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La composante réserve de l’US Army

cahier de la pensée mili-Terre
Expériences alliées
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En cette période troublée de restrictions budgétaires drastiques, l’US Army, à l’image du reste du Department of Defense, est amenée à s’interroger sur l’avenir qu’il faut donner à sa réserve. La question est sensible à de nombreux points de vue et révèle une situation qui est difficilement comparable avec celle de la France.

Les forces de réserve de l’Army sont composées de deux entités aux caractéristiques bien distinctes: la Reserve, fédérale, aux ordres du président des États-Unis et la National Guard, aux ordres des gouverneurs des États. Ces deux composantes sont passées, en moins d’un quart de siècle, d’un statut exclusif de réserve stratégique à une force opérationnelle expérimentée reconnue qui veut conserver ce nouveau statut.

Pour bien comprendre cette problématique, il est nécessaire de brosser un rapide historique de l’armée de terre des États-Unis au sein de laquelle les réserves ont joué un rôle essentiel. Un aperçu de la situation actuelle précédera ensuite l’exposé du défi qui attend l’Army au travers de l’emploi de ses réserves dans les années à venir.


Préambule

Le National Defense Act du 4 juin 1920 organise les forces armées américaines en trois composantes: une armée régulière (d’active), une armée de réserve (appelée Organized Reserve jusqu’en 1950) et la National Guard. Déclinée au niveau de l’armée de terre, la component 1 est la force d’active, la component 2 est l’ARNG (Army National Guard) et la component 3 est la Reserve, réserve fédérale que le lecteur prendra soin, grâce aux italiques et à la majuscule, de ne pas confondre avec la composante réserve.

 

Avant de brosser les origines de la National Guard et de la Reserve des États-Unis, et pour la bonne compréhension de la situation, il faut savoir que l’armée d’active américaine est restée très longtemps réduite à sa plus simple expression. Créée en 1775 pour s’opposer aux Britanniques dans la guerre d’Indépendance, elle monte en puissance ponctuellement, en particulier pour la guerre de Sécession (un million d’hommes mobilisés) et décroît tout aussi vite (effectifs un an après la fin de cette même guerre: 11.000!). C’est aussi le cas pour la guerre hispano américaine (1898), où la mobilisation s’effectue là aussi de façon chaotique.

À l’époque de la conquête de l’Ouest et des guerres indiennes, seuls 25.000 hommes servent sous les drapeaux. Ils ne sont pas plus de 75.000 (chiffre à rapporter à l’échelle d’un continent) lorsque les États-Unis entrent dans la Première Guerre mondiale.

Ce concept a été formalisé comme l’«expansible army» du Major General Emory Upton en 1904: une force composée d’actifs relativement petite, associée à la confiance dans les milices et dans le volontariat dès que la situation exige une montée en puissance des effectifs.

 

Un peu d’histoire

  • La National Guard
  • Un nom qui fleure bon la France

Salem, petite ville de 40.000 habitants dans le Massachusetts, n’est pas célèbre que par ses sorcières, c’est aussi depuis le 10 janvier 2013 le berceau officiel de la National Guard. En effet, même si les origines de la NG peuvent remonter jusqu’aux milices des différents pays du vieux continent au début du XVIème siècle, la création de la Guard est communément datée en décembre 1636 au moment de la guerre contre les Indiens Pequots. La Massachuetts Bay Colony organise alors ses milices (les minute men) en trois régiments, celui du Nord, celui de l’Est et celui du Sud. La date du premier rassemblement effectif des troupes n’est pas connue, mais l’appartenance à ces unités requérait un entraînement par semaine et une mission de veille toutes les nuits pour prévenir toute attaque indienne.

Par la suite, plus de 12 unités similaires sont répertoriées avant même la naissance des États-Unis. Ces unités prennent part à tous les conflits qui se déroulent sur le continent nord-américain, incluant la guerre de Sept Ans (1754-1763), appelée aux USA the French and Indian War, que ce soit aux cotés des Anglais ou des Français.

L’appellation «National Guard» elle-même remonte à la visite du marquis de Lafayette à New York City en 1824. Il reçut les honneurs de la part du 2ème bataillon du 11ème régiment d’artillerie qui, en souvenir de la Garde nationale de 1789, s’est alors nommé le Battalion of National Guards.

