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LES QUALITÉS DU CHEF

L’exercice du commandement en opérations pour les chefs tactiques
Histoire & stratégie
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La complexité liée à l’environnement actuel des opérations nécessite pour le chef militaire tactique des qualités particulières. Outre les qualités foncières, liées à l’homme et à l’éthique, qu’il se doit de respecter et qui dépassent le cadre de cette étude, le chef en situation opérationnelle doit être capable de répondre à un certain nombre de critères. A l’aptitude au commandement entendue principalement comme la capacité naturelle à s’imposer aux autres, il convient d’ajouter un large éventail de qualités. Certaines, même si elles apparaissent plus ou moins innées, doivent être développées lors du passage en organisme de formation. Celles qui sont décrites ci-après s’avèrent cardinales. Elles ne sont pas pour autant exhaustives.

 


COURAGE, RESPONSABILITÉ  ET CONFIANCE EN SOI

Au courage  physique inhérent  au  métier militaire, il  convient d’ajouter pour le chef la clairvoyance, la solidité et la fermeté de ses convictions, qui peuvent parfois aller jusqu’à le conduire à s’écarter quelque  peu de la  lettre de sa mission pour mieux en respecter l’esprit.

En outre, si le  chef prend la  plupart  du temps ses décisions en s’appuyant sur les réflexions et les propositions de son état-major, il peut arriver que son intuition l’amène à prendre le contre-pied de celles-ci. C’est à l’évidence dans la solitude que s’exprime le courage du chef.

En tout état de cause, quelle que soit l’origine de la conception de son ordre, le chef, en l’exprimant, engage systématiquement sa propre responsabilité et non pas celle de son état-major. En l’occurrence, c’est ici que réside le vrai courage intellectuel.

Lorsque la situation est critique, et que tous les regards des subordonnés convergent vers le chef, il importe pour celui-ci, au milieu de sa solitude, qu’il puise en lui la force d’âme pour décider certes, mais surtout envers et contre tout se tenir à cette solution jusqu’à son aboutissement. Dans ces circonstances, le chef constitue toujours un exemple pour ses subordonnés.


ÊTRE DOUÉ D’INTUITION

Certes, existent  et sont mises en œuvre des méthodes de raisonnement en vue d’élaborer une décision opérationnelle ainsi que des instruments d’aide à la décision. Mais il ne s’agit là que de « boites à outils » au service de l’état-major, à son niveau.

En revanche, le chef doit conserver sa liberté de jugement pour décider, certainement en prenant en compte les propositions de son état-major, mais surtout en suivant l’inclination personnelle que lui donne son intuition. A ce titre, la légitimité reconnue de tout chef est fonction de la pertinence avérée de son intuition.

Qualité intrinsèque de la personnalité humaine et complément indissociable de la compétence, l’intuition ne se développe et ne s’entretient que par un lent travail continu de réflexion personnelle, et ce, avant même d’être investi de ses premières responsabilités à la tête d’une unité élémentaire. Ce travail préalable, qui accompagne toute la carrière, vise à emmagasiner puis appréhender un certain nombre d’exemples de situation permettant en temps de crise de réagir très vite et d’éviter des erreurs déjà commises.

Le général Beaufre qui a longtemps fait partie du premier cercle de l’entourage du général de Lattre décrit dans un article de la RMI la méthode toute personnelle et toute d’intuition qu’avait de

Lattre pour appréhender les affaires. Il est à noter que Juin, longtemps présenté comme l’anti de Lattre par excellence « fonctionnait » d’une manière analogue.

« En présence d’un problème,  le  général  de Lattre, loin  de viser une solution théorique d’ensemble, commence par explorer le possible. Il fait cela comme tout, avec passion. D’abord, il s’informe scrupuleusement, surtout pas par des dossiers évidemment, mais par des conversations, des discussions avec ceux qui peuvent savoir. Son souci, c’est l’information directe, « sur le tas ». Ce faisant, il ouvre toutes grandes les antennes radio de son intuition, il écoute, il cherche, il tâtonne car, sous des dehors superbes, cet homme est modeste et doute de son jugement jusqu’à ce qu’une révélation intérieure lui ait indiqué la voie.

