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⚡️ Introduction aux notions de surprise tactique et de sûreté

BRENNUS 4.0
Tactique générale
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Il n’est pas évident de partir d’un consensus pour définir la surprise tactique, tant les notions qu’elles recouvrent sont multiples. Hors cadre national, on peut déjà noter que la surprise est définie comme un principe de la guerre dans la doctrine de l’OTAN ou des pays comme la Chine, les États-Unis, le Royaume Uni, Israël et la Russie. Dans le corpus doctrinal français, la surprise est comprise comme procédé d’application des principes de la guerre. Alors en charge du cours d’histoire militaire, de stratégie et de tactique générale de l’École supérieure de guerre, Foch énonce dès 1893 une série de principes, sans toutefois viser à l’exhaustivité : économie des forces,  liberté  d’action, libre  disposition des forces, sûreté, etc.


La surprise apparaissait ici sous son acception négative, en miroir de la sûreté qui permettait de s’en prémunir. Les trois principes de la guerre sous leur forme actuelle, à savoir la liberté d’action, la concentration des efforts et l’économie des moyens, ont été retenus dans l’instruction générale des forces terrestres de 1994, puis repris en 2008 dans le document FT-02, où il est cependant précisé que « leurs procédés d’application doivent privilégier la surprise en tous domaines car elle permet d’imposer à l’adversaire un retard permanent ». Il est alors intéressant de constater que l’amiral Labouérie, au début des années 1990, invitait déjà à bien distinguer les principes de la guerre du procédé générique que constitue la surprise. Mais la surprise ne peut-elle pas être considérée comme un effet sur lennemi ? La surprise fait certes référence à une action imprévue par l’ennemi et dont il n’a, au mieux, que très imparfaitement pu se prémunir. Mais elle est également l’état émotionnel causé par le décalage entre la réalité et nos attentes, pouvant aller jusqu’à la sidération et la paralysie. En définitive, la  surprise tactique, qu’elle soit offensive ou défensive, peut être aussi bien définie par une action du domaine militaire que le résultat de cette action qui impose à la victime d’ajuster sa posture et ses moyens dans un cadre espace-temps limité.

 

Peu importe l’acception choisie, la surprise reste un facteur constant des conflits armés malgré un emploi bien souvent sporadique au fil des siècles. Elle est en effet intrinsèquement liée à la guerre car elle exploite l’incertitude et  le  brouillard inhérents à toute dialectique des volontés. Ce constat interroge sur la possibilité de surprendre ou d’être surpris, à l’heure de la transparence du champ de bataille. L’argument de la connaissance totale du terrain et du milieu que conférerait la technologie actuelle peut-il justifier l’impossibi- lité de la surprise tactique aujourd’hui ? Ensuite, la technologie n’annihile pas toute capacité de surprise car elle apporte autant d’opportuni- tés que de vulnérabilités pour le chef qui a tou- jours souhaité être omniscient sur le champ de bataille. Enfin, l’accès à des technologies favori- sant la surprise (drones, roquettes guidées, …) pour des groupuscules non étatiques d’une part et la dépendance actuelle des pays occidentaux aux systèmes numériques d’autre part, posent la question de l’apparition de nouveaux vecteurs de surprise. En définitive, la surprise semble encore possible aujourd’hui.

La surprise est l’une des conditions de la victoire dans le cadre d’un rapport de force défavorable ou égal. Elle permet en effet de rechercher la supériorité militaire et l’ascendant psychologique sur un adversaire dans un cadre espace-temps bien défini, condition éminemment favorable au succès tactique. Sa mise en œuvre doit donc faire partie intégrante de la réflexion du chef militaire lors de la conception de sa manœuvre, au même titre que sa sûreté. En effet, la notion de surprise étant évidemment développée face à un ennemi, ce dernier va certainement la rechercher à son profit. La sûreest ainsi fondamentalement indissociable de la surprise. Les NTIC offrent d’ailleurs une dimension nouvelle à la notion de sûreté, notamment en raison de l’hyper connectivité, de la mise en réseau de nombreux systèmes et de l’infovalorisation permises par le programme SCORPION.