 

  • Vers un emploi fédéral

Presque cent ans plus tard, le National Defense Act de 1916 officialise cette dénomination et étend le rôle de la NG à la défense du pays, marquant un grand pas dans l’immixtion de l’état fédéral dans l’entraînement, le financement, l’équipement, l’emploi et les missions de la Guard. Cette dernière reste cependant l’outil des gouverneurs dans la limite de leurs États.

Le National Guard Status Act de 1933 fait suite à l’envoi de 17 divisions (sur un total de 43) en Europe en 1917, et donne un statut permanent à l’ARNG comme partie intégrante des forces américaines en temps de paix comme en temps de guerre. Il introduit une différence dans la subordination à l’État fédéral en créant une National Guard d’État – uniquement aux ordres des gouverneurs – et une Guard fédérale, the US National Guard, qui devient donc officiellement une composante de la réserve de l’US Army et peut être activée soit sur ordre du gouverneur de l’État dont fait partie l’unité soit sur ordre du président[1].

 

1940 voit la mobilisation entière de la NG. 18 divisions participent aux combats, réparties de manière égale entre l’Europe et le Pacifique. À noter qu’à la fin de la guerre, la composante aérienne, soit 29 escadrons d’observation, s’est largement étoffée, et les 84 escadrons de vol en activité en 1945 formeront le noyau de l’Air National Guard quand l’Air Force sera créée en tant qu’armée distincte en 1947[2].

À la différence de la guerre de Corée, la NG ne participe pas à la guerre du Viêt-Nam, absence due à la décision politique de ne pas effectuer de mobilisation de la réserve pour le conflit. C’est seulement après l’offensive du Têt en 1968 qu’un petit nombre d’unités de la NG est utilisé, le plus souvent comme unités d’appui ou de soutien.

En 1991 (Desert storm), la majorité des unités d’appui et de soutien appartiennent à la composante réserve. Les premières unités de la National Guard mobilisées sont des unités de transport, de quartier général et de police militaire. L’artillerie ensuite fera son apparition.

Plus récemment, les opérations en Bosnie, au Kosovo et sur le Mont Sinaï sont des opérations armées exclusivement par du personnel appartenant à la National Guard.

 

  • La Reserve
  • Une création plus récente

La naissance officielle de la Reserve remonte à 1908, avec la création du Medical Reserve Corps.

Mais le concept de forces de réserve non affiliées à un État est beaucoup plus ancien et apparaît pendant la guerre de Sept Ans. Plus tard, durant la guerre d’Indépendance, l’unité du Général Washington ne se revendique pas comme appartenant à un État et Washington défend ensuite le fait qu’en période de paix, une réserve bien gérée peut permettre l’économie d’une importante composante d’active.

En 1912, la réserve n’est plus exclusivement médicale et s’étend aux autres spécialités avec la création de l’Officers Reserve Corps et de l’Enlisted Reserve Corps. Le lecteur intéressé peut se reporter à l’article écrit à ce sujet par le Colonel Roux dans le mensuel[3] de septembre 2013. Mais c’est surtout 1916 qui voit les effectifs de la Reserve prendre de l’importance. Les raisons sont multiples: situation en Europe, troubles à la frontière du Mexique alors que croît la défiance à l’encontre des milices des États considérés comme peu compétentes et surtout impossibles légalement à engager en dehors des frontières.

À l’occasion de la Seconde Guerre mondiale, les USA mobilisent 26 divisions appartenant à la Reserve (200.000 soldats).

La guerre de Corée et l’activation de 240.000 réservistes conduisent le Congrès à effectuer des modifications importantes dans la structure et le rôle de la Reserve, donnant ainsi le jour à l’United States Army Reserve, divisée en Ready Reserve, Stand by Reserve et Retired Reserve. Ces notions seront expliquées plus loin.

En 1973, le Congrès instaure la Total Force Policy, qui précise le rôle de la Reserve comme force stratégique de l’armée, force dont l’emploi est d’abord prévu pour une guerre de grande ampleur.

