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La bataille de Khan Mayssaloun : une victoire militaire et politique

Soldats de France n° 17
Histoire & stratégie

Gallica
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Les liens historiques franco-libanais, issus des croisades, se renforcent en 1860 lors de l’intervention française dans les affrontements entre Maronites et Druzes. Dans le cadre des accords secrets Sykes-Picot signés en mai 1916, la France et la Grande-Bretagne se partagent une partie de l’Empire ottoman à la fin de la guerre. Ces zones d’influence sont entérinées en avril 1920 lors de la conférence de San Remo qui détermine alors les mandats. Entre 1919 et 1923, le général Henri Gouraud est le commandant en chef de l’armée du Levant et haut-commissaire de la France dans cette même région1. En 1920, se déroule la bataille de Khan Mayssaloun qui inscrit « une glorieuse page à l’histoire de la France2» . Toutefois, elle représente pour Fayçal, fils du chérif Hussein, et ses partisans « une mémoire combattante douloureuse3» faisant encore écho aujourd’hui.

 


Un contexte politique tendu

 

Le général Gouraud arrive à Beyrouth en novembre 1919, lorsque la France obtient l’évacuation des troupes britanniques présentes en zone « bleue » française (Liban actuel et Cilicie4). Cependant, les accords franco-britanniques de 1916 sont soumis à l’épreuve des nationalistes arabes qui s’organisent afin de « résister aux préparatifs français d’agressions 5». Le 8 mars 1920, le congrès de Damas proclame un « Royaume arabe de Syrie » avec pour roi Fayçal. Plusieurs accrochages ont alors lieu entre les troupes chérifiennes (du chérif Fayçal) et françaises. La faiblesse des moyens français, engagés en Cilicie (actuelle Turquie), ne peut permettre le déclenchement d’un second front face aux Chérifiens. Toutefois, suite à plusieurs manifestations d’hostilité, le général Gouraud estime que la guerre est « ouvertement annoncée et préparée à Damas et à Alep6 ». Ainsi, au mois de mai, la France décide d’envoyer les renforts nécessaires afin d’en finir avec le « problème » syrien, incompatible avec l'esprit du mandat7. Malgré des échanges diplomatiques prometteurs, Fayçal refuse les conditions émises par le général Gouraud dans la note du 22 juillet 19208 telles l’installation à Damas d’une mission française et le libre usage de la voie ferrée Rayak-el-Tequieh afin de faciliter le déplacement des troupes vers la Cilicie. Quant à Fayçal, ce dernier réclame la suspension de la marche de la colonne afin de rappeler ses détachements irréguliers et les bédouins envoyés vers la frontière.

 

Le général Mariano Goybet face à Youssef Al-Azmé : le déroulement de la bataille

 

Devant le refus de Fayçal, le général Gouraud ordonne à la colonne, la 3e Division de l’armée du Levant (3e DI) commandée par le général Goybet, de reprendre sa marche vers la capitale syrienne. La manœuvre française repose alors sur la constitution de trois groupements comprenant 10 bataillons d’infanterie, 6 escadrons de cavalerie, une compagnie du génie, plusieurs batteries d’artillerie (une de 155 mm court, quatre de 75 mm et de 2 batteries et demi de 65 mm), soit entre 12 000 et 14 000 soldats9. Deux sections de chars d’assaut (une seule est engagée) et une escadrille d’aviation participent au combat. Les troupes proviennent principalement du 415e RI, du 2e régiment de tirailleurs algériens, des 10e et 11e Régiments de Tirailleurs Sénégalais (RTS), des chasseurs d’Afrique et du 1er régiment de Spahis marocains10.

 

Dans la nuit du 23 au 24 juillet, les troupes chérifiennes commandées par le ministre de la guerre du gouvernement de Damas, Youssef Al-Azmé, s’organisent sur les hauteurs de Khan Mayssaloun. Elles comprennent « plusieurs milliers de soldats réguliers de toutes armes, encadrés par des officiers issus de l’école militaire de Constantinople11» dotés de mitrailleuses et de canons. En dehors de la résistance opposée par l’armée chérifienne, considérée par Goybet comme « sérieuse », il s’agit de franchir une zone montagneuse et aride. Cette opération présente donc de grandes difficultés liées à l’environnement et manque d’eau. Selon le général Goybet, Khan Mayssaloun et son point d’eau doivent être atteint, au plus tard, à la fin du 3e jour pour éviter à la division un échec cuisant.

