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L'éclaireur n° 44 - janvier 2022
Salami tactics: faits accomplis and international expansion. In the shadow of major war
Richard.W. MAAS, Texas National Security Review.
10 novembre 2021
Le terme de « tactique du salami » décrit l’utilisation de faits accomplis répétitifs et limités d’un pays pour gagner en influence tout en évitant une escalade potentielle et donc, des représailles majeures. Alors que ce terme pourtant familier n’a jamais fait l’objet d’une conceptualisation approfondie, cet article analyse les stratégies dans des situations où la menace de représailles militaires a posteriori est peu susceptible de dissuader l’agression. Pour illustrer ce propos, l’auteur prend l’exemple des relations entre les États-Unis et la Chine et la Russie, qui sont devenues de plus en plus antagonistes comme en témoignent de récentes situations (pandémie de Covid-19, guerre commerciale, ingérence électorale). Pourtant, il est fort à parier que ces conflits d’intérêts ne déboucheront pas sur une guerre majeure. Au contraire, les universitaires mettent en garde contre une nouvelle guerre froide marquée par la guerre hybride et les conflits en zones grises. Ainsi, la dissuasion des tactiques du salami pose des défis stratégiques uniques à la politique étrangère américaine actuelle, qui devrait veiller à ce que la décision clé en matière d’escalade reste entre les mains des agresseurs potentiels plutôt que d’être imposée aux défenseurs par des faits accomplis.
The arctic cold war: Competition and deterrence at our northern doorstep
Brian EIFLER, War Room.
28 octobre 2021
Auparavant considéré comme un environnement inaccessible, l’Arctique est aujourd’hui un lieu de compétition et de contestation. Ce territoire est témoin du réchauffement climatique à vitesse accélérée : la fonte des glaces ouvre l’accès à des ressources naturelles (comme le pétrole et le gaz naturel) et à de nouvelles voies de navigation. Plusieurs puissances entrent alors dans une compétition pour les ressources, mais également une concurrence militaire. Avec la stratégie 2021 de l’armée de Terre Regaining Arctic Dominance, les États-Unis sont déterminés à rester compétitifs pour conserver leurs libertés d’accès à la région. Pour se faire, l’armée américaine doit transformer ses forces arctiques et y maintenir sa présence, afin de dissuader tout conflit dans la région. Par ailleurs, la Russie, qui revendique 70 % des fonds marins de l’Arctique, veut également étendre juridiquement son plateau continental avec une activité militaire accrue. La Chine se revendique être un « État proche de l’Arctique » pour étendre son initiative de route de la soie polaire.
Le milieu sous-terrain : sous-évalué et avenir du combat
Caroline FRICHE, Pôle Armées de l’Institut d’études de géopolitique appliquée.
27 octobre 2021.
Après avoir présenté les spécificités du milieu souterrain, la doctrine et les modes d’actions qui y sont appliqués et des exemples internationaux de ce type de combat, Caroline Friche explore les conditions d’une supériorité militaire dans ce milieu. L’accent est mis sur la préparation opérationnelle d’unités spécialisées que l’on trouve notamment au sein de l’arme du génie (combat en zone urbaine). L’hostilité du milieu souterrain rend sa connaissance primordiale et accroît le rôle du renseignement. Enfin, la progression des soldats est favorisée par la robotique, le développement des moyens de géolocalisation ou de communication dans un milieu dégradé. L’auteur invite à réévaluer l’importance du domaine souterrain dans les opérations militaires face à un risque de recrudescence de la conflictualité en zone urbaine.
Army expects fierce, close combat in next war despite advanced tech
Steve BEYNON, Military.com
28 octobre 2021.
La course aux innovations technologiques ne devrait pas sonner la fin des combats rapprochés et de haute intensité. Le lieutenant-général Ted Martin, commandant le Combined Arms Center de l’US Army, estime qu’il ne suffira pas « d’appuyer sur des boutons » pour gagner la guerre de demain. Cependant, celle-ci ne ressemblera pas aux guerres de contre-insurrection récentes car nos ennemis de demain disposeront de technologies avancées. Les États-Unis s’emploient malgré tout à conserver leur supériorité technologique. Mais la compétition reste intense et la capacité à gagner la guerre par ces seuls moyens incertaine.
In first, army soldiers fight with, and against, robotic vehicles in training
Andrew EVERSDEN, Breaking Defense
15 novembre 2021.