Quinze ans plus tard, avec les années 90, la Reserve commence une transition qui l’amène à devenir une composante à part entière des forces opérationnelles et à consolider son rôle en tant que fournisseur d’unités d’appui et de soutien. Après 2011, l’évolution s’accélère vers une force expéditionnaire solide et opérationnelle dotée de ses propres états-majors projetables et d’une culture militaire bien ancrée dans les mentalités.

 

  • Aujourd’hui

Actuellement, la Reserve est un ensemble d’unités et d’individus en mesure de fournir la capacité de surge dans le cycle ARFORGEN (le cycle qui régit l’emploi des unités US). Mais ce n’est pas seulement un réservoir stratégique.

L’intérêt réside dans le fait que les qualifications des réservistes, souvent différentes de celles de leurs camarades d’active, sont nécessaires à l’Army pour répondre à la complexité des environnements des guerres du XXIème siècle.

Ainsi, l’apport de la Reserve au système prend deux formes différentes:

  • L’Army Reserve Operating Force: la Reserve est donc structurée de manière à être en tout temps en mesure de fournir des forces pour toute opération (full spectrum) à l’extérieur et toute mission à l’intérieur du pays;
  • L’Army Reserve Generating Force: les unités de réserve assurent la montée en puissance et l’activation des réservistes en armant et en mettant sur pied les unités d’instruction (instruction initiale ou spécialisée) et les unités de soutien. La Reserve semble bien calibrée pour cette mission étant donné ses structures, sa répartition géographique et l’expérience acquise par le personnel. Cette Generating Force est aussi utilisée dans des fonctions plus opérationnelles dans le cadre de l’instruction d’armées étrangères ou d’appui – si le niveau fédéral est engagé – à la gestion de catastrophes sur le territoire national.

 

  • Quelle différence actuellement?

De nombreuses caractéristiques différencient les deux components de la réserve de l’Army.

D’abord, la répartition géographique n’est pas la même, les cartes ci-dessous montrent que les unités de la National Guard sont présentes partout sur le territoire américain et ne sont pas concentrées seulement dans les zones historiquement peuplées.

 

De plus, sans parler effectifs qui seront vus un peu plus loin, les deux composantes ne se ressemblent pas qualitativement.

La Reserve assume son passé médical en armant en priorité des unités d’appui (Combat Support) et de soutien (Combat service Support). La Reserve ainsi assure l’ossature du corps médical de l’Army, mais aussi des Civil Affairs, des Military Information Support Operations et du transport, pour ne citer que les principaux. L’US Army n’est pas en mesure d’armer ces capacités sans l’apport de sa Reserve.Le profil de l’ARNG, quant à lui, se rapproche plus de celui de l’Army d’active avec, en particulier, huit divisions de combat et 28 BCT. Il est à noter l’existence de deux Special Force Groups qui font partie intégrante de l’USASOC (Special Operations Corps).

 

Enfin, et c’est peut être le plus important, la subordination différente (unique pour la réserve fédérale, duale pour l’ARNG) influe sur l’emploi des unités. La National Guard, sous les ordres des différents gouverneurs, est beaucoup plus fréquemment employée parce qu’appelée à intervenir sur le territoire américain, le plus souvent en premier échelon en réponse à des situations d’urgence, qu’elles soient naturelles, technologiques ou terroristes. Elle retrouve là ses origines avec les Minute Men du Massachusetts.

Les deux entités sont d’ailleurs activées par des textes différents: le titre 10 du code US, code qui englobe la plupart des lois concernant les forces armées, prévoit pour la Reserve de fournir en temps de guerre, d’urgence nationale, ou plus simplement quand la  situation sécuritaire du pays le requiert, des unités entraînées et des personnes qualifiées disponibles pour une activation.

Le titre 32, lui, précise juste que la National Guard peut être mise sous commandement fédéral aussi longtemps qu’il est nécessaire, du moment que le Congrès estime que c’est nécessaire.

 

De l’importance relative de la composante réserve

Même si, depuis le début du XXème siècle, la proportion de l’active component n’a cessé de croître au sein de l’Army, la composante réserve n’en demeure pas moins cruciale par ses effectifs tout autant que par les capacités complémentaires apportées à l’active.