Après cette phase d’exploration  du possible,  commence la  phase d’élaboration. Là, sa méthode est vraiment personnelle : cette élaboration, il l’a préparée par un choix attentif des hommes qui l’entourent. C’est avec eux, collectivement, qu’il va peu à peu mûrir sa décision. »

Gal BEAUFRE

Le général de Lattre, Revue militaire d’information 1962/2.

 

CAPACITÉÀ GAGNER LA CONFIANCE

 

Le chef doit s’attacher à instaurer et entretenir un climat de confiance et de compréhension mutuels, tant vis-à-vis de ses subordonnés, que de ses supérieurs, ses voisins et alliés ainsi que ses partenaires non militaires.

Des  subordonnés

De la  même façon, il convient de créer, gagner  et entretenir un climat de confiance envers les subordonnés. Elle repose sur la certitude que ceux-ci ont parfaitement saisie et intégrée l’esprit de la mission, qu’ils se sont ralliés à son bien-fondé et qu’ils sont convaincus d’avoir toute latitude pour choisir les modalités de son exécution.  C’est  pourquoi  la  notion  de contrôle,  induite  par  le « backbrief »  anglo-saxon,  est  primordiale,  et  ne  doit  pas être considérée  comme un signe de défiance, mais bien au contraire comme une étape légitime et incontournable du processus itératif d’élaboration des ordres.

L'exemple du général Duchêne, relevé du commandement de la 6e armée après la déroute du 27 mai 1918 sur le Chemin des Dames, constitue, du fait des conséquences de son mauvais caractère sur son entourage immédiat,  l’exemple type du chef qui inhibe son état-major par le manque total de confiance que celui-ci ressent à son égard.

« Le fonds commun des reproches que l’on faisait au général Duchêne portait sur son fâcheux caractère. Une humeur de dogue, un grondement perpétuel,  un orage de rebuffades, tout de suite les  gros mots à la bouche, sans raison. L’aborder devenait pour ses officiers un supplice auquel ils ne se risquaient qu’à la dernière extrémité. Son chef d’état- major, obligé de subir ses sursauts de colère le boudait pendant plusieurs jours quand il avait vraiment dépassé la mesure. On croira difficilement de telles choses, mais il parait qu’à la lettre, c’était incroyable. L’officier qui m’a renseigné me dépeignait les mornes repas à la table du général : lui renfrogné et grondeur, le chef d’état-major, un coude sur la table, tournant ostensiblement  le  dos à son général  et n’ouvrant jamais la bouche, le  reste de l’entourage,  terrifié.  Dans les  bureaux, même désarroi. Un officier s’approche d’un chef de service : mon colonel, que fait-on pour cette affaire ? Ce qu’on fait ? Je m’en fous ! Allez le demander au général ! J’ai voulu le savoir ce matin, il m’a dit que je l’emm... Pour sûr, je n’y retournerai pas.

 Le résultat ? Un état-major aigri, toujours en bisbille, n’osant prendre ses responsabilités. Ces hommes, dont la plupart étaient de valeur, découragés, n’ayant plus le goût à un travail dont l’effort risquait de ne pas être  récompensé, toujours tremblants  à l’idée  d’une algarade brutale, tombant sur eux comme une vétille. Et, pour les rares moments où ce chef irascible consentait à se modérer, une facilité de compréhension, un don de clarté, un talent enfin, qui s’accordaient si bien avec sa magnifique prestance et son beau visage mâle et fier de soldat.»

Cité par Pierrefeu

GQ.G Secteur 1. (Paris 1920. Edition française illustrée. Tome 2. Page 170)

 

Des supérieurs

L’application efficace d’un style de commandement par objectif repose sur la compréhension mutuelle  et la confiance. Vis-à-vis de  l’échelon  supérieur, il  s’agit  de  lui montrer que  l’on  a parfaitement compris son intention, c’est-à-dire  l’esprit de la mission, et que l’on y adhère. Des relations que l’on entretiendra avec les  échelons supérieurs, dépendra directement  la marge d’initiative dont on bénéficiera.

Le général de Langle de Cary, commandant la 4e armée en 1914, toujours d’une parfaite loyauté envers Joffre, n’en critique pas moins dans ses carnets  publiés  post mortem l’absence  de concertation et la centralisation excessive que ce dernier manifestait à l’égard de ses commandants d’armée par manque de confiance. Foch et Castelnau, les futurs commandants de groupe d’armées ont ouvertement  et officiellement, à leur niveau, présenté les mêmes doléances.

