Les contenus multilingues proposés sur le site sont issus d'une traduction automatique.
 

 
 
 
 
 
Français
English
Français
English
 
 
 
Afficher
 
 
 
 
 
Afficher
 
 

Autres sources

 
Saut de ligne
Saut de ligne

S'adapter

Gagner la bataille conduire à la paix- les forces terrestre dans les conflits aujourd'hui et demain
Histoire & stratégie
Saut de ligne
Saut de ligne

La manœuvre de l’information participe à la lutte asymétrique. Les forces déployées sur un théâtre d’opérations doivent faire du combat par l’image une dimension nécessaire de l’action des unités aéroterrestres.


1 - DE LA BATAILLE AUX CONDITIONS  DE LA PAIX

1.1 – De l’intervention à la stabilisation, un changement de manœuvre

Passer de la phase d’intervention à celle de la stabilisation, c’est passer d’un objectif tactique – gagner la bataille – à un objectif stratégique qui n’appartient plus à la seule force militaire. C’est aussi, le plus souvent, passer d’un adversaire essentiellement dissymétrique à une opposition asymétrique. C’est donc changer brutalement de manœuvre avec une force (systèmes de commandement, unités de contact, appuis, soutiens) encore organisée et équipée pour le combat.

La période du silence des armes qui succède à la bataille engage profondément la suite du conflit. Les décisions opérationnelles, les objectifs des unités, les réactions et le comportement de celles-ci, la réponse aux besoins essentiels des populations ont des conséquences durables sur le cours des évènements. Elles peuvent avancer ou retarder l’issue du conflit et font de la transition une période critique.

En amont de l’intervention, la préparation et la planification de la phase de stabilisation avec l’ensemble des acteurs qui devront y participer permettent une transition harmonieuse vers cette phase et prépare son succès. Bien souvent la logique de reconstruction qui y présidera imposera des limites à la logique de destruction inhérente à la bataille initiale.

L’adaptation du commandement est essentielle. Les fonctions d’un poste de commandement (PC) de stabilisation sont sensiblement différentes de celles d’un PC qui conduit le combat pour neutraliser ou détruire un ennemi. S’il existe bien une forte corrélation entre des PC de bataille et de retour à la paix, ne serait-ce que pour que les décisions du premier permettent le succès du second, il demeure des distinctions essentielles qui doivent être prises en compte. Sauf à spécialiser en permanence des états-majors pour chaque phase d’un conflit, la capacité à permettre l’évolution indispensable des systèmes de commandement sur un théâtre repose sur la capacité des états- majors à détenir la flexibilité nécessaire pour passer d’un mode d’engagement à l’autre. Ceci passe par une agilité culturelle et la capacité d’agréger à un noyau central intangible les cellules et fonctions nécessaires – de les désengager aussi afin de ne pas se contenter de rajouter, au risque de développer des systèmes de commandement hypertrophiés.

Sur le terrain, les unités doivent réorienter leurs modes d’action conformément à de nouvelles missions. Leurs capacités doivent pouvoir évoluer d’une phase à l’autre. Nécessaire dans la bataille, la puissance destructrice l’est infiniment moins pour conduire à la  paix quand la  présence humaine, le  contact, la sécurité générale prennent une importance croissante. En outre, si parfois, il peut paraître souhaitable que les mêmes unités assurent cette évolution, certaines circonstances peuvent conduire à privilégier une relève spécifiquement préparée en vue de la situation nouvelle du théâtre.

Passer de la phase d’intervention à celle de la stabilisation, c’est passer d’un objectif tactique à un objectif stratégique qui n’appartient plus à la seule force militaire. C’est donc changer de manœuvre. Conçue le plus en amont possible, la transition harmonieuse vers la stabilisation prépare le succès futur.

L’adaptation du commandement en est une dimension essentielle. Les PC doivent évoluer tout en se gardant d’une tendance naturelle à l’hypertrophie. Sur le terrain, les unités doivent réorienter leurs modes d’action et leur composition quand la puissance destructrice devient moins nécessaire pour conduire à la paix que la présence humaine, le contact ou la sécurité générale.

 

1.2 – S’ouvrir et comprendre afin de s’adapter aux autres

Si elles doivent s’adapter à l’évolution de la forme du conflit dans le temps, les forces doivent aussi s’adapter à ceux qu’elles côtoient ou à ceux qu’elles combattent : populations, autorités politiques, organisations, belligérants, ennemis. Hormis quelques experts, il ne s’agit pas de transformer les militaires engagés dans l’opération en spécialistes de mondes lointains et de cultures différentes. Il leur est, cependant, indispensable de posséder une faculté d’adaptation, de tolérance et d’ouverture qui leur permette d’affronter l’inconnu ou l’étrange.