Pour inscrire la surprise dans sa manœuvre, le chef doit avant toute chose en maîtriser le mécanisme et les conditions de succès. Tout d’abord, la surprise exploite directement l’incertitude régnant sur le champ de bataille. Celle-ci est en grande partie liée à l’environnement  (météorologie,  contingences sociales et politiques, …) et à l’imprévisibilité  de la nature humaine qui rendent extrêmement difficile voire impossible la caractérisation de l’ensemble des actions et réactions de l’ennemi. Ensuite, plus la distorsion entre ce qui était attendu et la réalité est importante, plus l’effet de surprise sera important et plus sa durée d’effet sera longue1. Ce décalage sera d’autant plus grand que la manœuvre sera furtive jusqu’au moment décisif et qu’elle fera appel à une ruse ou un stratagème innovant, fruit de l’inventivité du chef. Celle-ci s’appuiera nécessairement sur les vulnérabilités de l’adversaire déterminées par du renseignement obtenu avec des capacités technologiques adaptées. Mais surprendre un adversaire, comme toute autre action militaire, suppose une doctrine, une formation et un entraînement pour être efficace. Le développement d’une culture de la surprise, irriguant jusqu’aux plus petits échelons, apparaît ici comme un impératif. Par ailleurs, la surprise ne vaut que par la conservation de son imprévisibilité et du doute chez l’ennemi, sous-tendus par une sécurité des opérations et le respect du secret. Enfin, la surprise n’est utile que si elle est suivie d’une phase d’exploitation exécutée au moment décisif et ordonnée par un chef capable d’appréhender rapi- dement l’ensemble de la situation sur le champ de bataille.

 

Il appartient à présent au chef de définir les facteurs d’application de la surprise qui la feront entrer en résonance avec sa manœuvre. Ils sont au nombre de quatre : le moment, le lieu, le mode d’action et le vecteur technologique2. Leur combinaison vise à provoquer ou exploiter des vulnérabilités dans le dispositif de sûreté de l’ennemi. Concernant le moment, si l’on recherche la discrétion, un mouve- ment de nuit sera privilégié. Si on cherche au contraire à faire de la déception en focalisant l’attention de l’ennemi sur un de nos déplace- ments pour en masquer un autre, on  choisira prioritairement une manœuvre de jour. Déterminer le lieu de la surprise revient à défi- nir un point physique du terrain où l’ennemi ne nous attend pas, soit parce qu’il ne l’a pas envisagé, soit parce qu’il en a jugé les accès trop difficiles ou l’utilisation peu adaptée au combat. À propos du mode d’action, le changement de rythme de la manœuvre, l’infiltration dans la profondeur ou encore la recherche du com- bat archipélagique sont des exemples utilisés pour surprendre et déstabiliser l’adversaire. Enfin, une surprise aura d’autant plus d’effet chez l’ennemi qu’elle sera portée par une capacité inno- vante issue d’un saut ou d’une rupture technologique (précision, portée, puissance, protection, furtivité, …). Pour conclure sur les points d’application de la surprise dans la manœuvre, il est intéressant de noter que certains facteurs de supériorité opé- rationnels3, combinés ou non avec d’autres facteurs-clés, appa- raissent comme des multiplicateurs d’effet aux fins de surprise ou de sûreté. La surprise peut ainsi être analysée sous le prisme de la masse, de la combinaison de l’agilité avec la performance du commandement ou encore de l’influence.

En parallèle, le chef doit également mener une réflexion autour de la sûreté. Celle-ci s’appuiera en amont sur la fonction connaissance/ anticipation. Il s’agit ici de « penser le futur impensable » grâce au renseignement, la prospective, puis de mettre en place des mesures de sûreté adaptées. Dans ce cadre, l’identification des signaux faibles, la mise en place de scénarios descriptifs de la menace, ou encore des techniques d’analyse comparatives telles que le net assessment4 sont des pistes couramment utilisées aujourd’hui. Toujours en amont, la formation et l’entraînement à la résilience des soldats, des infrastructures et des systèmes de combat permettent de réduire l’effet de surprise. Le travail en mode dégradé (coupure des SIC, perte d’unités ou de capacités clés, etc.) doit être imposé et facilité par la mise en place de plan de continuité ou de reprise des activités. Concernant la conduite des opérations, le renseignement en boucle courte, la modula- rité et l’adaptabilité des unités sont des facteurs de sûreté qui ne seraient pas complets sans citer la constitution d’une réserve contribuant à la liberté de (ré)action du chef.

 

 

1   Tactique théorique, général Yakovleff , ECONOMICA, 2016.

2   L’avenir de la surprise tactique à l’heure de l’innovation, Rémy Hemez, IFRI, 2016.

3   Action terrestre future, EMAT, 2016.

4   Analyse comparative des facteurs militaires, technologiques, politiques, économiques ou autres qui déterminent la capacité militaire relative des nations. Son objectif est d’identifier des problèmes et des opportunités qui méritent l’attention des responsables politiques de la défense.

 

 

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Titre : ⚡️ Introduction aux notions de surprise tactique et de sûreté
Auteur(s) : le chef de bataillon Jérôme Breton
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