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Le rôle de l’armée de Terre dans la dissuasion conventionnelle de demain, la « guerre qui vient »

1/3 - BRENNUS 4.0
Histoire & stratégie
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L’article suivant est un document de libre opinion dont l’argumentaire et les conclusions n’en-gagent que son auteur.

 

Alors que la chute de l’URSS avait rendu la perspective d’un affrontement direct improbable entre deux puissances militaires majeures, près de trente ans après la fin de la Guerre froide, l’émergence et la réémergence de nations décidées à remettre en question l’ordre international interrogent sur la capacité de nos forces à mener un combat d’envergure.


Celles-ci ont, dans l’intervalle, évolué : l’absence d’un adversaire décidé à contester au monde occidental la maîtrise des espaces aériens ou maritimes[1], ou encore la seule suprématie technologique militaire, ont poussé nos dirigeants à ne considérer l’affrontement qu’à travers son prisme le plus répandu, encouragés en cela, il est vrai, par des politiques financières n’autorisant ni la prolifération de matériels lourds, ni le maintien d’effectifs importants.

 

Face à un adversaire dépourvu de forces aériennes ou maritimes, mais aussi d’éléments mécanisés ou blindés, la France s’est habituée aux conflits de basse intensité où l’artillerie, la cavalerie blindée et la masse d’infanterie ne sont plus aussi déterminantes qu’autrefois. Le seul déploiement de contingents limités, épaulés par des moyens aériens peu nombreux mais décisifs, s’avérait suffisant pour décider de la victoire. Cette guerre-là, alternant embuscades, raids commandos, déploiements éclairs de détachements réduits, légers et mobiles et frappes aériennes, la France sait la faire. Elle est même sans doute la seule puissance européenne capable d’obtenir des résultats aussi significatifs avec si peu de moyens ; une capacité que les Etats-Unis, entre autres, nous envient [2]. Pourtant, ces succès ponctuels, bien qu’impressionnants, dissimulent mal des lacunes croissantes.

 

Parce qu’elle n’en avait plus l’usage et parce qu’elle prétendait ne plus en avoir les moyens, la France s’est détournée de nombreux outils : les effectifs et la dotation en équipements de l’arme blindée et cavalerie (ABC) ont fondu comme neige au soleil, les systèmes antiaériens et les systèmes d’artillerie se font rares, nos capacités de transport aérien sont sévèrement compromises et les effectifs du ministère des Armées se réduisent comme peau de chagrin [3]. Face aux groupes armés non-étatiques (GANE) rencontrés en Afrique et au Levant, cet état de fait impose quelques restrictions d’ensemble mais n’est pas déterminant ; tout au plus réduit-il nos options stratégiques et tactiques. L’erreur serait néanmoins de considérer que nos forces n’ont, à l’avenir, aucune chance d’être confrontées à des adversaires autrement mieux équipés, et que la seule opposition militaire se limiterait à une infanterie légère, certes courageuse, mais peu organisée et faiblement équipée. Plus qu’à la guerre d’aujourd’hui, c’est à la guerre qui vient que l’armée de Terre doit se préparer, au risque d’être balayée par ceux qui, loin de nos frontières, n’auront pas fait les mêmes erreurs.

 

Forces en présence

Si l’effondrement du bloc de l’Est a, pour un temps, ouvert la voie à l’émergence d’un monde multipolaire – bien qu’en réalité dominé par l’unique superpuissance restante, les États-Unis d’Amérique [4] – la montée en puissance de la Chine et le retour sur la scène internationale d’une Russie dotée de moyens nouveaux, permettent de visualiser un retour à une bipolarité relative mais propice à l’affrontement. Ce nouvel ordre géopolitique émergeant semble porter en lui la promesse d’affrontements indirects, faisant à nouveau de la dissuasion conventionnelle un outil stratégique de premier plan [5] , en complément indispensable du feu nucléaire.

 

D’un côté se tiennent les puissances qui, dans le sillage américain, se satisfont de l’actuel ordre international. Elles bénéficient des structures de pouvoir actuelles à des degrés divers, mais auraient dans l’ensemble plus à perdre qu’à gagner d’un dépassement de l’hégémon de Washington par l’un ou plusieurs de ses rivaux. Ces puissances que nous qualifierons ici de « garantes » ne partagent qu’un nombre limité d’intérêts secondaires, et entretiennent, sur un certain nombre de sujets, des positions variables et parfois même opposées. Elles n’en restent pas moins unies, au degré suprême, par un désir de garantir l’ordre international dans sa forme actuelle.

