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Méthodes d’amélioration de la performance au sein des armées

cahier de la pensée mili-Terre
Défense & management
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Les méthodes d’amélioration de la performance des armées peuvent être inspirées de celles des activités civiles dans le domaine fonctionnel, mais pas dans le domaine opérationnel.


La loi organique de loi de finances (LOLF), mise en application en 2006, a modernisé la gestion des finances publiques pour passer d’une logique de moyens à une logique de résultats. De ce fait, l’attribution des moyens pour l’année suivante est maintenant subordonnée à la performance évaluée l’année précédente. Les indicateurs de performance étant établis et suivis, quelles méthodes pourraient être mise en œuvre pour garantir l’amélioration de cette performance au sein des armées?

La performance peut être définie comme l’adéquation entre l’objectif et les ressources, les résultats et l’objectif, et les ressources et les résultats; c'est-à-dire la combinaison entre pertinence, efficacité et efficience. Dans ce cadre, la recherche de l’amélioration de la performance est très développée dans les entreprises civiles car elle conditionne leur survie économique par leur rentabilité. Ce contexte a conduit à développer des méthodes éprouvées d’amélioration de la performance. Dans les armées, c'est-à-dire pour les organismes placés sous les ordres du chef d’état-major des armées (CEMA), la rentabilité économique n’occupe pas la même place (centrale) que dans le monde de l’entreprise. Pourtant, des indicateurs de performances sont définis et recouvrent les domaines opérationnels et les domaines fonctionnels des armées. Les méthodes civiles d’amélioration pourraient-elles alors s’appliquer dans l’institution militaire?

Tout en la distinguant de la performance opérationnelle, la mesure de la performance fonctionnelle des armées est analogue à celles des activités civiles, et les méthodes d’amélioration civiles peuvent donc être utilisées pour optimiser la performance de la fonction organique des armées.

Par ailleurs, la différenciation entre la performance opérationnelle et la performance fonctionnelle doit d’abord être présentée, puis des méthodes d’amélioration de la performance dans le milieu civil seront exposées, ce qui permettra enfin de discuter de l’application de ces méthodes dans le domaine fonctionnel des armées.

 

 

Quelles performances mesurer dans les armées?

En 2008, la révision générale des politiques publiques, conjointement à la parution du Livre blanc de la défense et la sécurité nationale, induit une réforme de grande ampleur au sein du ministère de la Défense. Le domaine organique (ou fonctionnel), dont les moyens sont regroupés dans l’administration et les soutiens communs (AGSC), a été réorganisé hors du domaine opérationnel, même si l’EMA garde la cohérence d’ensemble en étant la tête de chaîne à la fois opérationnelle et organique. Cette séparation organique/opérationnel au niveau tactique s’est traduite par la création des bases de défense (BdD). Elle permet de différencier la performance du domaine opérationnel de celle du domaine fonctionnel.

En effet, d’une part, l’engagement opérationnel, raison d’être des armées, reste une spécificité militaire. Dans un contexte opérationnel, la mission donnée par le chef hiérarchique est «sacrée» et le chef qui l’a reçue doit la remplir avec les moyens mis à sa disposition ainsi qu’avec les renforcements disponibles éventuels qu’il aura demandés. La performance est ici mesurée par l’effet sur l’ennemi ou sur le terrain, par la capacité d’adaptation à la situation, et aussi par la préservation des moyens humains et des matériels engagés. Des variables d’environnement (politique, population) éloignent encore cette mesure de celle des entreprises civiles. En termes logistique par exemple, une évacuation sanitaire stratégique n’est pas déclenchée quand l’avion est rempli, ce qui réduirait les coûts de transport, mais en fonction de l’urgence médicale considérée. L’efficience est alors négligeable devant la pertinence dans cette situation.

D’autre part, le personnel du domaine fonctionnel, l’AGSC, n’a pas la même urgence à traiter en BdD. Lorsqu’il n’est pas projeté en mission opérationnelle, ce personnel travaille dans un environnement dans lequel il existe une relation client-fournisseur similaire à celle du milieu civil, matérialisée par un contrat. Le responsable qui passe un contrat avec son fournisseur attend alors une performance quantifiable par le résultat en fonction de la définition précise du besoin. Cette relation, banalisée dans le milieu civil, est néanmoins encore difficile à mettre en place dans les armées parce qu’elle n’est pas fondée sur les rapports hiérarchiques traditionnels. Pour améliorer la performance fonctionnelle, les méthodes éprouvées dans le milieu civil peuvent donc être exploitées.

 

Dans le milieu civil, la performance est définie par la réactivité, l’efficacité et l’efficience, comme le montre la figure ci-contre. Elles forment les côtés d’un triangle dont les sommets sont la qualité (but: garantir un taux de service élevé au client), le délai (but: réduire les temps d’attente pour le client) et le coût (but: diminuer le coût de revient). Les méthodes d’optimisation de la performance utilisent deux concepts: améliorer globalement l’ensemble du triangle et s’attaquer aux sommets l’un après l’autre.

L’amélioration globale d’une organisation, en jouant à la fois sur le coût, les délais et la qualité, est souvent obtenue en améliorant les structures organisationnelles. Typiquement, le redéploiement d’une activité est décidé au niveau stratégique de l’organisation considérée. Elle implique une lourde logistique de mise en œuvre et des coûts associés, pour fermer une implantation par exemple. Mais l’entité peut aussi se réorganiser en interne en regroupant des fonctions. Cependant, de plus en plus d’entreprises créent des départements «supply chain». Ils regroupent généralement les fonctions planification, approvisionnement, logistique, distribution et service après-vente, mais peuvent aussi englober la recherche et développement, les achats, les ventes, la qualité, etc. Ils permettent de piloter la chaîne logistique à partir du fournisseur jusqu’au client du client. Cette vision globale autorise la réalisation des gains globaux importants et augmente la performance.

