, pour le soulager, le rendre plus précis, mieux protégé, plus mobile. Qu’en est-il des technologies dont nous parlons ici ?

 

 

A) Formes de combattants déportés et augmentés

 

1) Déports

 

Dans nos autres articles[13] où nous pensons que le mecha est l’avenir de la figure combattante, nous montrons que l’agilité des gamers rendue possible par  les joysticks est reprise dans le contrôle télé opéré des robots d’aujourd’hui via des manettes Xbox ou Playstation car l’ergonomie est la meilleure et les utilisateurs sont habitués à ce type de support et de contrôleur. Le contrôle des avatars télé déportés sur le champ de bataille pourrait être dévolu au joystick ou au clavier. Mais la réalité distante pourrait très bien, par le biais de nanotechnologies ou de biotechnologies encore en gestation, s’opérer par la pensée[14], ou par d’autre sens.

 

 

2) Augmentation

 

Dans la partie combat, une voix artificielle ou un binôme à distance appelé utilisateur 2 pourrait conseiller et suivre la situation de l’utilisateur 1, l’humain. En doublant l’analyse de la situation, en bénéficiant d’un autre témoin, en profitant d’une distanciation de la vue, l’utilisateur 1 serait là aussi allégé voire aidé dans ses fonctions. Sous la forme d’une technologie implantée dans la protection ou connexe au combattant, ce compagnon serait d’une extrême utilité pour le combattant à l’échelle individuelle mais aussi collective.

 

 

B) Enjeux de communication

 

1) Défis et faiblesses de l’intermédiaire

 

Si les technologies vont permettre de nouvelles méthodes de travail, apportant une connaissance plus fine et plus immédiate de ce qui se passe sur le champ de bataille ou en opération, elles vont inévitablement apporter leurs lots de frictions qui leur sont propres. En automatisant, l’Homme, nous l’avons montré ne va pas diminuer, il va être reclassé là où c’est le plus nécessaire. Mais ceci va conduire à au moins quatre possibilités d’incompréhension. En déléguant le rôle à la machine, celle-ci peut mal interpréter ce qu’elle perçoit vis-à-vis de la machine ennemie (première possibilité), ou de l’ennemi (deuxième possibilité). La liaison entre la machine alliée et l’opérateur peut également être mise à mal (troisième possibilité). La compréhension de l’humain sur son ennemi humain, ce que nous connaissons depuis le premier duel de l’Histoire (quatrième possibilité) s’ajoute à ce lot de complexités. Par cet intermédiaire qu’est la machine, on voit donc que l’acheminement du réel ou de l’information est plus que jamais un enjeu capital. Si l’on poursuit le raisonnement, les opérations de tromperies, de ruse et autres stratagèmes que ce soit par le cyber ou par des hacks de toute autre nature vont se multiplier, ce qui nous oblige à revaloriser la guerre électronique et poursuivre les travaux en cours dans le domaine cyber.

 

 

2) Acculturation au système

 

Les décideurs d’ici dix ans et plus qui auront été aussi des utilisateurs, auront baigné toute leur vie dans cet univers et seront sensibles à ces questions. Si l’on peut imaginer un mode hors ligne ou l’utilisation de logiciels pour permettre le recueil de l’information et son traitement en évitant le risque de la compromission, de la détérioration ou des opérations de déception, il convient d’intégrer dans la codification et la matrice logicielle des outils que l’on souhaite utiliser, trois formes d’intelligence pensées et spécialement conçues pour des fins bien précises. Elles seraient renforcées par des mises à jour régulières de sécurité exactement comme le monde informatique. Un hardware évolutif, la plateforme ou robot, complété par un software en permanence veillé et corrigé du point de vue de la sécurité, de ses algorithmes, et de son intelligence artificielle.

 

 

C) Intelligences pour synergies

 

Une intelligence performative (première), informatique, serait la meilleure dans les calculs ou une action particulière, elle pourrait s’intégrer au domine cyber et informationnel, ou encore à la défense de zone par exemple. Toute couche interprétative lui serait interdite. Une intelligence biologique (deuxième), basée sur l’évolution des espèces, prônerait une solution adaptative. L’intelligence humaine n’est pas la seule requise pour la survie comme les animaux nous le montrent. Cette forme peut s’appliquer dans les domaines physiques où des robots et systèmes devraient évoluer, ceci toucherait donc des fonctions opérationnelles comme l’appui, le contact, le soutien. La troisième forme serait une intelligence subjective, dérivée de l’intelligence humaine et de l’éthique et serait l’aboutissement préalable pour une utilisation des robots au combat. Il convient donc de prendre ce que la technologie peut donner, en conservant toujours l’Homme au premier plan.