 

De l’autre côté de cette ligne de crête s’organisent des puissances très diversifiées, non-seulement dans leurs buts, mais encore dans leurs caractéristiques et leurs capacités. Elles partagent néanmoins de façon décisive l’ambition de voir évoluer l’ordre international dans un sens qui favoriserait leurs propres intérêts [7]. Ces puissances « alternatives » défendent, plus ou moins directement, des projets politiques disparates dont la clé de voûte demeure la remise en question et le dépassement de l’hégémon des États-Unis.

Ces deux camps, organisés avec le temps en forteresses juridiques, économiques, politiques et matérielles, ne représentent pas l’ensemble de l’écosystème géopolitique international. Entre eux survivent une constellation d’acteurs de troisième rang, capables de naviguer, d’un évènement à l’autre, des « garants » aux « alternatifs » et vice versa. Incapable de faire amener le pavillon à son adversaire, chaque forteresse tourne ses regards vers cette myriade de puissances relatives et indécises : il s’agit, dans cet ensemble bigarré qu’est « l’entre-deux », de conquérir les capitaux qui sécuriseront la suprématie des « garants » ou, au contraire, structureront l’avènement des « alternatifs ».

 

La suprématie des uns, comme l’émergence des autres, ne repose aujourd’hui que sur l’accumulation de capitaux divers, à la fois économiques, politiques, démographiques et sociaux, dérivant par là même de sources au moins aussi diverses – économiques, succès diplomatiques et militaires, exploits politiques. La domination de « l’entre-deux » est intéressante en ce qu’elle permet, à la fois, l’exploitation de ressources et la diffusion d’un modèle sociopolitique et culturel – et donc d’une influence – renforçant d’autant la position du camp concerné. En ce sens, la rivalité géopolitique qui pouvait et peut toujours trouver dans l’affrontement militaire l’un de ses nombreux développements naturels, s’est superposée aux dynamiques libérales et capitalistes : deux monopoles internationaux s’affrontent ainsi pour l’accumulation de capitaux, ouvrant la voie au « triomphe suprême ». Ainsi, si les deux forteresses suscitées semblent à l’abri d’un assaut direct, l’Entre-Deux s’affirme comme un territoire propice à l’affrontement : l’ennemi des puissances « garantes » ne pourra qu’y intervenir plus fermement dans les années à venir, dans la perspective d’une montée en puissance autorisant, in fine, la confrontation directe de forteresse à forteresse.

 

Les Forces armées françaises sont aujourd’hui le bras armé de la France, l’une des principales puissances Garantes. Leur devoir principal est de se préparer à l’affrontement décisif de demain qui, au sein de « l’entre-deux », déterminera la capacité du pays à sauvegarder son rang au sein de sa famille géopolitique. Cela présuppose d’être en mesure d’identifier les signaux qui annonceront l’affrontement futur, mais aussi de disposer d’une force capable d’y faire face.

                                            

 

[1] MERCHET Jean-Dominique, Le général Lecointre veut ré-duire l’engagement de l’armée sur le sol étranger, l’Opinion, 09.10.2018.

[2] CHAPLEAU Philippe, La guerre expéditionnaire française au Mali vu par la Rand Corporation, Lignes de Défense, 21.10.2014.

[3] MERCHET, Jean-Dominique. « Les transformations de l'ar-mée française », Hérodote, vol. no 116, no. 1, 2005, pp. 63-81.

[4] VEDRINE, Hubert. « Que reste-t-il de l'hyperpuissance ? », Géoéconomie, vol. 66, no. 3, 2013, pp. 55-64.

[5] GOYA Michel, Mais où est donc passée la dissuasion con-ventionnelle ?, La Voie de l’Epée, 05/02/2018

[6] MVE ELLA, Léandre. « Le temps des humiliés. Pathologie des relations internationales, Bertrand Badie, Odile Jacob, 2014, 250 p. », Civitas Europa, vol. 34, no. 1, 2015, pp. 313-317.

[7] FOSSAERT, Robert. « Le système mondial, vu des

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Titre : Le rôle de l’armée de Terre dans la dissuasion conventionnelle de demain, la « guerre qui vient »
Auteur(s) : Monsieur Hugo Decis, de l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques
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