« Le plan d’opérations est l’œuvre entière du général Joffre et de son Etat-major. Il n’a pas été soumis à l’examen et à l’appréciation du conseil supérieur de la Guerre. La plupart des commandants d’armée – moi entre autres – nous ne connaissions que la zone de concentration de nos armées. Nous ne savions rien des intentions du général en chef. C’est sa méthode d’agir avec le seul concours de son entourage intime, sans consulter  ses commandants d’Armées, sans même les  mettre  au courant, autrement que par les  instructions et les  ordres qu’il leur envoie. Je ne critique pas, mais je crois préférable la méthode qui est fondée sur la collaboration et la confiance. Elle ne diminue en rien l’autorité du chef suprême auquel seul appartient la décision.»

Général de Langle de Cary

Souvenirs de commandement. (Paris 1935. Payot. Page 171)

 

Des voisins et des alliés

Les relations qu’un chef entretient avec ses voisins pour l’accomplissement de ses missions, prennent un relief tout particulier dans un contexte multinational. Compte tenu des différentes langues, cultures et doctrines militaires, il est hautement souhaitable de savoir exactement dans quel esprit le voisin concerné compte accomplir la mission qu’il a reçue et inversement.

Le  23 août 1914, bien qu’il en désapprouve à la fois le principe et l’opportunité, Lanrezac, commandant la 5e  armée, attaque l’armée  de  Bülow,  à  hauteur  de  la  Sambre  de Charleroi, conformément  aux ordres  de Joffre.  C’est l’échec  le  jour  même. Placé  dans un  rapport  de  force  défavorable  et  percevant  très nettement  la menace d’enroulement  de son dispositif  par l’armée von Klück, Lanrezac décide la retraite immédiate. Il en rend compte au GQG. qui approuve, conscient que ce repli de l’aile gauche va entraîner celui de la totalité de l’armée française. Mais, ce faisant, Lanrezac a omis de prévenir French, commandant la B.E.F. L’armée britannique, déployée à la gauche de la 5e armée, se trouve donc découverte par ce repli. Le 24 août, elle est vivement attaquée par von Klück et défaite à Mons. French dont les relations avec Lanrezac étaient très fraiches depuis le début de la campagne a mis cet échec sur le  fait du repli de la 5e armée qu’il  ignorait. Il faudra toute l’habileté tactique du général Sordet, commandant le corps de cavalerie, pour permettre à French de rompre temporairement le  contact et se replier. Désormais, échaudé par l’attitude de son voisin de droite, French prendra systématiquement 24 heures d’avance sur  lui  dans sa manœuvre de retraite. Cette mésentente aboutissant à un défaut de liaison entre les deux armées de l’aile gauche alliée sera l’une des causes de la brutale relève de Lanrezac du commandement de la 5e armée le 3 septembre, Joffre ayant besoin d’une aile gauche soudée pour conduire ce qui deviendra la bataille de la Marne.

 

Des acteurs non-militaires

Nouer et entretenir des relations soutenues avec les autres acteurs présents sur le théâtre d’opérations est indispensable, dans la mesure où le  processus  de règlement  des crises est aujourd’hui devenu global, et dans tous les cas, échappe au contrôle du seul militaire. Pour autant, il convient de placer ce type de relation sous le signe du partenariat, et surtout de ne rien imposer. Le « leadership » réel et officialisé dans la gestion globale des crises reste aujourd’hui une question non résolue, et donc, l’efficacité de l’action commune repose en grande partie sur la qualité des relations entretenues.

 

SENS DE L’INTÉRÊT GÉNÉRAL

Cette qualité est à considérer dans sa pleine acception sous son double aspect intellectuel et moral. Elle engage le chef aussi bien vis-à-vis de ses subordonnés que de ses supérieurs

  • au niveau intellectuel, en vue de préserver l’esprit de la mission, le chef doit très rapidement s’approprier l’action en cours, mais également inscrire la sienne dans la continuité de son prédécesseur afin de respecter la cohérence dans la durée.  Cette attitude  bannit  toute  recherche  de  « coup médiatique », fugace et éphémère par essence, et toujours contre-productif  à moyen et long terme ;
  • au niveau moral, se rapprochant du sens commun, il s’agit de l’honnêteté foncière qui consiste à servir l’institution et non pas se servir de ses prébendes