 

 

V) L’hologramme comme outil et arme à toutes les échelles et pour toutes les fonctions

 

A) Origine

 

Popularisé par la saga Star Wars, l’hologramme[15] doit être pensé pour être utilisé aussi par les militaires. Si l’on entend l’hologramme dans sa technologie actuelle, ce n’est que de la lumière qui doit être projetée sur un support afin d’être visible. L’hologramme de Star Wars relève donc pour le moment de la science-fiction puisque étymologiquement l’hologramme serait une photographie en 3D rendue possible par la technologie laser. Dans les faits, ce que l’on appelle couramment et à tort hologramme, n’est en fait qu’une illusion d’optique[16] basée sur une technique théâtrale du XIXème siècle pour la mise en scène appelée le « fantôme de Pepper ».

 

Ce qui se produit dans notre imagination lorsque nous entendons le mot hologramme relève d’une technologie appelée affichage volumétrique en espace libre[17], et ressemble beaucoup plus à l’image popularisée de l’hologramme de Star Wars. Aussi, si l’on part de cette vision, dans l’accompagnement et l’aide personnalisés, il pourrait servir à l’individuel comme au collectif. On peut imaginer également le remplacement des visioconférences ou l’usage du téléphone par ce dispositif. Il ne pourrait avoir de fait qu’une fonction de messager, de suivi et de conseil.

 

 

B) Possibles utilisations

 

Dans le monde du renseignement, le deepfake[18] combiné au deepvocal[19] pourraient faire de l’hologramme une arme diaboliquement efficace. En prenant l’apparence de tout un chacun et en étant capable de reproduire la voix d’une personne sous réserve qu’on ait extrait un échantillon d’une minute, des intelligences artificielles rendraient l’image parfaitement plausible et feraient de l’image virtuelle un capteur voire même un agent du renseignement, certes limité et éphémère mais destructeur. Cette arme pourrait se retourner contre n’importe qui, il convient donc comme toujours de penser la sécurité et les contremesures du système en amont de son déploiement. Au combat, l’hologramme pourrait être d’un secours pertinent dans la mesure où il pourrait se révéler comme leurre mobile et dynamique doté d’enregistrements préétablis de sons ou de comportements à produire en vue de réaliser certaines missions spécifiques.

 

 

Conclusion :

 

Pour conclure sur l’apport des technologies que nous préférons qualifier d’émergentes et disruptives, nous maintenons l’idée du mecha, la plus pertinente à notre sens pour conserver cet équilibre entre l’Homme et la machine, pour protéger et augmenter l’Homme, tout en le gardant prémunis des brèches créées pour tromper l’automatisation et la machine.  Ce n’est pas seulement la technologie qui fera gagner la bataille et encore moins la guerre. C’est bien le « comment va-t-on » l’utiliser qui sera prédominant. « Une machine peut faire le travail de cinquante hommes ordinaires. Aucune machine ne peut remplacer le travail d’un homme extraordinaire[20] ». C’est donc en rendant un homme extraordinaire, capable de rester compétitif à la vitesse de l’information, et en l’appuyant par cinquante machines complémentaires que les nouvelles lignes de l’art de la guerre pourraient être rendues possibles.

 

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[1] La première version, sous-titrée Recon, est sortie le 4 juillet 2002, conçue par les forces armées des États-Unis afin d'améliorer l'image de l'US Army et d'inciter les gens à s'enrôler, c’est un jeu gratuit pour toucher le plus grand nombre.

[2] Si de nombreux candidats fantasment la vie militaire à partir des jeux comme Call of Duty ou Battlefield, ils n’en demeurent pas moins des vecteurs de publicité pour l’engagement dans les armes.

[3] https://www.analyticsinsight.net/darpas-initiative-train-military-robot-swarm-using-gamers-brain/, Consulté le 15 mars 2020.

[4] https://www.weforum.org/agenda/2020/02/darpa-gamers-brain-waves-train-robots-artificial-intelligence/, Consulté le 15 mars 2020.

[5] https://hitek.fr/actualite/armee-allemande-bundeswehr-gamescom_20394, Consulté le 15 mars 2020.

