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L’année 1915

Cahiers de la pensée mili-Terre
Histoire & stratégie
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Comme le souligne lui-même l’auteur de cette rétrospective, l’année 1915 fut la plus terrible de la Grande Guerre. Paradoxalement, on l’évoque pourtant bien moins que les autres années du conflit, avec leur cortège des batailles de la Marne, de la Somme, de Verdun ou du Chemin des Dames… Le Général de Percin nous rappelle ce que fut 1915, marquée sur le plan tactique par l’enterrement en tranchées des belligérants malgré des actions d’éclat ponctuelles, et sur le plan stratégique par la mondialisation des engagements militaires.

 


«On marche sur les cadavres, on fait des parapets de cadavres sur lesquels on s’appuie, je les coudoie, je les foule aux pieds, je les touche sans la moindre impression pénible».

Cet extrait de lettre écrite par un fantassin illustre bien toute l’horreur de cette année 1915 qui fut la plus terrible des quatre années de guerre pour la France avec ses 370.000 morts.

 

Année de sang et de boue; les soldats s’enterrent, harcelés par les tirs de l’artillerie de tranchée adverse dont notre armée est encore dépourvue. Malgré cette souffrance, il faut tenir…

 

Tenir, c’est d’abord ce qui importe au commandant en chef, le Général Joffre; certes, il faudrait libérer Noyon tenue par les Allemands, mais aussi leur interdire de bombarder Compiègne à partir de leur artillerie lourde de Coucy-le-Château, ou encore Béthune qui n’est qu’à moins de 10 km des lignes allemandes.

 

Dix départements sont occupés par l’ennemi, dont l’un d’entre eux, les Ardennes, en totalité. Mais il faut surtout parer au plus pressé et tenir compte de l’épuisement des hommes et des difficultés matérielles.

L’industrie du Nord, qui représentait deux tiers de la sidérurgie, n’existe plus. Il faut recréer une industrie, fabriquer armes et munitions, retirer des rangs des combattants les ouvriers indispensables au fonctionnement des usines. Pour ce faire, le commandant en chef peut, certes, compter sur les ministres de la Guerre, mais il peut surtout compter sur l’efficacité de la commission présidée par le sénateur Freycinet, qui mérite qu’un hommage lui soit rendu.

 

Après la victoire de la Marne, l’exploitation n’a pas été possible. La course à la mer a mobilisé les énergies avec succès. Mais en ce début d’année 1915, la situation est difficile face à un adversaire dont l’industrie est intacte, et dont les succès remportés sur le front oriental le rendent plus menaçant en dépit des difficultés d’approvisionnement dues au blocus naval qu’il subit.

Les attaques des sous-marins allemands seront insuffisantes pour inverser cette situation, d’autant que le torpillage du paquebot Lusitania, qu’ils vont effectuer et à bord duquel se trouvaient de nombreux Américains ne va pas favoriser les intérêts de l’ennemi.

 

À l’est, nos alliés serbes s’effondrent sous les coups des puissances centrales, et les armées russes retraitent après une première attaque de gaz en Pologne. Cependant qu’au sud, Italiens et Austro-Hongrois piétinent dans les Alpes.

 

Plusieurs actions vont alors être conduites par l’état-major français. Leurs objectifs sont limités mais le plus souvent d’importance stratégique, comme la conquête de l’Hartmanvillerskopf, véritable balcon dominant la plaine d’Alsace, ou comme celle des Éparges, crête permettant le contrôle visuel de la plaine de la Woëvre, à l’est immédiat des côtes de Meuse.

Aux Éparges, les combats seront marqués par l’effroyable guerre de mines qui va se poursuivre à Vauquois et à la Haute-Chevauchée.

L’importance symbolique de certains lieux peut aussi justifier de telles actions, certes ponctuelles, mais coûteuses en hommes, tels les combats du Linge, haut lieu des Vosges devenu le tombeau des bataillons de chasseurs. Et puis, c’est sans compter sur l’agressivité de l’ennemi dans l’Argonne où les combats seront très durs pendant les six premiers mois de l’année 1915.