En 1808, pour  des raisons  autant  politiques  que dynastiques, Napoléon décide de déposer le roi d’Espagne, ce qui donne lieu au déploiement d’un corps expéditionnaire pour « accompagner» l’opération. Mais, alors que la population espagnole était déjà fort remontée contre la présence française, les généraux, notamment Junot, s’y conduisent en pays conquis, pillant,  saccageant et s’accaparant tout ce qu’ils  pouvaient, notamment  les richesses  des établissements  religieux. Ce faisant, Napoléon s’est rapidement trouvé confronté à une véritable guérilla, soutenue et entretenue par Londres, guérilla  qu’il n’est jamais parvenu à réduire, à l’exception notable de l’action de pacification entreprise  par Suchet en Aragon. S’il est vrai que la campagne d’Espagne a pu être considérée comme le tombeau de la grande Armée, c’est au comportement  de reîtres prédateurs de ses généraux que le doit Napoléon.

  • autant une ambition fondée sur des qualités réelles et reconnues demeure légitime, autant l’arrivisme même sans être forcené relève du condamnable.

 

PERSUASION ET CRÉDIBILITÉ

Déjà perceptible à une époque où les armées étaient nationales et basées sur la conscription, l’impératif de persuader son subordonné est encore plus manifeste dans le contexte actuel de coalition. Il est illusoire de vouloir s’affranchir des susceptibilités liées à la préservation des intérêts nationaux respectifs par le biais d’une seule discipline formelle fondée sur la diffusion d’ordres. Pour être reconnu,  le  chef devra  s’assurer que le  subordonné/« partenaire coalisé » voudra bien considérer l’ordre reçu comme parfaitement légitime. C’est pourquoi le commandement multinational recourra toujours à la persuasion grâce une conviction profonde que le chef saura faire partager.

On prête à Foch, l’aphorisme en fait de Sarrail,  cité supra. Il n’en demeure pas moins que Foch, en tant que commandant suprême inter  allié en 1918 a toujours prôné la persuasion comme  méthode  unique  de commandement,  ce qui,  il est  vrai, cadrait difficilement avec son caractère !

 

« Le commandement unique, surtout quand il doit s’exercer sur des chefs d’une autre nation, d’une autre race, ne peut pas s’imposer par un décret. Le seul qui l’impose, c’est l’homme chargé de l’exercer agissant, par son ascendant, sur ceux avec qui il doit collaborer  (…) Mon idée revient en somme à ceci : quand le commandement s’exerce sur des armées alliées, des ordres secs, impératifs, catégoriques ne produiraient  aucun résultat. Il faut que celui qui les donne sache les faire accepter pleinement par celui à qui il s’adresse, qu’il obtienne sa confiance, son adhésion. Il n’existe pas pour lui d’autre manière de commander (…). Quand les armées se battent ensemble, il est absolument impossible de réaliser l’unité de commandement autrement que par cette influence morale. En d’autres termes, ce n’est pas la contrainte qui agit, mais uniquement la persuasion.

A quoi sert-il en effet  de donner des ordres  lorsque  pour toutes sortes de raisons matérielles  et morales,  ils ne peuvent pas être exécutés  ? Il  faut  prendre  les  hommes,  surtout  les  étrangers, comme ils sont et non pas comme nous voudrions qu’ils fussent.»

In Recouly

Le mémorial de Foch. (Paris 1929. Les éditions de France. Pages 15 à 24)

 

Au-delà de cette capacité à persuader, la crédibilité du chef doit être préservée par un juste équilibre entre le formalisme du grade détenu et la compétence reconnue. Ce caractère hiérarchiquement formel est accentué dans un cadre multinational notamment au sein de l’OTAN, où le poids relatif d’une nation est directement lié au grade de son représentant le plus élevé.

 

DISCERNEMENT

Si tant il est vrai que le discernement est une disposition individuelle de l’esprit à juger clairement et sainement des choses, le chef se doit d’abord de conserver ses propres capacités de réflexion, d’analyse et de jugement, aussi entières que possibles.  Il reste lucide,  ne se laisse pas gagner par le surmenage, filtre la quantité d’information dont il a besoin, délègue à bon escient, préserve sa forme physique et morale.