Les explications sont variées et les aspects culturels semblent être primordiaux pour expliquer l’importance de la composante réserve dans la culture militaire et civile US.

 

  • Importance numerique

Actuellement, la National Guard et la Reserve représentent respectivement 32% et 18% de l’Army, le reste étant représenté par l’Active.

Le tableau suivant présente une vue générale des différentes capacités apportées par les réserves US à l’Army. Les données sont de janvier 2012.

L’importance de la contribution de la composante réserve aux unités de l’armée de terre ainsi que la différence de cette contribution selon les spécialités sont mises en valeur dans le graphique ci-dessous.

 

  • La réalite des chiffres

Mais ces chiffres ne traduisent pas une réalité une peu plus compliquée. En effet, la composante réserve est en fait composée de trois groupes selon le degré de préparation et de disponibilité du personnel concerné:

 

  • La Ready Reserve

Ce groupe correspond aux effectifs immédiatement mobilisables pour une question de degré de préparation ou de législation. Il est lui-même subdivisé en trois groupes:

 

  • The Selected Reserve, composée de personnel considéré comme indispensable à la défense par leur qualification ou leur expérience. Il s’agit donc des membres des unités constituées de la Reserve ou de la Guard (Troop program Unit ou TPU) ou qui sont placés en situation d’activité (Active Guard Reserve ou AGR). Les Individual Mobilization Augmentees (IMA) sont des individus très qualifiés affectés, en cas de rappel, dans des postes considérés comme cruciaux au sein d’un état-major ou d’un organisme fédéral;
  • Le personnel de la Selected Reserve est bien entendu à jour de ses périodes d’instruction (deux semaines par an au minimum et un week-end par mois);
  • The Individual Ready Reserve et l’Inactive National Guard sont des catégories qui concernent le personnel de la Ready Reserve qui ne peut être classé dans la Selected Reserve, soit parce qu’ils n’est pas à jour au niveau périodes d’instruction, soit pour de multiples autres raisons, comme l’éloignement du centre de rattachement qui rend les délais de mobilisation incompatibles avec ceux de la Selected Reserve.

Il faut noter que ce sont la plupart du temps les effectifs de la Ready Reserve qui sont pris en compte dans les statistiques et les présentations. Ils représentent plus des 2/3 des effectifs de la réserve en général.

 

  • La Stand by Reserve

Le personnel concerné possède tous les sacrements pour appartenir à la Ready Reserve, mais, pour des raisons de santé, des raisons personnelles graves, ou encore pour des motifs professionnels (fonctionnaires aux responsabilités clés comme les juges fédéraux, membres du congrès ou étudiants), il ne peut pas être mobilisé sauf en cas de situation d’urgence dûment déclarée.

Son importance numérique n’est pas significative.

 

  • La Retired Reserve

Cette catégorie concerne le personnel qui a acquis le droit d’être réserviste (et qui en a fait la demande), après 20 années ou plus dans la réserve (Reserve et NG). Ce sont donc les retraités auxquels on associe les retraités de l’active. Et ce jusqu’à la trentième année de service. Le personnel concerné n’est pas assujetti aux entraînements et ne peut être mobilisé qu’en cas de guerre ou d’urgence nationale.

La Retired Reserve représente 1/3 des effectifs.

 

Le débat actuel

  • La réserve est une force opérationnelle

La bascule de la composante réserve d’une réserve stratégique – destinée à accroître les effectifs et le nombre d’unités – à une force opérationnelle a commencé il y a une trentaine d’années, mais les deux derniers conflits majeurs d’Irak et d’Afghanistan ont largement contribué à accélérer le mouvement. Personne, que ce soit dans les unités comme en haut lieu, ne nie cette évolution. Le chiffre de 860.000 réservistes projetés pour une mission dans ces deux pays est généralement avancé, ce qui représente selon les périodes entre 30 et 40% des postes sur le théâtre.

Les figures ci-dessous donnent une idée du taux de projection des réservistes par rapport à celui du personnel d’active.