[6] Rieutord,Dylan, « Demain, les geeks chef de guerre ? », DSI, N°144, Novembre-Décembre 2019.

[7] https://www.businessinsider.fr/us/minecraft-library-censored-newspaper-articles-online-books-rsf-reporters-borders-2020-3, Consulté le 15 mars 2020.

[8] Outre les messageries internes aux jeux ou aux serveurs, pensons par exemple à des logiciels comme TeamSpeak, Mumble, Discord.

[9] Plus connus sous le nom anglais de cheats, ces codes confèrent divers avantages au joueur qui devient alors invincible ou qui s’octroie des bonus changeant complètement l’équilibre du jeu.

[10] https://www.c4isrnet.com/unmanned/robotics/2020/03/06/are-orbs-the-future-of-security-drones/, Consulté le 15 mars 2020.

[11] Télédétection laser, technologie la plus aboutie aujourd’hui et plus puissante que des radars, elle est utilisée notamment dans les voitures autonomes Tesla.

[12] Technologie qui permet de traduire dans un langage naturel ce qui apparait sur une image. Elle permet ainsi une identification des cibles et génère une forme de conscience de l’environnement dans lequel doit opérer le capteur.

[13] Méthode qui tire profit de données géographiques, géolocalisées et/ou potentiellement géolocalisables dans le but d’apporter une aide à la décision.

[14] https://sciencepost.fr/ils-ont-developpe-une-veritable-cape-dinvisibilite/, http://www.opex360.com/2018/11/24/le-francais-nexter-developpe-un-concept-susceptible-de-revolutionner-le-camouflage-des-vehicules-blindes/, Consultés le 15 mars 2020.

[15] Systran et Google Traduction ont le monopole.

[16] https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/technologie-armee-us-teste-convoi-vehicules-autonomes-54384/, Consulté le 15 mars 2020.

[17]  Un des premiers jeux vidéo d'arcade et le premier jeu vidéo d'arcade de sport commercialisé à partir de novembre 1972.

[18] Les ennemis du héros dans le jeu FEAR sont connus notamment pour être une des meilleures IA du jeu vidéo.

[19] Rieutord, Dylan, « Le robot idéal », S’ENGAGER PAR LA PLUME, vol.2, 2018, p. 117-126.

Rieutord, Dylan, « L'éthique appliquée à la robotique militaire par le filtre de l'officier », Tribune RDN, 2019.

Rieutord, Dylan, « Blitzdaten et mecha, quand l’imaginaire rencontre le nécessaire », DSI, N°133, Janvier-Février 2018, pp.80-85.

[20] Les américains travaillent par exemple sur le contrôle de robots via un bracelet spécial, via le sens du toucher. Les russes travaillent sur le contrôle de drones par la pensée. Voici deux méthodes possibles.

[21] Les travaux du chercheur britannique d'origine hongroise, Dennis Gabor ont conduit à l'élaboration de l'holographie en 1941. Mais il faut attendre 1972 pour que le chercheur Lloyd développe l'hologramme intégral en combinant l'hologramme à transmission visible en lumière blanche avec la cinématographie pour produire des hologrammes en mouvement.

[22] Le groupe de musique Black Eyed Peas réussit le soit disant  exploit de faire un concert en utilisant l’hologramme alors qu’il s’agissait de tomographie. Les Japonais utilisent depuis plusieurs années un produit holographique du nom de Atsune Miku qui est une réelle star au pays. Il s’agit d’un « hologramme » qui danse et  chante lors de concert alors qu’il s’agit en fait d'une image projetée sur un fond en verre. Dans le domaine politique, Jean-Luc Mélenchon utilisa la technologie en apparence puisque là aussi il s’agissait d’une projection vidéo 2D depuis le plafond de la salle sur un film-écran presque transparent placé à 45°, créant une illusion d'optique lors de sa campagne.

[23] https://www.courrierinternational.com/article/technologie-un-hologramme-en-3d-presque-comme-dans-star-wars, Consulté le 16 mars 2020.

[24] https://la-rem.eu/2019/11/deepfake/, Consulté le 16 mars 2020.

[25] https://www.clubic.com/technologies-d-avenir/actualite-842781-voix-imitee-minute.html, Consulté le 16 mars 2020.

[26] Elbert Green Hubbard

 

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Titre : Commander, renseigner, se préparer, combattre à l'heure des technologies de rupture
Auteur(s) : RIEUTORD Dylan
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Armée