Au cours d’un entraînement de l’armée de Terre américaine, des soldats ont combattu contre une force adverse comportant des véhicules robotisés. Ces derniers ont rempli des missions telles que la reconnaissance d’itinéraires, l’interdiction de zones d’atterrissage ou le blocage d’une intersection clé. Lors de cet exercice inédit, un carrefour a par exemple pu être contrôlé par 5 soldats et 2 robots contre une section de 36 soldats plus exposés lors d’un exercice conventionnel. La nécessité pour ces robots d’émettre une faible signature thermique ayant été identifiée, ils ont été équipés d’un mode veille fonctionnant sur batteries. Des problèmes de réseaux dans la communication entre l’opérateur et le robot ont constitué un « facteur limitant » de l’efficacité au combat. De même, la signature sonore des drones a pu affecter la bonne réalisation de la mission. Ce type d’entraînements permet ainsi à l’US Army de s’adapter tant d’un point de vue technologique que doctrinal.
Saab’s deployable medical solutions provide frontline care
Norbert NEUMANN, Army Technology
19 novembre 2021.
L’industriel israélien Elbit a La société suédoise Saab s’est vue attribuer un contrat de 337 millions de dollars avec le ministère australien de la Défense pour la fourniture de modules de santé déployables (deployable health modules) et d’un programme de formation sur cinq ans dans le cadre du Joint Project 2060. Les modules sont interopérables avec les forces nordiques et celles de l’OTAN, et chacun d’entre eux est capable de fournir des capacités conjointes ou autonomes. Les solutions proposées offrent trois « rôles ». Le premier est une solution légère, transportable sur des palettes ou largable par les airs, qui dispose de toutes les fonctions d’un petit hôpital. Le second consiste en l’ajout au premier rôle de compétences complémentaires en fonction du souhait des armées (dentistes, vétérinaires, rayons X). Le dernier rôle possède les capacités et la technologie d’un hôpital hautement équipé, ce qui lui permet de réaliser des opérations chirurgicales complexes et spécialisées. Ces trois rôles peuvent opérer dans tous les domaines (terrestre, aérien, naval) et sont entièrement autonomes en énergie afin de pouvoir fonctionner en mode dégradé.
Mental health and psychological resiliency: preparing enablers for large scale combat operations
Arianna N. JOHNSON, From the Green Notebook
10 novembre 2021.
L’auteure part du constat suivant : bien que la force mentale soit inculquée aux combattants américains comme fondement de leur métier, les soldats occupant des postes de soutien manquent de « résistance mentale ». Ceux-ci, peu habitués au stress des combats sont, selon les études, plus vulnérables face aux syndromes de stress post-traumatiques. Or les futurs conflits multi-domaines impliqueront une plus grande intervention de ces forces, jusqu’alors moins exposées au stress opérationnel (notamment les militaires travaillant dans les champs immatériels). Pour répondre à ce défi, l’auteure propose la structuration d’une « résilience psychologique » chez ces combattants par quatre moyens. Le premier : maintenir une cohésion forte et sensibiliser à l’altérité pour repérer les soldats qui pourraient se sentir isolés. Le second axe est le développement de scénarios d’entraînement comprenant des privations et des contraintes physiologiques contrôlées. La troisième manière est, pour l’US Army, de dispenser un entraînement physique rigoureux, même aux soldats qui n’ont pas à combattre. Enfin, il est important que le commandement soit formé à la santé mentale pour contribuer à déstigmatiser le traitement psychologique, qui se heurte encore à la culture militaire.
Ai unveils scorpius electronic warfare system for multi-threat confrontations »
Seth FRANTZMAN, C4ISRNET/em>
12 novembre 2021.
Israel Aerospace Industries a dévoilé son nouveau système Scorpius. Cet équipement de guerre électronique est fondé sur une technologie de réseau à balayage électronique actif qui offre la capacité de détecter et de faire face simultanément aux menaces de longue portée. Le système est capable de cibler un large panel de menaces comme les drones, les navires, les missiles, les liaisons de communication, les radars à faible probabilité d'interception (LPOI). Scorpius a pour but de perturber le fonctionnement des systèmes électromagnétiques adverses, à savoir les capteurs radar et électroniques et les transferts de données. Avec sa capacité multifaisceaux, Scorpius peut analyser l'environnement alentour à la recherche de cibles et déployer des faisceaux orientés pour interférer contre les menaces au sein du spectre électromagnétique.
Robotic vehicles, drones coordinate recon at army’s project convergence 21
Andrew EVERSDEN, Breaking Defense
22 novembre 2021.