En octobre 2008, un texte de base, le Department of Defense White Paper intitulé «Managing the Reserve components as an Operational Force» stipule que le ministère de la Défense doit s’adapter à un changement significatif de la manière dont est utilisée la composante réserve comme partie intégrante de la force: «The Department is faced with a significant change in how the Reserve components are being used as part of the total force. This change is not temporary; it is not business as usual. Rather, it reflects a fundamental shift from the past. As such, a new approach to management is needed – one that also reflects a new way of doing business for the future. Incremental changes at the margin will no longer be enough».

 

La composante réserve est donc une entité expérimentée, opérationnelle, employée, qui a montré son importance primordiale pour l’Army et à la défense US.

La fin des interventions extérieures et la nécessité de restrictions budgétaires drastiques font surgir de nouveaux défis. Après dix années d’engagement total aux côtés de l’active, le combat actuel des responsables de la réserve est double : il s’agit de ne pas faire les frais des inévitables dissolutions et remaniements provoquées par la contraction des budgets de la défense. Mais il s’agit aussi et surtout de conserver cet emploi opérationnel et de ne pas voir le retour d’une réserve peu employée et donc peu considérée.

 

  • Ne pas faire les frais des restrictions budgétaires

En effet, beaucoup de hauts responsables d’active voudraient bien voir la réserve encaisser le gros des coupes en personnel demandées par les restrictions budgétaires. Ils s’appuient sur le fait que la structure de la Reserve est issue de la guerre froide et qu’une division de réserve n’a plus beaucoup de sens aujourd’hui.

Ils s’appuient aussi plus particulièrement sur le fait que l’Army, voulant s’inscrire dans une logique d’emploi expéditionnaire, veut renforcer son aptitude à être projetée sur court préavis. Cette capacité requiert des unités immédiatement disponibles, donc appartenant au service actif.

 

Mais en cette période où chaque dollar est compté, la composante réserve a de sérieux arguments à opposer. Le principal d’entre eux est que les militaires à temps partiel représentent un moyen abordable pour conserver la capacité de réaction de l’armée.

Plusieurs études ont en effet montré que les troupes appartenant à la réserve sont moins chères à entretenir, non seulement quand elles sont en période d’entraînement, mais aussi quand elles sont mobilisées à temps plein, en partie parce que les retraites des réservistes sont plus maigres que celles du personnel d’active et que la réserve n’est pas assujettie au rythme des mutations des militaires d’active (une mutation tous les deux ans dans la plupart des cas).

C’est cette même logique financière qui est mise en avant par les défenseurs des brigades mixtes, c'est-à-dire des unités composées de personnel d’active et de réserve. De récentes études avancent le coût annuel d’un militaire d’active à $384.000, contre $123.000 pour un réserviste, ce qui fait que la composante réserve, qui représente 38% des effectifs du DoD consomme moins de 20% du budget. 10.000 transformations de poste de plein temps à temps partiel représentent donc $2.6 milliards d’économies[4].

 

Dans ce combat, la Reserve, et surtout la National Guard, peuvent compter sur un appui politique de poids, puisque la répartition géographique des unités implique en tout premier plan les élus du Congrès, prêts à défendre contre les décisions du Pentagone la vie économique et l’activité de leur circonscription[5]. Pourtant, selon les responsables financiers du Pentagone, les coupes dans la réserve, même si cette dernière a l’oreille du politique, seront nécessaires. L’argument avancé est l’équité et l’équilibre.

 

  • Vers une fusion de la composante reserve?

La Reserve et la National Guard sont donc des entités bien distinctes, créées à des moments distincts pour répondre à des besoins distincts. Aujourd’hui, après quinze ans d’opérations extérieures, les deux composantes fournissent un service que l’on pourrait qualifier d’équivalent avec des capacités identiques. Elles se retrouvent d’ailleurs souvent en situation de concurrence dans beaucoup de domaines.

Les programmes de recrutement sont complètements indépendants. En outre, les exemples ne manquent pas de situation où, à un moment donné, deux unités co-localisées, l’une appartenant à la Reserve et l’autre à l’ARNG, ont effectué la même mission, mais sans être capable de mutualiser ni l’équipement ni les installations ni les procédures d’état-major. De cette duplication naît une certaine forme de concurrence en ce qui concerne les financements, les équipements, le recrutement et l’attribution des missions.