Alors que l’amélioration globale est une rupture brutale, l’amélioration locale est continue. Il s’agit d’impliquer tous les acteurs d’un processus pour améliorer petit à petit et à faible coût le processus. Les actions à mener sont alors priorisées en fonction du gain qui en sera retiré. Philosophie japonaise inventée par Toyota à la fin de la deuxième guerre mondiale, cette méthode repose à la fois sur des actions de bon sens et sur une implication importante des managers. Théorisée par des universitaires américains et appelé «Lean», elle a d’abord été utilisée pour la production dans l’industrie, en particulier automobile, avant d’être généralisée aux autres départements d’une entreprise, y compris la partie recherche et développement (Lean processing) ou la partie administrative (Lean Office). La méthode d’amélioration continue du Lean est définie comme suit:

 

 

Cette méthode est basée sur l’affirmation suivante: «on ne peut améliorer que ce que l’on peut mesurer». C’est pourquoi des outils visuels et statistiques lui sont associés pour mener à bien les chantiers d’amélioration continue. Leur description détaillée n’est pas l’objet de cet article.

 

Applications possibles pour l’amélioration de la performance fonctionnelle des armées

Avec la LOLF, les projets et les rapports annuels de performance définissent des indicateurs qui sont suivis par le ministère de la Défense pour ses missions et ses programmes. Au sein des armées, les cellules pilotage des différents échelons renseignent ces indicateurs. La performance est évaluée par des contrôleurs de gestion. Schématiquement, les inspections d’armées ou de services ont des compétences dans les domaines opérationnels alors que le contrôle général exerce les siennes dans les domaines organiques. Le but de cet article n’est pas de les décrire, pourtant force est de constater que cette organisation s’axe sur le contrôle et le curatif et peu sur le préventif. Les bonnes pratiques constatées ont du mal à être exportées au profit de tous. La mesure est faite, mais l’amélioration peut être amplifiée. Dans le domaine fonctionnel, des méthodes d’amélioration de la performance des entreprises civiles peuvent être utilisées par similitude.

Les améliorations globales, comme la transformation des structures, ont été mises en œuvre plusieurs fois dans les armées, en particulier après les deux derniers livres blancs de 1995 et 2008. Si ces réformes représentent une consolidation de la performance, leurs gains sont difficilement mesurables sur le long terme. En effet, l’affermissement de la performance attendue doit être comparé au gain effectif mesuré sur le long terme. Les résultats, contrôlés, seront ensuite stabilisés pour pérenniser les gains. C’est la phase de standardisation de la méthode DMAICS présentée plus haut. Le rythme de succession des réformes structurelles et la nécessité politique d’avoir des gains rapides ne permettent pas cette stabilisation. Le cas récent le plus flagrant est celui des BdD dont le déploiement devait initialement être terminé en 2014, et qui a été avancé pour fin 2011. Si la pérennisation à long terme est difficile, il faut alors mettre l’accent sur l’amélioration continue.

Les améliorations locales, continues, incluent le personnel de terrain dans un processus d’équipe qui encourage l’autonomie et la responsabilisation. Le personnel des armées est déjà sensibilisé au management du changement, qui donne une impulsion à l’amélioration continue. Cette qualité militaire s’appelle l’adaptation. La méthode Lean peut être mise en place au sein des armées pour améliorer la performance fonctionnelle. D’ailleurs, le management visuel, l’adhésion du groupe au projet commun ou la standardisation des procédures sont des outils qui sont déjà utilisés sans qu’ils soient reliés au Lean. Comme dans le cas des améliorations globales, la capitalisation de ces améliorations, et leur stabilisation dans le temps permettrait de gravir la pente de l’amélioration continue sans risque de repartir en arrière. C’est le rôle du S de «standardiser» qui sert de cale à la roue de l’amélioration continue (DMAIC). Ce jalon de la méthode peut par exemple se traduire dans les armées par le développement et l’exploitation du retour d’expérience et des procédures centralisées.

 

 

Au sein des armées, la dualité entre l’opérationnel et l’organique, encore soulignée par les dernières réformes du soutien, est aussi présente pour la mesure de la performance. La performance fonctionnelle, à la différence de la performance opérationnelle, présente des similitudes de mesures avec le milieu civil. Les méthodes d’amélioration civiles peuvent donc être utilisées. Ces méthodes peuvent concerner l’amélioration globale d’un organisme, par rupture, ou l’amélioration continue, moins brutale et plus localisée. Le domaine organique des armées peut reprendre à son compte la méthode Lean. Il faut néanmoins s’assurer que les progrès globaux ou continus effectués soient stabilisés pour continuer sur la pente ascendante de l’amélioration continue. La mise en place concrète de cette optimisation nécessiterait de la formation sur les outils Lean, dont certains sont déjà utilisés dans les armées sans le savoir. Elle impose surtout une implication individuelle importante de l’ensemble des acteurs de la chaîne, dans un environnement qui doit être caractérisé par une meilleure compréhension de la notion de contrat entre client et fournisseur. En fait, il s’agit d’exécuter des missions selon la lettre fonctionnelle (le contrat) et l’esprit opérationnel (la flexibilité).

 

Saint-cyrien de la promotion Raffalli (98-01), le chef d’escadron Olivier de PLACE est issu de l’arme du train. Il a servi au 515ème et au 517ème régiment du train. Fin septembre 2013, il a terminé sa scolarité du diplôme technique en mastère spécialisé «Lean: production et logistique» aux Arts et Métiers à Paris.

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Titre : Méthodes d’amélioration de la performance au sein des armées
Auteur(s) : le Chef d’escadron Olivier de PLACE
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