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La guerre par procuration : l’utilisation de l’ethnie Hmong dans les guerres d’Indochine

1/3 - Revue militaire n°55
Histoire & stratégie
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Chargé d’études au pôle études et prospective (PEP) du centre de doctrine et d’enseignement du commandement (CDEC), M. Corentin Curtenelle est titulaire d’un Master en Relations Internationales. Réserviste, il contribue à la rédaction du « Brennus 4.0 » et participe à l’élaboration de « l’éclaireur », document de veille prospective national et international, publié par le CDEC.

 


Corentin Curtenelle nous plonge dans une guerre où Français et Américains s’interrogent sur les leviers qui doivent être actionnés pour leur permettre de remporter la victoire lors de leur guerre parmi les populations en Asie du Sud-Est. C’est le contexte (géographique, humain, politique) nouveau pour ces deux grandes puissances victorieuses du Second Conflit mondial, qui les incite à développer une sorte de « laboratoire » au centre duquel se trouvent les tribus Hmongs. Pour les uns c’est la découverte et pour les autres la redécouverte, de la guerre au milieu des peuples, mais avec peu de réussite finale pour des motifs résolument différents.

                                                           

 

En 1945 en débarquant en Indochine, le Corps Expéditionnaire Français en Extrême-Orient (CEFEO) découvre un environnement inattendu. Alors qu’il s’apprêtait à se battre contre l’armée japonaise – un ennemi conventionnel – il se trouve confronté à un mouvement de guérilla, le Viêt-minh, contre lequel la puissance d’un corps mécanisé qui a fait ses preuves en Europe, se montre rapidement inefficace sur ce nouveau théâtre d’opérations. D’ailleurs, ce conflit n’est pas seulement militaire, mais revêt un aspect politique. Les Français redécouvrent la guerre au milieu des peuples et tout l’intérêt de trouver des soutiens locaux pour vaincre un environnement qui leur est quasiment inconnu. C’est à la même analyse que se livrent les Américains lors du conflit au Vietnam. Eux aussi se mettent en quête d’une « recette » alternative pour contrer les méthodes de la guérilla. Paris et Washington choisissent l’option de s’appuyer sur des alliés dépendant d’armées non conventionnelles. En Indochine, et plus tard lors du conflit au Vietnam, les tribus locales qui s’opposent spontanément au Viêt-minh apparaissent alors comme une solution fiable et pouvant conduire au succès. Parmi ces multiples ethnies, une se démarque pour son dévouement envers les forces occidentales : l’ethnie Hmong.

Pendant l’avancée communiste, plusieurs villages Hmongs s’opposent spontanément au Viêt-minh1. Cette résistance est un atout pour les Français et pour les Américains. D’ailleurs après le retrait de la France, Washington poursuit le soutien de ces tribus, notamment lors d’un conflit parallèle à la guerre du Vietnam : la guerre civile du Laos. Dans les deux cas, cette résistance apparaît comme une chance, mais nullement comme un gage de succès. Il est donc convenu de venir en aide « aux montagnards ». Les services de renseignement français et américains vont successivement entraîner et encadrer des maquis Hmongs à des fins politiques et militaires.

 

Un allié précieux

La rusticité et la connaissance du terrain font des Hmongs des alliés particulièrement efficaces.

   Une arme de contre-guérilla pour la France

Ces maquis sont créés en 1950 pour répondre à la menace grandissante du Viêt-minh. En effet, grâce au soutien de la République populaire de Chine, Hô Chi Minh et Giap2 lancent une vaste offensive. Mais cette avancée fragilise leurs arrières et les conduit à la nécessité de contrôler des populations réfractaires à l’idéologie communiste. Dès lors, une résistance s’organise chez ces peuples. Afin de soutenir ces mouvements, la France entre en contact avec les chefs de tribus qui souhaitent recevoir de l’aide. C’est le Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage (SDECE) et son service « Action » qui a la charge d’encadrer ces nouveaux réseaux de résistance. En effet, les tactiques de la guérilla ne sont pas inconnues du Service. Ses cadres sont même rompus à ces techniques. Formés par les Britanniques, ils ont été parachutés derrière les lignes allemandes pendant la Seconde Guerre mondiale et ce sont eux qui ont dirigé les réseaux de résistance français. Sous le terme de « Groupement de Commandos Mixtes Aéroportés »3 (GCMA), la France forme une contre-guérilla. Au sein de ces unités, les Hmongs sont chargés de contrer les actions du Viêt-minh dans les régions montagneuses.

Une fois implantés, les GCMA reçoivent trois types de missions. La première consiste à renseigner. Elle est parfaitement à la mesure de ces soldats irréguliers. Grâce à ces maquis et aux réseaux d’écoute, la France n’aura jamais été aussi bien informée sur son ennemi que durant la guerre d’Indochine4. La seconde mission des maquis est de créer une insécurité permanente sur l’arrière des troupes viêt-minhs. Là encore, ces troupes légères, discrètes et d’une grande mobilité, excellent dans ce domaine. Les embuscades tendues ont de fortes conséquences psychologiques sur les troupes de Giap. Enfin, les GCMA doivent rallier les populations autochtones à la France. Pour y parvenir, les agents français vont mettre en place une contre-propagande soulignant le caractère colonisateur du Viêt-minh et mettre en exergue la haine qui existe entre les Hmongs et les Annamites. Il s’agit d’un exercice complexe qui consiste, tout à la fois, à connaître l’Histoire des peuples, et à faire preuve de diplomatie.

L’opération « Myosotis » du 27 au 31 mai 1953, est un exemple de réussite. L’action des Hmongs lors de cette opération est saluée, notamment, par le général Salan5. Au cours de l’action, les maquis héritent de missions secondaires, de guidage et d’amélioration de la sécurité des axes de communication et des flancs. Les Hmongs effectuent en la circonstance, des missions en complément de l’action principale6. L’exercice est difficile car il requiert, dans un espace géographique contraignant, une parfaite coordination avec les forces régulières, car elles seules possèdent la puissance de feu nécessaire pour détruire l’ennemi. Malheureusement, ce type d’intervention ne se généralise pas et est efficace trop tardivement pour changer le cours de la guerre. Toutefois, l’efficacité de ces maquis est suffisamment probante pour être exploitée par les Américains dès le retrait français.

 

 

1 Opposition qui peut s’expliquer, en partie, par les conflits qui opposent les Annamites peuples des plaines qui composent le Viêt-minh, aux Hmongs montagnards.

2 Hô Chi Minh est le dirigeant politique du Viêt-minh, Giap est en charge des forces armées.

3 Ordre du général De Lattre de Tassigny, Décision n° 174 CAB/MIL/ED, 1950.

4 Lieutenant-colonel Michel David : « Guerre Secrète en Indochine : les maquis autochtones face au Vietnminh (1950-1955) », Limoges, Lavauzelle Graphic Edition, 2004, p. 329.

5 « La bataille de Tranninh », Tropiques n° 355, octobre 1953.

6 Fiche du 3e Bureau des FTL, octobre 1953, non signée, SHAT 10H1632.

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Titre : La guerre par procuration : l’utilisation de l’ethnie Hmong dans les guerres d’Indochine
Auteur(s) : Monsieur Corentin CURTENELLE
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