Sur le champ de bataille du futur, l’US Army prévoit d’utiliser simultanément plusieurs plates-formes autonomes comprenant les futurs véhicules terrestres ainsi que des drones de grande endurance afin de fournir une connaissance de la situation et entreprendre des missions comme l’identification de cibles, la reconnaissance et le ravitaillement. Ces équipements robotiques et leurs capacités conjointes de détection peuvent permettre de reconnaître une zone et signaler la menace aux fonctions de commandement et de conduite des opérations (C2). Les progrès dans les systèmes militaires autonomes concernent aussi les hélicoptères. En effet, l’US Army développe un système de réapprovisionnement pouvant être effectué sans appui humain, en utilisant des hélicoptères télécommandés comme un UH-60 Black Hawk ou des hélicoptères actuellement en projet : le Future Attack Reconnais-sance Aircraft et le Future Long-Range Assault Aircraft.
Divining the future of heavy vertical lift in the army
Barry ROSENBERG, Breaking Defense
19 novembre 2021.
L’US Army se concentre sur la question du transport de charges lourdes dans le cadre du programme Future Vertical Lift (FVL) qui englobe le Future Long Range Assault Aircraft (FLRAA) et le Future Attack Reconnaissance Aircraft (FARA). La réflexion actuelle sur le maintien de la pertinence du transport de charges lourdes dans les années à venir est la conséquence de la modernisation ciblée de la flotte de l’US Army et l’intégration d’une architecture de système ouvert modulaire pour les Boeing AH-64 Apache, les Sikorsky UH-60 Black Hawk et les Boeing CH-47 Chinook. En outre, l’US Army a utilisé sa grille d’analyse DOTMLPF (doctrine, organisation, formation, matériel, leadership, personnel, infrastructures) pour garantir que la modernisation de la flotte des aéronefs de l’US Army américaine soit en adéquation avec les opérations multi-domaines.
Partner capabilities enable medical supply delivery
Kimberly UNDERWOOD, AFCEA
10 novembre 2021.
Deux sociétés américaines, Near Earth Autonomy et L3 Harris Technologies, se sont associées dans le cadre d’un projet visant à concevoir un drone aérien capable de livrer de manière autonome du sang et du matériel médical à des médecins déployés à plusieurs centaines de kilomètres d’une base opérationnelle. L’utilisation de ce drone par l’US Army donnerait aux soldats américains les moyens de prodiguer les premiers soins à un combattant blessé lorsque son évacuation n’est pas possible. Elle permettrait également de résoudre le problème du transport retour pour les poches de sang non-utilisées qui doivent être réacheminées aux banques de sang.
Lack of future helo doesn’t stop army’s future vertical lift experiments in the desert
Andrew EVERSEN, AFCEA
10 novembre 2021.
Dans le cadre du Project Convergence 21, l’US Army a fait une démonstration de plusieurs nouveaux systems connectés et autonomes installés sur ses hélicoptères UH-60 Blackhawks et ses véhicules blindés. Un petit avion téléguidé alimenté grâce à l’énergie solaire a été présenté, un drone autonome conçu pour les opérations de reconnaissance déployable depuis l’hélicoptère, ainsi qu’un logiciel permettant de transmettre automatiquement les informations médicales des soldats blessés à l’hôpital militaires. Dans les conflits à venir, les hélicoptères de l’US Army ne seront pas seulement chargés de transporter les soldats et d’effectuer des tirs de couverture, mais également d’assurer la résilience du réseau et de déployer des drones dans le cadre de missions de renseignement, de surveillance et de reconnaissance.
Black Mirror. « TÊTE DE MÉTAL »
Saison 4, épisode 5.
Les auteurs utilisent l’épisode Metal-head de la saga Black Mirror pour nous faire réfléchir au rôle que les hommes accordent aux technologies. Cet épisode retrace une chasse à l’homme avec un élément particulier : les êtres humains sont traqués par des robots tueurs autonomes (autrement appelés des « chiens » dans l’épisode en raison de leur apparence). Alors que deux des personnages principaux meurent, piégés par ces robots lors d’une excursion, Bella, la seule survivante se retrouve livrée à elle-même. L’intelligence artificielle s’avère finalement meurtrière : c’est en créant cette technologie que l’humain a causé sa propre extinction. Doté d’une intelligence supérieure et sans émotion, les robots ont évolué en imitant le comportement humain avant de développer des capacités hors normes. La seule faiblesse du robot est sa batterie. La dernière survivante parviendra-t-elle à exploiter cette faille ?
L’Éclaireur est une lettre de veille en sources ouvertes, réalisée par les rédacteurs du pôle études et prospective du CDEC. Elle a pour objectif d’appuyer les travaux de prospective sur le combat aéroterrestre, conduits dans le cadre du Forum de la pensée mili-terre. Les brèves proposées constituent une synthèse des informations brutes ; il appartient au lecteur de les remettre dans leur contexte.