Il y a donc un problème d’efficacité autant que d’économies à réaliser. Et l’argument a son poids en cette période de vaches maigres. 

 

Certaines réflexions avancent donc la solution de la fusion de la NG et de la Reserve.

 

Elle est en effet loin, l’inquiétude réelle – et fondée à l’époque – des dirigeants de l’armée d’active du début du XXème siècle sur le niveau de préparation opérationnelle des unités de la NG. Cette défiance avait conduit à renforcer l’importance de la réserve fédérale. Maintenant que la Guard a prouvé sa capacité à mener à bien toutes les missions, y compris des opérations de guerre à l’extérieur du pays, et maintenant que les lois fédérales traitant de la mobilisation de la composante réserve sont les mêmes pour la Reserve et la NG, les raisons de faire une distinction sont de plus en plus difficiles à trouver.

 

La différence première entre les deux entités réside dans la caractéristique de la mission, qu’elle soit unique pour la Reserve (mission fédérale), ou double pour la Guard (fédérale et étatique [state]).

Cette différence joue maintenant essentiellement sur la subordination, et les gouverneurs des États – via leur adjutant general – peuvent disposer sur le champ d’une troupe entraînée et équipée par les moyens fédéraux pour faire face à des catastrophes naturelles ou technologiques, actes de terrorisme compris.

L’intervention de la Reserve, elle, est dans ces cas là soumise à des conditions et procédures fédérales assez rigoureuses, voire restrictives.

Donc, fusionner les deux composantes et convertir toutes les unités concernées en unités dual purpose créerait des moyens supplémentaires de first response à la disposition du gouverneur et représenterait un atout considérable dans le cadre de la protection du citoyen et des biens sur le territoire national.

 

L’idée n’est pas tout à fait nouvelle. Une étude du Congrès en 1997 a établi que la fusion entraînerait une économie supérieure à $500 millions par an. Pour certains, il est temps de mettre cette idée à exécution. Le Pentagone n’a pas la main à ce niveau. C’est au Congrès de lancer le processus et de modifier la section 8 de l’article 1 de la constitution.

Mais sans attendre la modification de la constitution, le mouvement est déjà lancé. La preuve la plus flagrante est la Total Force Concept, concept initié par l’Army Total Force Policy, signé en septembre 2012. Ce dernier document fait suite à une directive du DoD éditée en octobre 2008 et met en place la politique d’intégration de la composante réserve dans la composante active de l’Army … sans distinction aucune entre la Reserve et la National Guard.

 

 

Les forces de réserve de l’Army, composées de la Reserve, fédérale aux ordres du président et de la National Guard, aux ordres des gouverneurs, sont passées en moins d’un quart de siècle, d’une mission exclusive de réserve stratégique à une force opérationnelle expérimentée reconnue qui veut conserver ce nouveau statut dans un environnement budgétaire contraint.

 

[1] Il ne sera question dans cette étude que de cette US National Guard.

[2] La National Guard n’existe que pour l’Army et l’Air Force.

[3] Revue des officiers de liaison aux États-Unis

[4] voir à ce sujet la brève de l’auteur dans le mensuel d’avril 2013.

[5] cf la brève de l’auteur dans le mensuel d’octobre 2013

 

Le Lieutenant-colonel Paul GUYOT a choisi l’arme du génie à sa sortie de Saint-Cyr en 1991. Il a servi durant la plus grande partie de sa carrière dans des unités de la Légion étrangère, 4ème RE, puis 6ème REG comme chef de section, commandant de compagnie, officier supérieur adjoint et officier traitant au bureau opérations instruction. Il a participé à de nombreuses opérations extérieures, FORPRONU puis FRR à Sarajevo en 1995, mission d’instruction au Cambodge puis en Afghanistan en 2004 (Enduring Freedom), Côte d’Ivoire en 2006, MINURSO au Sahara occidental en 2010. Il est diplômé de l’École d’état-major, et sert depuis trois ans comme officier de liaison à Fort Leonardwood auprès de l’école du génie de l’US Army.

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Titre : La composante réserve de l’US Army
Auteur(s) : le lieutenant-colonel Paul GUYOT
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