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SAVOIR DIFFERENCIER LES DEUX GRANDES TENDANCES DU COMMANDEMENT

L’exercice du commandement en opérations pour les chefs tactiques
Histoire & stratégie
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L’histoire militaire fait apparaître que tous les chefs se sont référés à deux styles génériques de commandement : le commandement directif (par ordre, également appelé « detailed  command»  par les Anglo-Saxons ou « Führung Mittels Befehls» par les Allemands) et le commandement par objectif  (« mission command » pour les Anglo- Saxons, « Führen  mit  Auftrag»  pour l’armée  allemande).  Dans le premier, si le but à atteindre et les moyens à mettre en œuvre sont précisés, les modalités d’exécution le sont également. Le second au contraire laisse une marge de manœuvre plus importante aux échelons  subordonnés  qui  doivent s’imprégner   de  l’idée   de manœuvre du chef pour atteindre l’objectif assigné. Il s’agit de tendances, aucun style ne se référant exclusivement à l’une ou l’autre.

 


Commander par ordre

Le commandement par ordre affirme que la victoire est le fruit de la volonté  du chef. Par essence déterministe, ce style  de comman- dement s’appuie sur une centralisation poussée et liée à un haut degré de discipline formelle. Les relations de commandement y sont strictement verticales.

Pour autant, il convient de ne pas assimiler cette forme de commandement à une caricature arbitraire. En effet, ce style  de commandement peut s’appliquer lors d’engagements particulière- ment difficiles ou « bloqués » quel que soit le niveau de coercition, dans lesquels une réaction rapide nécessite une centralisation des décisions de commandement immédiates et exécutoires. L’initiative des subordonnés, ayant compris l’intention du chef, n’est pas toujours suffisante pour affronter des situations changeantes, surtout s’il y a mise en difficulté des troupes amies et de la manœuvre en cours. Commander par ordre peut s’avérer également nécessaire lorsque la réussite d’une opération repose sur son secret, ou lorsque l’urgence de la situation impose des délais contraints de conception.

La prise en main du corps expéditionnaire français en Indochine par  le  général  de  Lattre en  décembre  1951 alors  que  la situation  militaire frisait  la catastrophe est un remarquable exemple d’efficacité du commandement par ordre par un chef doué d’une personnalité exceptionnelle et d’un extraordinaire charisme. Réunissant les officiers disponibles à Hanoï le 19 décembre 1951, il leur tient le langage suivant :

« notre combat est désintéressé, c’est la civilisation toute entière que nous défendons au Tonkin. Jamais guerre n’aura été plus noble. Je vous apporte la guerre, mais aussi la fierté de cette guerre. L’ère des flottements est révolue. Je vous garantis, messieurs les militaires et messieurs les civils, français et vietnamiens, que désormais vous serez commander. J’interdis, quelles que soient les circonstances invoquées, le moindre repli, même du plus petit poste. C’est tout. »

 

Le lendemain,  une scène analogue se reproduit à Haïphong. Il  y déclare notamment :

« c’est pour vous, les lieutenants et les capitaines que je suis venu, vous qui supportez le poids de cette guerre et jouez un rôle si important.  Sachez que je  n’ai  pas le  temps  de faire  la  justice, seulement des exemples ». Le général Salan, présent, note : « le fluide est passé ! Cet homme est un véritable magicien ! Je l’ai vu dans les regards, le général vient de transformer le corps expéditionnaire. »

En dépit de ces mises en garde, le général Boyer de la Tour, commandant supérieur  au Tonkin, autorise l’évacuation d’un poste isolé à la frontière  chinoise de la valeur d’une section de partisans. Le soir même, il est mis dans un avion pour la France et relevé par le général de Linarès.

Général Gras

(Histoire de la guerre d’Indochine. Paris 1979. Plon, pages 368, 369)

 

Enfin, le recours au commandement par ordre devient également généralement la règle lorsqu’une unité est placée sous contrôle tactique (TACON) généralement dans un cadre multinational, hors de sa zone et au profit d’une unité d’une autre nation, pour accomplir des tâches préalablement précisées.

 

Commander par objectif

Le commandement par objectif, s’appuyant toujours sur une idée de manœuvre clairement exprimée par le chef, repose sur l’initiative accordée aux subordonnés, leur discipline intellectuelle et leur réactivité pour atteindre le but fixé par l’échelon supérieur.

Le recours à cette forme de commandement vise à favoriser la nécessaire capacité d’adaptation de la manœuvre en cours - à travers  le  dispositif  et le  mode d’action retenu - à l’évolution permanente de la situation, par l’application judicieuse des principes de la guerre alors appliqués aux relations de commandement :

 

  • la liberté d’action,  garante  de  la  prise  d’initiative,  mais conditionnée par la prise de responsabilité du chef à tous les échelons ;
  • l’économie des forces, visant l’adaptation  des moyens à la mission fixée par le biais d’un véritable dialogue de commandement ;
  • la concentration des efforts, acquise par une expression claire de l’idée de manœuvre permettant la convergence des actions des subordonnés.

L’application de ces principes aux relations de commandement s’appuie sur la confiance réciproque entre chef et subordonné. Elle se concrétise par :

  • la prise de responsabilité du chef lorsqu’il s’exprime par ses ordres ;
  • une discipline intellectuelle rigoureuse de la part du subordonné lorsqu’il les exécute.