S’adapter  à  la  population,  c’est  comprendre  qu’elle  pense différemment, n’a pas les mêmes espérances, ne vit pas les mêmes relations claniques, ethniques ou familiales. C’est admettre que les objectifs que peuvent avoir les acteurs locaux de la crise peuvent être à cent lieues de ceux de la Force, de notre propre pays, de la communauté internationale. C’est concevoir jusqu’au plus petits échelons des solutions locales en accord avec l’environnement.

S’adapter à l’adversaire, c’est savoir que, lui aussi, a son propre mode de pensée parfois à l’opposé du nôtre et qu’il n’envisage pas sans doute pas d’en changer. C’est tenter de percer ses intentions, déterminer ses objectifs et en comprendre la rationalité.

Cette faculté d’adaptation est d’abord fondée sur la proximité qui  permet  de  saisir  les fluctuations  des  situations  et  des attitudes, de voir et de saisir la complexité du réel.

Il s’agit, pour les forces terrestres, de s’adapter à tous ceux que les forces côtoient : populations, autorités politiques, organisations, belligérants, ennemis, en développant à tous les niveaux l’ouverture nécessaire pour comprendre.

 

2 - FACE À L'ASYMÉTRIE  CROISSANTE

La lutte contre l’asymétrie ne peut se limiter à éliminer des menaces dont l’évolution permanente contrecarre l’efficacité d’un combat sans fin. Elle passe par une compréhension de sa nature, un renseignement approprié et une bonne gestion de l’information.

 

2.1 – Comprendre l’asymétrie

Comprendre l’asymétrie, c’est d’abord comprendre les acteurs du conflit et les conséquences de leur combat. Hostile à la Force, un ennemi peut se fixer comme but de lui faire échec et lutter directement contre elle. Parfois tel acteur n’agira qu’en fonction d’objectifs ou d’intérêts qui lui sont propres, sans considérer les forces militaires comme les objectifs de son combat. Certains privilégieront les aspects politiques, les oppositions ethniques, les réactions des foules, la violence déclarée pour mettre les forces en difficulté. Ils se situent souvent au confluent du politique et du militaire et, sans hiérarchie formelle, font habituellement partie d’organisations horizontales douées d’une grande capacité d’adaptation. Les actions d’ordre tactique – attentats, assassinats, prises d’otages, attaque d’un village ou d’une unité, émeutes ou manifestations – influent directement sur le niveau stratégique. Face à cela, nos armes paraissent souvent peu adaptées et, si elles se retrouvent souvent en deçà de leur seuil d’utilité, il arrive aussi que le risque soit grand d’en faire un usage inapproprié et contre-productif mis directement à profit par l’adversaire dans sa démarche de « propagande par les actes ».

  • Déterminer son champ d’action

C’est la première obligation, à chaque niveau de commandement. Elle est nécessaire pour préserver la liberté d’action du chef qui dispose toujours d’un espace de manœuvre. Il doit en cerner le périmètre, les capacités dont il peut user et, plus encore, ce qu’il ne peut s’aventurer à faire. Son champ d’action et ses limites découlent naturellement de sa mission, des moyens dont il dispose, de l’aptitude des troupes placées sous son commandement – en particulier dans le cas d’une force

multinationale – ou des contraintes éthiques et juridiques. La détermination de cet espace de manœuvre permet au chef de demeurer dans son domaine d’action et d’éviter d’apporter des réponses inadaptées à des situations parfois insaisissables ou à des actions inhabituelles.

  • S’adapter à l’asymétrie

La lutte contre les menaces asymétriques suppose une grande agilité des chefs et des systèmes de commandement dans la planification comme dans la conduite. La faculté d’adaptation de la force sur le théâtre, comme de l’armée de Terre en général, est une des clés du succès, car l’adversaire est un être vivant et réfléchi qui s’adapte. Il s’agit de le devancer ou d’être condamné à n’agir qu’en réaction.

Les unités terrestres doivent développer des capacités d’innovation très rapides. Le rôle des petits échelons, des cellules de base, celles qui confrontées quotidiennement aux problèmes ne cessent d’imaginer les solutions les plus appropriées, est primordial. L’initiative doit être encouragée de manière à favoriser l’émergence des parades aux menaces asymétriques. Cette action en provenance du terrain doit être soutenue par un dispositif central qui, tout à la fois, discipline le foisonnement des idées, oriente le recueil des expériences et offre  la  réactivité  nécessaire  pour  apporter  des  réponses immédiates quand l’urgence le commande.

Comprendre l’asymétrie, c’est comprendre le combat d’un adversaire qui, au confluent du politique et du militaire, veut faire échec à la mission de la force et, par ses actions, agit directement aux niveaux tactique, opératif et stratégique.

Pour conserver sa liberté d’action, le chef militaire doit déterminer aussi justement que possible son champ d’action avec ses limites et ses impératifs.