Il ne tombe pas dans le piège de la focalisation, conserve en permanence le nécessaire recul par rapport à l’événement immédiat. Là se trouve la deuxième expression du discernement : un vrai chef ne se conforme pas par principe aux opinions des autres. Il conserve et affiche souplement sa libre capacité de jugement, quitte à s’opposer initialement à l’opinion commune ou majoritaire, et ce parce qu’il dispose d’éléments d’appréciation objectifs qui lui sont propres. Le discernement s’accorde en ce cas avec la capacité à convaincre. Bien sûr, cette disposition d’esprit ne doit être confondue ni avec l’obstination ni avec l’isolement intellectuel.

C'est ainsi, qu’ayant lancé la 2e D.I.M. à l’assaut du mont Majo depuis le Garigliano le 13 mai 1944, sans préparation d’artillerie pour ménager l’effet de surprise, et ayant constaté

l’échec de l’attaque, Juin relancera l’attaque le lendemain après une puissante préparation d’artillerie, après avoir pris l’avis de tous les commandants de bataillon concernés qui, tous, s’étaient exprimés en ce sens. Ce fut le succès.

 

En 1917, ayant conçu une nouvelle offensive qui devait avoir lieu sur le chemin des Dames entre Soissons et Reims, le général Nivelle a refusé d’admettre que le retrait allemand du saillant de Péronne vers la Ligne Hindenburg, risquait de remettre en cause les effets qui en étaient attendus. Lorsque les premiers comptes rendus de Franchet d’Espèrey lui sont parvenus, il se serait même exclamé :

« ce mouvement de repli est impossible !

Franchet d’Espèrey se trompe ».

 

SÉRÉNITÉ

En complément de ces qualités, et dans les situations de tension, le  chef doit s’efforcer de « tranquilliser » son entourage et ses subordonnés. Ceux-ci peuvent alors donner le meilleur  d’eux- mêmes sans subir la pression provoquée par la situation opérationnelle, voire par les échelons supérieurs. Autant absorbeur d’angoisse que diffuseur de sérénité, il doit donc contribuer à réduire le stress ambiant et restituer dans la mesure du possible une attitude calme, sereine et apaisée. Non seulement il se protège lui-même  et conserve le  discernement évoqué ci- dessus, mais il se rend crédible vis-à-vis de ses interlocuteurs et donne de la force à ses décisions.

L'équilibre des systèmes de commandement n’est que second par  rapport à l’équilibre  et à la sérénité  que le  chef doit dégager dans un « agenda » surchargé, de manière à éviter la surchauffe. Dans son style, le général Juin y était tout à fait parvenu lorsqu’il commandait le CEFI en 1943/44.

 

« Pendant tout le mois d’avril (1944), à son PC de Santa Arunca, sous les tentes et dans les roulottes, l’état-major du général Juin travaille dans une ambiance calme et détendue. Dès 7 heures du matin, un rapport réunit les chefs de bureau autour du « Patron », puis chacun s’affaire de son côté. Juin appelle tel ou tel dans sa roulotte pour lui demander un renseignement. Le commandant Pedron, du 3e  bureau, y entre plus souvent que les  autres, il a un rôle  privilégié,  travaillant  depuis longtemps pour le Général.

Il le comprend à demi-mot et sait mieux que tout autre, interpréter sa pensée et la traduire par écrit. A la popote, l’humeur est joyeuse, les camarades, officiers de liaison des différentes grandes unités sont très entourés. Le soir, après le  dîner, Juin organise un bridge, c’est sa détente. Il a donné comme consigne permanente : « Si rien de grave ne se produit, que l’on me laisse dormir.»

Colonel Pujo

Juin, maréchal de France. (Paris 1988. Albin Michel. Page 187)

 

En fonction de la situation à laquelle il est confronté, du contexte et de l’environnement dans lesquels il agit, et de sa personnalité propre, le chef mettra en exergue à tel ou tel moment tout ou partie de ces qualités. Mais, celles-ci doivent constituer le « fond de sac » du caractère du chef, indépendamment de la phase de la manœuvre considérée et du mode de commandement choisi.

Pour cela le caractère étant déterminé et non pas prédestiné, il importe que la formation morale et intellectuelle des futurs chefs mette l’accent sur ces qualités depuis la formation initiale jusqu’à l’enseignement militaire supérieur.


 


 

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Titre : LES QUALITÉS DU CHEF
Auteur(s) : RFT 3.2 Tome 2 (FT-05)
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Armée