 

Certes pour l’Histoire, toutes ces batailles peuvent paraître secondaires si on les compare aux offensives d’Artois et de Champagne d’une toute autre ampleur. Mais écoutons un instant Maurice Genevois, soldat aux Éparges, dans l’assaut du 17 février 1915:

 « Ce que nous avons fait, c’est plus qu’on ne pouvait demander à des hommes et nous l’avons fait»…

Tout est dit.

Lors de la première bataille d’Artois conduite par le Général Foch, le 33ème corps et la division marocaine font preuve d’une spectaculaire énergie. Dans ses rangs, le 7ème régiment de tirailleurs algériens mérite d’être cité pour s’être emparé de la crête de Vimy le 9 mai 1915. L’un de ses bataillons s’était déjà illustré dans les Flandres en fin de l’année 14 avec les Fusiliers marins. Un monument rend un hommage mérité à la division marocaine; il a été érigé en face de celui élevé à la mémoire des Canadiens morts en Artois deux ans plus tard.

 

En couverture de cette bataille, une percée sera tentée en juin vers Tracy-Le-Mont et Moulin-sous-Touvent. Ce sera la bataille de Quennevières, au cours de laquelle s’illustrèrent les fantassins du régiment de Vannes, attaquant aux côtés des zouaves du 9ème régiment.

 

L’offensive de Champagne, d’une ampleur sans précédent et minutieusement préparée, ne va apporter que des succès très limités à cause de la combativité des soldats allemands, mais aussi parce que nous n’avions plus d’obus: la percée espérée sera à nouveau impossible.

 

En son début, la guerre paraissait essentiellement une guerre européenne, avec des adversaires habituels en quelque sorte. Son caractère mondial s’affirme de plus en plus en cette année 1915: les soldats australiens et néo-zélandais connaissent leur premier engagement dans la désastreuse opération des Dardanelles. Les Indiens, Sikhs et Gourkas en particulier, servent au sein de l’armée britannique. Les contingents d’ouvriers chinois sont présents sur le sol de France, au service de cette même armée.

Plus anecdotique, au loin, le Japon devient notre allié en s’emparant des possessions allemandes de Micronésie et de leurs comptoirs de Chine. Roumanie et Bulgarie, chacune dans un camp différent, s’apprêtent à entrer en guerre à leur tour. Les États-Unis s’interrogent encore, mais ils savent déjà que leur engagement sera inéluctable.

 

À la fin de 1915, les armées françaises et britanniques, après les durs combats qui ont jalonné toute l’année d’Ypres à Béthune et de la Picardie à la Lorraine, après les offensives coûteuses d’Artois et de Champagne, ont besoin de repos, et les munitions commencent à faire à nouveau défaut. Les armées russes ont été défaites et, après une retraite en ordre, elles doivent se réorganiser, ayant perdu la moitié de leurs effectifs combattants. L’armée serbe en déroute s’est repliée sur l’Adriatique; l’armée d’Orient est à Salonique.

 

L’analyse de cette situation tragique conduit alors les alliés, réunis à Chantilly, à rechercher une meilleure cohérence de leurs actions et à envisager de grandes offensives coordonnées et minutieusement préparées pour le printemps suivant.

Malheureusement, l’adversaire, sur la demande pressante de Falkenheim, a décidé de faire porter son effort principal sur le front ouest. Il devancera les alliés. Ce sera Verdun.

 

En dépit des souffrances endurées par les soldats, en dépit des innombrables morts et blessés, en dépit des malheurs au quotidien des populations civiles de l’arrière comme de celles des territoires occupés, tous ont tenu avec courage et abnégation, dans l’espoir de la victoire, pour la Patrie.

 

 

 

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Titre : L’année 1915
Auteur(s) : le Général d’armée de PERCIN de NORTHUMBERLAND
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Armée