L’agilité des systèmes de commandement et la capacité de réaction de l’armée de Terre sont essentielles pour pouvoir s’adapter et, s’appuyant sur les échelons de base, imaginer et développer les meilleures modes d’action face à l’ennemi asymétrique.

 

2.2 – Le renseignement, comprendre tout autant que savoir

La compréhension de l’adversaire et de l’environnement impose de mettre l’accent sur le renseignement qui est, plus que jamais, une fonction essentielle de l’engagement opérationnel et une condition du succès. Cependant, la recherche même du renseignement est complexe quand il s’agit d’établir les conditions d’un retour à la paix, de lutter contre des menaces asymétriques ou de rétablir la confiance.

En passant de la symétrie à l’asymétrie, et au sein d’un même conflit d’une phase à une autre, les forces terrestres doivent passer d’un renseignement où la recherche d’indices matériels permet de déterminer les dispositifs et d’imaginer les intentions à un renseignement plus subjectif où l’analyse systémique trouve sa place. Les équipements, souvent indécelables et confondus au milieu, ne sont plus des signes suffisants pour pénétrer les intentions de l’adversaire. C’est bien l’état d’esprit et la volonté des autres qu’il s’agit de comprendre et la recherche d’un tel renseignement est confrontée au choix des informations utiles. Elle rencontre, en outre, une difficulté particulière lorsqu’il s’agit de  comprendre  un  environnement  foncièrement  différent. Cette caractéristique fait du problème de la langue un des plus critiques pour le renseignement en phase de stabilisation, comme pour toutes les opérations au contact du milieu.

La technologie revêt dans le renseignement une part fondamentale. Les moyens techniques qui sont consacrés à la recherche permettent de développer les instruments d’analyse et de synthèse nécessaires et accroissent la capacité des forces à lutter contre des formes variées de menaces. Mais les outils techniques permettent surtout de savoir là où il s’agit désormais principalement de comprendre. La recherche humaine doit disposer de spécialistes qui, à une solide formation militaire, adjoignent des connaissances approfondies du théâtre, des sociétés et des cultures, des groupes qui s’affrontent, de tout ce qui permet au chef de comprendre, de « sentir ».

En outre, par nature, les conflits asymétriques s’aventurent dans des domaines non militaires qu’il s’agit pourtant d’appréhender dans le cadre de l’opération et de la manœuvre en cours ou en préparation. La recherche du renseignement s’y appuie sur d’au- tres acteurs, sur d’autres réseaux, sur d’autres ministères. Elle participe, aussi, à une lutte élargie, les informations recueillies alimentant d’autres bases que celles de la Force engagée.

Le renseignement n’est pas seulement nécessaire aux phases d’affrontement armé. Il appuie la manœuvre dans toutes ses dimensions parmi la population. La recherche du renseignement doit permettre au chef de confronter les modes d’action, d’anticiper les freins, d’identifier les difficultés quand il lui faut soutenir un processus électoral, désarmer des combattants, aider à la liberté de circulation…

Le renseignement est, plus que jamais, une fonction majeure de l’engagement opérationnel et une clé du succès.

La technologie offre des possibilités qui renforcent les capacités de renseignement des forces terrestres mais permettent surtout de savoir, alors qu’il s’agit bien plus souvent de comprendre. Seule, la conjugaison des dimensions techniques et humaines, la pratique de l’analyse systémique, permettent de donner du sens.

 

2.3 – Combattre par l’image

La lutte pour l’information est un impératif constant qui se pose aux forces terrestres avec d’autant plus d’acuité dans un conflit asymétrique qu’une part des actions adverses reposent elles- mêmes sur l’exploitation des moyens d’information et la manipulation des opinions publiques. Ce qui est cru est plus important que ce qui est vrai. Les emballements et les distorsions médiatiques peuvent influencer les décisions opérationnelles et agir sur le cours des choses en contradiction avec l’action des troupes sur le terrain. Par exemple, bien souvent, les agressions de jeunes gens armés de leurs seules frondes contre des soldats lourdement équipés n’ont pour but que de présenter au monde une lutte inégale et de donner à croire que leur combat est juste, puisqu’il est celui de l’opprimé, celui de David contre Goliath.

Le combat par l’image est caractéristique de la lutte asymétrique. Aussi doit-il être celui des forces terrestres tout autant que celui de leurs adversaires. Lutter contre une information partiale et biaisée, présenter sa propre vision, diffuser son propre film des évènements qui occupent la « Une » du moment sont nécessaires au succès. Ils peuvent aussi parfois éviter que des réussites tactiques ne se transforment en échecs stratégiques. Les forces terrestres doivent être aptes à conduire des manœuvres offensives tout autant que défensives dans le domaine de l’information et de la communication.



 

Séparateur
Titre : S'adapter
Auteur(s) : extrait du FT-01
Séparateur


Armée