L’effort français consiste dans l’attaque frontale et brutale de l’ennemi en utilisant les feux de l’artillerie pour appuyer la progression sur l’axe de la route de Damas. Cette manœuvre doit être complétée par une action visant constamment le débordement de l’aile gauche adverse (au Sud de la route). La colonne du centre (chars de combat, compagnie du 415e RI et ½ compagnie du Génie) s’élance à 6h30 de l’Oued el-Korn, protégée par les tirs d’artillerie. Une des batteries se retrouve exposée à un feu violent de 77 mm adverses mais ne subit que de faibles pertes. Vers 8 heures, une deuxième batterie de 75 mm renforce son action. La section de chars de combat franchit l’Oued el-Tequieh, suivie par l’infanterie et les sapeurs du Génie. Le bataillon est accueilli par le feu de la mousqueterie et les mitrailleuses de l’ennemi, postées sur les crêtes situées sur la rive droite de l’Oued el-Tequieh. La progression devient impossible. La demi-batterie prise sous un feu meurtrier est mise hors de combat en peu de temps. Les pertes de ce bataillon sont sévères : 115 soldats sont tués. Non sans difficulté, les troupes françaises avec l’appui des chars, finissent toutefois par s’emparer des positions ennemies. En effet, à partir de midi, l’avant-garde entame la poursuite des forces chérifiennes qui fuient en déroute vers Damas. Le ministre des troupes chérifiennes, Youssef Al-Azmé est tué lors de la bataille. Environ 60 chérifiens sont faits prisonniers et le matériel abandonné par ces derniers est récupéré par les troupes françaises (15 canons, dont 4 de 105, 50 mitrailleuses, ainsi qu’une grande quantité de munitions d’infanterie et d’artillerie).

 

Une 3e division victorieuse ?

 

Après cette victoire à Khan Mayssaloun, la marche vers Damas reprend sans rencontrer de résistance. À 16h30, le lieutenant-colonel Cousse, chef de la mission française à Damas, se présente au général Goybet pour l’informer de la fuite du gouvernement chérifien. L’entrée victorieuse des troupes françaises dans Damas a lieu à 16h45. Cependant, cette victoire est ombragée par des pertes humaines : 42 tués, 152 blessés et 14 disparus. Le général Gouraud adresse à Goybet et à ses troupes ses félicitations pour avoir « brisé la résistance de l’ennemi qui nous défiait depuis huit mois12 » . Cette victoire militaire ouvre alors les portes de Damas à la France et permet donc une victoire politique importante par l’installation du mandat français de 1920 à 1946.

 

 

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1 - Le Levant désigne traditionnellement les pays bordant la partie asiatique de la mer Méditerranée à savoir la Syrie, le Liban, la Palestine, Israël, la Jordanie, la Mésopotamie, l’Égypte et l’Anatolie. Toutefois, pour la France, le Levant se caractérise d’un point de vue géographique principalement par la Syrie et le Liban.

2 - Julie d’Andurain, « Effondrement du rêve d’un royaume arabe indépendant », Orient XXI, publié le 11 août 2017, lien URL : https://orientxxi.info/l-orient-dans-la-guerre-1914-1918/effondrement-du-reve-d-un-royaume-arabe-independant,1958, consulté le 30/06/2021.     

3 -  Ibid.

4 - Voir carte.

5 - Julie d’Andurain, « Effondrement du rêve d’un royaume arabe indépendant », op.cit.

6 - Général (CR) du Hays, Les armées françaises au Levant 1919-1939, Tome 2, Le temps des combats 1920-1921, p. 25.

7 - Ibid

8 - Antoine Hokayem, Les bouleversements de l’année 1920 au Proche-Orient : le sort des territoires ottomans occupés. Tome II. Le royaume de Faysal, la Cilicie, le Mandat « A », le Grand Liban et les États de Syrie, Documents diplomatiques français relatifs à l’histoire du Liban et de la Syrie à l’époque du mandat : 1914 – 1946, L’Harmattan, Paris, 2013, p. 513.

9 - L’indication des effectifs totaux n’est pas présente dans les archives du carton SHD GR 4H246 – 9 du Service historique de la défense (SHD). Il s’agit d’une estimation.

10 - Antoine Hokayem, Les bouleversements de l’année 1920…, op.cit., p. 530.

11 - Ibid., p. 173.

12 - Antoine Hokayem, Les bouleversements de l’année 1920 au Proche-Orient : le sort des territoires ottomans occupés. Tome II. Le royaume de Faysal, la Cilicie, le Mandat « A », le Grand Liban et les États de Syrie, op.cit., p. 175.

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Titre : La bataille de Khan Mayssaloun : une victoire militaire et politique
Auteur(s) : Margot Lefèvre (CDEC/CTGHM)
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