En outre, son efficacité repose sur quatre éléments complémentaires : l’idée de manœuvre, la responsabilité relative des subordonnés, leur esprit d’initiative et la qualité des ordres, facteurs qui feront l’objet d’un développement dans le paragraphe suivant.

  1. a) La liberté d’action génère l’esprit d’initiative

En effet, lorsque le chef indique d’emblée au subordonné le but à atteindre (son effet majeur), mais en le laissant lui-même définir les tâches – successives ou simultanées - qu’il aura à exécuter ou les procédés qu’il aura à employer pour remplir sa mission avec succès, ce type de commandement préserve en permanence la liberté d’action de tous les échelons de commandement. Qui plus est, comme les idées de manœuvre des échelons successifs s’emboitent logiquement les unes dans les autres, la cohérence d’ensemble de la manœuvre est assurée.

Il est par ailleurs flagrant que le commandement par objectif favorise la réactivité des échelons subordonnés en cas d’apparition d’une menace inopinée ou d’une brusque évolution de situation : lorsque l’échelon supérieur avait conçu sa manœuvre sous la forme d’une intention, complétée par un plan de manœuvre, la menace en question a très bien pu ne pas être envisagée, la guerre étant par essence contingente. Le subordonné est alors en mesure de réévaluer sa mission et de conduire son action de sa propre initiative, tout en demeurant strictement dans le sens de l’effet à obtenir par le chef. Cette intelligence de situation présuppose chez le subordonné une aptitude particulière à savoir prendre ses responsabilités.

  1. b) L’économie des forces est optimisée à travers le dialogue de commandement.

Par ailleurs, un tel type de commandement impose par lui-même un véritable dialogue de commandement, dépassant le cadre parfois un peu formel du « back brief» : s’étant imprégné de la place que sa manœuvre occupait dans celle de l’échelon supérieur, le subordonné est en effet en mesure d’estimer – et de demander à bon escient – les renforcements, les demandes de renseignement ou les modifications de zones d’action qu’il juge indispensables  pour la réussite de son action.

L’interaction entre les différents échelons hiérarchiques s’en trouve également mise en valeur, puisque simultanément au compte rendu d’évolution  de la  situation, le  subordonné  indique à son chef les mesures prises d’emblée à son niveau, toujours en conformité avec le but poursuivi, ainsi que celles qu’il est en mesure de prendre à court terme.

  1. c) La concentration des efforts s’obtient par la convergence collective et volontariste des actions.

Enfin, pour que ce type de commandement fonctionne tout au long de  la  chaîne hiérarchique, il  importe que  la  formulation  des intentions successives et la description des modes d’action considérés soient exprimées sans aucune ambiguïté, de la façon la plus  simple  possible.  Ici également,  le  chef s’engage clairement, cherche à convaincre ses subordonnés et son état-major, et ne se retranche pas derrière le  flou  de la  formulation  de ses ordres à l’instar de Gamelin en 1940.

A ce titre, le  commandement par objectif aboutit toujours à une manœuvre plus souple car, favorisant systématiquement l’initiative du subordonné, il le place en position favorable pour toute saisie d’opportunité.

Cette forme « d’initiative par le bas » par laquelle l’échelon au contact est jugé le mieux à même d’estimer la situation locale et ses répercussions se révèle  tout à fait adaptée au juste emploi de l’application de la force.

En d’autres termes, tendre vers le commandement par objectif, c’est mettre l’accent sur la discipline intellectuelle.

La comparaison entre les deux formes de commandement n’est pas tant liée à la phase de l’opération jouée (intervention ou stabilisation) qu’à la dimension du cadre espace – temps dont le chef dispose pour conduire sa manœuvre : à un cadre espace-temps restreint pourra éventuellement correspondre un commandement par ordre, tandis que dans le cas contraire le commandement par objectif primera. C’est le cas notamment pour les opérations de stabilisation conduites par un échelon de brigade dans lesquelles le cadre temps de l’ordre d’opération s’exprime sur une échelle de plusieurs mois, tandis que la zone de responsabilité de la dite brigade peut couvrir la superficie de plusieurs départements métropolitains.

En outre, la multiplication des acteurs en cause et le recours le plus souvent à une manœuvre indirecte – facteurs caractéristiques de la  manœuvre  globale  – incitent également  à recourir à ce mode de commandement ; notamment par le fait que dans ce cadre un type de communication en réseau  est préférentiel  à un système strictement vertical.  Enfin, dans cet environnement,  le  comman- dement du chef à l’échelon  de la grande  unité relève  plus  de la coordination d’actions décentralisées dans l’espace et dans le temps que du commandement direct d’une action unique et centralisée.

Ces deux formes de commandement ne sont jamais exclusives, mais complémentaires. En privilégier une ne revient en aucun cas à exclure l’autre.

Dans l’absolu, le commandement par objectif présente le meilleur  ratio avantages sur inconvénients, et peut permettre au chef de mesurer la part du risque qu’il est prêt à accepter. A contrario, dans les situations de crise aiguë qui nécessitent la centralisation  de  la  décision,  le  commandement  par  ordre pourra primer.

Par ailleurs, dans le cadre d’une coalition multinationale, c’est la forme  de commandement retenue par le commandeur qui déterminera celle de ses subordonnés. Enfin, indépendamment du contexte, c’est toujours la personnalité du chef qui lui fera opter pour telle ou telle forme de commandement.

 

 

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Titre : SAVOIR DIFFERENCIER LES DEUX GRANDES TENDANCES DU COMMANDEMENT
Auteur(s) : RFT 3.2 Tome 2 (FT-05)
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