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L’ami américain « la Tchécoslovaquie enjeu de la diplomatie américaine 1943-1968 »

cahier de la pensée mili-Terre
Histoire & stratégie
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Comme le disait Jan Masaryk, ministre des affaires étrangères dans la Tchécoslovaquie de l’après-guerre, « il n’est pas aisé d’être un pont entre l’Est et l’Ouest. En temps de paix, c’est un lieu d’embouteillages et en temps de guerre c’est la première chose que l’on fait sauter ».


Cette boutade résume bien le destin de son pays, auquel son régime démocratique et son économie avancée entre les deux guerres mondiales ont valu, après la libération, d’être l’enjeu d’une lutte d’influence discrète mais constante et acharnée entre les deux blocs, jusqu’à ce que Moscou ne siffle en 1968 la fin de la partie avec l’intervention des troupes du Pacte de Varsovie et une prise en main directe des affaires à Prague par les Soviétiques pour les vingt années suivantes.

Dans son ouvrage très documenté (dérivé d’une thèse de doctorat), l’historienne Justine Faure décrit la place singulière qu’occupe la Tchécoslovaquie dès l’origine de la confrontation Est-Ouest, lorsque les forces américaines ralentissent leur avance pour laisser à l’Armée rouge l’honneur d’entrer à Prague… et de pouvoir se parer du titre de libérateur du pays.

On y voit, sous Roosevelt et Truman, les dirigeants américains croire en la possibilité d’une cohabitation harmonieuse, en Europe, de « sphères d’influences ouvertes ». La Tchécoslovaquie, à la jonction de ces espaces et grâce à sa culture politique et économique plus développée que celle de ses voisins, leur semble un pays-clé, où pourrait se matérialiser une politique de compromis avec l’Union soviétique. Le « coup de Prague »[1][2] de février 1948 les surprend ; dès lors, et plus encore après l’élection d’Eisenhower, la politique de « containment » théorisée par George Kennan reconnaît toujours à la Tchécoslovaquie une place essentielle, mais cette fois par le potentiel qu’elle offre à la pénétration des idées et influences occidentales.

La phase dite de « détente » (après l’arrivée de Khrouchtchev au pouvoir à Moscou) dicte aux Etats-Unis une attitude moins offensive. Ayant mesuré, lors des crises polonaise et surtout hongroise de 1956 les limites de leur emprise sur les événements en zone soviétisée, et trouvant leur intérêt dans la « coexistence pacifique », ils détournent les yeux de l’Europe centrale pour s’intéresser davantage au Tiers-monde… où une nouvelle compétition ne va pas tarder à les opposer à l’URSS. Au fil du temps, lassés par l’attitude obstinément fermée des dirigeants communistes tchécoslovaques face à leurs initiatives économiques et culturelles, (et par ailleurs de plus en plus engagés au Vietnam) les dirigeants américains se convaincront que le pays ne mérite pas d’attention particulière et reprendront à leur compte quelques clichés comme le caractère artificiel de son Etat et la passivité atavique de son peuple. La crise de 1968 ne marquera pas de rupture à cet égard.

Ce livre décrit avec précision le processus de prise de décision, et montre qu’en dépit d’un discours souvent emphatique, surtout lorsque le parti républicain était au pouvoir, la politique américaine vis-à-vis du « camp socialiste » fut le plus souvent prudente et même hésitante. Il analyse en détail le rôle (et l’instrumentalisation) des acteurs non étatiques, qu’il s’agisse des émigrés et réfugiés, souvent source d’information dévaluée, des organisations de diasporas, qui exercent une pression efficace sur les « congressmen » de Washington, des médias, comme, par exemple, l’attitude de Radio Free Europe, jamais totalement remise de l’accusation d’avoir poussé les Hongrois à la révolte en 1956 en leur promettant un soutien militaire occidental, et qui en viendra à s’autocensurer à propos de la Tchécoslovaquie en 1968. Mais aussi de quelques fiascos de la CIA, heureusement restés sans conséquence (sauf pour les intéressés directs…) Il montre également la différence entre la perception extérieure des diverses sociétés d’Europe centrale : la polonaise et la hongroise, dynamiques et sujettes à de violents à-coups, et la tchèque où règne l’immobilisme (alors que s’y poursuit une maturation lente et indécelable). Il explique enfin pourquoi les Etats-Unis, s’ils n’avaient pas anticipé le retrait soviétique d’Europe centrale, ont été en mesure d’y réagir rapidement en appliquant à la Pologne et à la Hongrie, devenus les pays les plus importants à leurs yeux, quelques uns des enseignements tirés du laboratoire tchécoslovaque dans les années 60.

Au total un ouvrage qui stimule la réflexion sur les phénomènes politiques américains et européens jusqu’aux soubresauts les plus récents, comme la controverse sur la nouvelle Europe ou les difficultés de l’élargissement à l’Est de l’Union européenne. D’une lecture facile, à condition de ne pas être effrayé par les détails, il doit être recommandé à ceux qui, loin des théories du complot ou des propos de tribune, recherchent des clés pour comprendre l’Histoire… et la situation actuelle de notre continent.

 

 

[1] Coup de force du Parti communiste tchécoslovaque, déjà associé au pouvoir mais qui s’empare en cette occasion de la totalité des leviers de l’Etat.

 

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Titre : L’ami américain « la Tchécoslovaquie enjeu de la diplomatie américaine 1943-1968 »
Auteur(s) : le Lieutenant-colonel GERVAIS
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